Question de : M. Michel Lesage
Côtes-d'Armor (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Michel Lesage attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger sur l'accord de libre-échange avec le Canada et les questions qu'il soulève en matière de lutte contre le changement climatique et de contrôle démocratique. Dans son discours prononcé lors de la conférence environnementale le 25 avril 2016, le Président de la République a affirmé que « la France sera très vigilante pour que les négociations internationales futures, les accords commerciaux, ne remettent pas en cause, de manière subreptice, les avancées qui ont été décidées lors de la COP21 ». Cependant l'accord de libre-échange négocié avec le Canada, qui sera soumis au vote pour adoption au Conseil de l'Union européenne puis au Parlement européen, présente de véritables faiblesses en ce qui concerne la protection de l'environnement et la lutte contre le changement climatique. Aucun objectif de réduction d'émission de gaz à effet de serre ni même d'objectifs généraux ne figurent dans le texte alors même qu'une mention à l'accord de Paris aurait pu être ajoutée en début d'année. Les chapitres 22 et 24 énoncent une série de formules générales s'agissant du droit de l'environnement sans que ceux-ci disposent d'une véritable portée juridique. Le principe de précaution n'apparaît nulle part explicitement dans un texte de plus de 1 500 pages. Qui plus est, le CETA a déjà eu des conséquences sur la réglementation européenne en matière de pollution des carburants. La directive « qualité des carburants » devait attribuer des émissions de CO2 20 % plus élevées pour les carburants canadiens issus des sables bitumineux du pays. Cette disposition a finalement disparu trois semaines après la conclusion des négociations en 2014. D'autre part, le mécanisme de règlement des différends, qui permet à des investisseurs étrangers de contester les décisions des États et des autorités publiques, demeure un véritable motif d'inquiétude, bien que le système ait été notablement modifié devant les nombreuses oppositions qu'il suscitait. Le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur a confirmé qu'il s'agissait d'un traité mixte, c'est-à-dire qu'il nécessite une ratification européenne et une ratification des parlements nationaux. Néanmoins, il est prévu que l'accord soit appliqué de manière « provisoire » en attendant la ratification nationale. Le secrétaire d'État s'est exprimé sur ce point en indiquant que l'entrée en vigueur provisoire ne concernerait que les dispositions qui relèvent de l'aspect communautaire et à condition que le Parlement européen ait émis un vote favorable. Aussi, il souhaiterait savoir ce que recouvrent plus précisément ces dispositions qui appartiennent au champ communautaire mais qui pourraient toutefois avoir des répercussions sur la France. Il voudrait aussi connaître la position du Gouvernement sur les carences de cet accord s'agissant de la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de l'environnement.

Réponse publiée le 16 mai 2017

La France, qui a présidé la COP 21, est particulièrement engagée dans la lutte contre le dérèglement climatique, qui figure au premier rang de ses priorités diplomatiques. La France a soutenu l'adoption, lors du Conseil Affaires étrangères du 18 juillet 2016, des conclusions sur la diplomatie climatique européenne et du plan d'action proposé par le Service européen pour l'action extérieure de l'Union. L'un des volets de ce plan vise à placer les enjeux climatiques au cœur de l'action extérieure de l'Union européenne notamment en matière de politique commerciale. L'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada (CETA) reflète cette volonté. Le CETA est un accord ambitieux, équilibré et mutuellement bénéfique, à la hauteur des liens étroits et historiques qui unissent l'Union européenne, la France et le Canada. S'agissant de la lutte contre le réchauffement climatique et l'environnement, si le principe de précaution n'est pas mentionné explicitement dans l'accord, celui-ci y fait référence en intégrant sa définition, telle qu'elle figure à l'article 15 de la déclaration de Rio. Le préambule fait également référence à l'engagement des parties pour la promotion d'un niveau élevé de protection de la santé et de l'environnement, ce qui place cet engagement comme principe régissant l'ensemble des dispositions de l'accord. Par ailleurs, après avoir envisagé et évalué la possibilité de distinguer les pétroles bruts conventionnels et non conventionnels, la Commission a décidé de ne pas retenir cette option pour le calcul de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les carburants. S'agissant du mécanisme de règlement des différends, le gouvernement de M. Justin Trudeau s'est rallié à la proposition européenne de la Cour de justice des investissements. Porté par la France, ce nouveau dispositif rompt définitivement avec l'ancien système d'arbitrage privé et constitue une première étape vers une justice publique internationale de l'investissement. Enfin, s'agissant du contrôle démocratique, grâce à la mobilisation de la France et au consensus très large qui s'est fait jour entre les Etats membres, la Commission européenne a finalement annoncé le 5 juillet dernier qu'elle comptait soumettre au Conseil, comme la France le souhaitait, la proposition de signer le CETA en tant qu'accord mixte. La France est également très vigilante pour que le champ de l'application provisoire de l'accord soit établi dans le respect de la répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres. Les discussions sur le champ exact de l'application provisoire se poursuivent à Bruxelles. Comme la France l'a demandé, les parlements nationaux auront à se prononcer par un vote sur la ratification du CETA. C'est une question de principe essentielle pour assurer l'adhésion des citoyens européens aux politiques commerciales conduites en leur nom.

Données clés

Auteur : M. Michel Lesage

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger

Ministère répondant : Affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 31 mai 2016
Réponse publiée le 16 mai 2017

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