Question de : M. Olivier Audibert Troin
Var (8e circonscription) - Les Républicains

M. Olivier Audibert Troin appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les graves problèmes de sécurité posés par la multiplication des drones de loisirs dans notre pays. Selon la direction générale de l'aviation civile (DGAC), il y avait, fin 2015, entre 150 000 et 200 000 drones de loisirs en France, dont 98 % de micro-drones d'un poids inférieur à 2 kg. La DGAC souligne par ailleurs que « les risques de chutes, de collision avec des personnes ou des véhicules, voire même la possibilité d'une utilisation à des fins terroristes, sont tout à fait réels ». Ces risques sont confirmés par l'Association internationale du transport aérien (IATA), qui considère que les drones civils représenteraient de plus en plus une « menace réelle et croissante » pour la sécurité des avions de ligne. En théorie, la réglementation française est particulièrement stricte, puisque la France, sans attendre le nouveau cadre réglementaire européen, prévu pour 2018, a pris, le 17 décembre 2015, deux arrêtés qui encadrent très strictement les conditions d'utilisation des drones civils. Le premier arrêté est relatif à l'utilisation de l'espace aérien par les aéronefs qui circulent sans personne à bord et le second est relatif à la conception des aéronefs civils qui circulent sans personne à bord, aux conditions de leur emploi et aux capacités requises des personnes qui les utilisent. Ces arrêtés prévoient notamment un plafond de vol limité à 150 mètres, vol devant s'effectuer à portée de vue de l'opérateur. Le cadre réglementaire concernant l'utilisation des drones civils prévoit également l'interdiction de survoler certains sites sensibles, tels que les centrales nucléaires. Mais en dépit de ces dispositions réglementaires strictes, depuis quelques mois une multiplication inquiétante des actes irresponsables ou malveillants commis à l'aide de ces drones de loisirs est observée. C'est ainsi que le 19 février 2016 et le 18 mars 2016, deux avions Airbus ont été frôlés dans leurs zones d'atterrissage à plus de 1 500 mètres d'altitude par de petits drones de loisirs dont la présence à cet endroit était évidemment totalement interdite pour des raisons de sécurité. Dans les deux cas, grâce à la vigilance des équipages, la collision entre ces avions gros porteurs et ces drones a pu être évitée de justesse mais tous les spécialistes de l'aéronautique s'accordent sur le fait qu'une telle collision aurait pu avoir des conséquences dramatiques, compte tenu des vitesses de déplacement des appareils impliqués. Il faut par ailleurs rappeler qu'en 2015, 15 des 19 centrales nucléaires françaises ont fait l'objet de multiples survols à basse altitude, parfaitement illégaux, de la part de drones dont les propriétaires n'ont pu être identifiés, ce qui pose un grave problème de sécurité nationale, alors que le pays est confronté à de fortes menaces terroristes. Ces récents évènements montrent à l'évidence que le cadre réglementaire actuel, bien que récemment renforcé, doit être complété d'urgence pour mieux prévenir ces utilisations irresponsables ou malveillantes de drones civils sur le territoire national. Il lui demande donc de lui préciser quelles mesures fortes envisage le Gouvernement pour faire respecter le cadre réglementaire strict d'utilisation de ces engins volants qui menacent de plus en plus souvent la sécurité des citoyens. Il lui demande notamment s'il ne conviendrait pas de prévoir l'immatriculation systématique de ces drones de loisirs et d'obliger les fabricants de ces drones à intégrer dans ces appareils des dispositifs permettant l'identification électronique automatique de ces engins et le signalement automatique des zones de survol interdites.

Réponse publiée le 31 janvier 2017

Depuis les survols de drones survenus à l'automne 2014 au-dessus de sites sensibles sur le territoire national, les ministères se mobilisent sous l'égide du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) pour apporter une réponse globale à la menace des drones malveillants. Plusieurs groupes de travail ont ainsi été constitués. Il ressort des travaux de ces groupes que la menace des drones malveillants est avérée, asymétrique, persistante et évolutive en termes de points potentiels d'application et de capacités techniques. Plusieurs solutions en matière de détection et de neutralisation sont mobilisables par les forces de sécurité intérieure et de défense, et d'autres s'annoncent prometteuses à court terme. Des dispositifs de protection anti-drones ont d'ailleurs déjà été engagés pour sécuriser de grands événements au cours de l'été 2016. Dès lors, un cadre de cohérence a été conçu pour l'élaboration de directives ministérielles sur la lutte anti drone, adaptées à la nature des événements à traiter ou aux infrastructures à protéger. De plus, une procédure de maîtrise des risques reposant sur la coordination des affectataires de fréquences a été établie en cas de projet de mesures électroniques anti drones pour la gestion d'événements programmés. Une concertation avec les industriels de la filière des drones et des opérateurs de télécommunications sur l'enregistrement, l'identification et le suivi des drones aériens civils a également été initiée sous la direction de la Commission interministérielle de coordination des réseaux et des services de télécommunications (CICREST). Enfin, les ministères ont contribué aux travaux relatifs à la proposition de loi sénatoriale sur la sécurité des drones civils. L'enregistrement des drones civils constitue un des messages forts. Cohérent avec l'immatriculation des drones civils à usage professionnel qui est déjà encadrée et en vigueur, cet enregistrement sera obligatoire à partir d'un seuil de poids qui devra être arrêté réglementairement. Plusieurs pays (USA, Japon, Russie notamment) ont fait le choix d'un seuil de 250 g. Cet enregistrement doit permettre une utilisation fiable et sûre de l'espace aérien par les télé-pilotes de drones, une sensibilisation des responsables légaux des drones sur les exigences du télé-pilotage de tels aéronefs, une quantification précise du nombre de drones acquis sur le territoire national et la lutte contre l'impunité. Il aura pour support technique une base de données, gérée au niveau national et facilement accessible pour tout responsable légal de drone grâce à internet. Cet enregistrement doit se traduire par la délivrance par l'administration gestionnaire de cette base de données d'un numéro qui devra figurer sur la carcasse de l'aéronef. En outre, afin d'assurer le suivi des drones civils lors de leurs vols, leur signalement électronique apparaît impératif. Ce signalement électronique sera complémentaire de leur enregistrement. Il est subordonné à l'existence d'un réseau d'infrastructure pouvant véhiculer les informations correspondantes via un serveur étatique, ce qui est à portée de main technologique avec le développement de l'internet des objets. Dès sa conception, un drone doit donc pouvoir être associé à un identifiant électronique, à l'instar des adresses MAC pour d'autres systèmes d'information. Durant les vols de drones, cet identifiant permettra la connexion au réseau grâce à une balise communicante qui sera imposée par les normes industrielles. Un véritable système d'informations de drones pourra ainsi voir le jour. Les informations transmises au réseau par cette balise pourront alors permettre d'alerter les forces de défense et de sécurité en cas de vol au-dessus d'un lieu interdit, grâce à un message reçu sur smartphone et découlant de la connexion de la balise au réseau. S'il s'agit d'intervenir en réaction à un survol illicite, ces informations pourront aussi être obtenues par la procédure de réquisition judiciaire qui sera adressée à l'opérateur de réseau. L'enregistrement et le signalement électronique des drones civils relevant d'expertises tenant à la 3ème dimension, il est logique qu'une administration centrale ayant une compétence avérée et exhaustive en matière d'aviation civile en assure la supervision opérationnelle et technique, notamment pour ce qui concerne l'exploitation de la base de données d'enregistrement et du système d'information de drones. De telles mesures impliquent une coopération avec la filière des drones civils qui sera développée au sein du conseil des drones civils. Pour le ministère de l'Intérieur, la gendarmerie des transports aériens, qui dispose d'une réelle expertise en la matière, sera en mesure de s'appuyer sur les processus associés à l'enregistrement et au signalement électronique des drones civils pour mener ses investigations en cas de nouveaux survols malveillants.

Données clés

Auteur : M. Olivier Audibert Troin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Tourisme et loisirs

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 28 juin 2016
Réponse publiée le 31 janvier 2017

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