évasion fiscale
Question de :
M. Michel Pouzol
Essonne (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Michel Pouzol interroge M. le ministre des finances et des comptes publics sur la lutte contre l'évasion fiscale. La France souffre d'une dette qui s'élève à 2 105,4 milliards d'euros, et d'une fraude fiscale qui lui coûte entre 60 et 80 milliards d'euros par an. 55 % des entreprises françaises sont coupables de fraude fiscale. Cela a pris une telle proportion que la stabilité de nos États est menacée. Il est donc primordial de multiplier les dispositifs de transparence et de lutte contre l'optimisation fiscale. En effet, l'amendement n° 48 voté en séance publique dans le cadre du projet de loi de finances rectificative visait à ce que les entreprises rendent public une fois par an le montant de leur chiffre d'affaires, le nombre de leurs employés, les profits réalisés et les impôts payés. Ces données sont importantes parce qu'elles permettent d'avoir une comptabilité pays par pays et donc de voir si une entreprise réalise du chiffre d'affaires dans un pays mais cumule des profits dans un autre où elle n'a pratiquement pas d'employés, voire d'activité et de montages financiers douteux. Cette technique permettra alors de repérer les entreprises abusant des paradis fiscaux et donc in fine de les sanctionner. Dans une période où la société française est fracturée, où sont trop souvent qualifiés d'assistés, de fraudeurs, les bénéficiaires de minimas sociaux, il est primordial d'affirmer politiquement que les véritables fraudeurs sont les entreprises qui se rendent coupables d'optimisation fiscale et de dumping social. Il souhaiterait alors connaître les dispositifs mis en place par le Gouvernement afin de lutter efficacement contre l'évasion fiscale.
Réponse publiée le 7 février 2017
La lutte contre la fraude fiscale est une priorité pour le Gouvernement. Plusieurs mesures ont d'ores déjà été prises afin d'imposer des dispositifs de transparence aux entreprises et favoriser la lutte contre l'optimisation fiscale. Depuis 2013, les grandes entreprises françaises, leurs sociétés mères, leurs filiales et les entreprises membres du même groupe, doivent déclarer annuellement les méthodes de rémunération appliquées à leurs prix de transfert ainsi que l'identification des pays où sont établies les sociétés liées avec lesquelles elles réalisent les flux. Cette déclaration permet ainsi d'identifier la nature des opérations réalisées avec les sociétés liées et les États d'implantation de celles-ci. Depuis le 1er janvier 2016, ces déclarations doivent être souscrites par voie dématérialisée : cette simplification dans les modalités de transmission de la déclaration permet une exploitation par les services de la direction générale des finances publiques (DGFiP) conforme à l'intention du législateur de mieux contrôler les politiques de prix de transfert des grandes entreprises. Par ailleurs, la délocalisation abusive de profits à l'étranger n'étant pas une pratique limitée aux plus grandes entreprises, le Gouvernement a soutenu, dans le cadre du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, un amendement prévoyant l'abaissement du seuil de la déclaration des prix de transfert à un montant de chiffre d'affaires ou d'actif brut supérieur à 50 M€. Cet amendement, d'ores et déjà adopté par le Parlement, permettra aux services de la DGFiP de renforcer leur action en matière de prix de transfert. En ce qui concerne le dispositif de déclaration « pays par pays » évoqué par l'auteur de la question, le nouvel article 223 quinquies C du code général des impôts (CGI) impose aux grandes entreprises françaises, à compter du 1er janvier 2016, de déposer une déclaration annuelle comportant la répartition pays par pays des bénéfices du groupe, des agrégats économiques, comptables et fiscaux ainsi que des informations sur la localisation et l'activité des entités le constituant. Issue des travaux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans le cadre du plan d'action BEPS (Base Erosion and Profit Shifting), cette obligation a pour objet de faciliter l'échange automatique et réciproque des déclarations entre les 44 États ayant signé à ce jour l'accord multilatéral d'échange de ces déclarations. Dans le même sens, le nouvel article 1649 AC du CGI favorise les échanges d'informations financières. Désormais, les établissements financiers doivent collecter des informations sur les comptes détenus à l'étranger par leurs clients et les transmettre à la DGFiP, sans demande préalable de celle-ci. Les premiers échanges s'effectueront avant la fin de l'année 2017 et concerneront les revenus de capitaux mobiliers, les soldes des comptes et la valeur de rachat des bons ou contrats de capitalisation et placements de même nature perçus à compter du 1er janvier 2016. Le développement des échanges d'informations entre États participe également à la lutte contre l'optimisation fiscale. Enfin, le 12 juillet 2016, les États membres ont adopté la directive UE no 2016/1164 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d'évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le marché intérieur. Cette directive comporte de nombreuses dispositions de lutte contre l'évasion fiscale internationale : une règle de limitation de la déductibilité des intérêts, un régime d'exit tax sur les transferts d'actifs, une règle relative aux sociétés étrangères contrôlées, une clause anti-abus générale et une mesure de lutte contre les dispositifs hybrides.
Auteur : M. Michel Pouzol
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 22 décembre 2015
Réponse publiée le 7 février 2017