Turquie
Question de :
M. Sergio Coronado
Français établis hors de France (2e circonscription) - Écologiste
Question posée en séance, et publiée le 20 juin 2013
SITUATION EN TURQUIE
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour le groupe écologiste.M. Sergio Coronado. Monsieur le ministre des affaires étrangères, les manifestations pacifiques qui ont débuté fin mai à Istanbul pour protéger la place Taksim et sauver le parc Gezi ont été brutalement réprimées par le Gouvernement. Des arrestations massives - plus de six cents personnes ont été arrêtées dans la seule journée du dimanche 16 juin à Istanbul et à Ankara -, plus de sept mille cinq cents blessés et quatre tués à ce jour : tel est le bilan de la répression contre un mouvement non violent.
La police turque a procédé, hier encore, à des dizaines d'arrestations de responsables politiques ayant pris part aux manifestations antigouvernementales, selon le barreau d'Istanbul. Le Gouvernement a même annoncé la possibilité d'un recours à l'armée pour réprimer et le Premier ministre n'a cessé d'utiliser une rhétorique de guerre civile.
Jeudi dernier, le Parlement européen a adopté une résolution dans laquelle il a fait part de sa vive préoccupation devant les preuves de brutalités policières et de sa condamnation de l'usage excessif de la force contre les manifestants. Une démocratie, ce ne sont pas uniquement des élections gagnées : les libertés d'expression et de manifestation sont aussi des conditions nécessaires. (Murmures sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. Nicolas Dhuicq. Ah oui, on l'a vu !
M. Sergio Coronado. La répression semble avoir eu pour résultat le retour à un calme fragile. Pour autant, nous ne pouvons pas rester sans rien dire devant le déchaînement de violence policière qui a agité la Turquie ces dernières semaines. La Turquie est un pays ami, en effet, qui a vocation, pour les écologistes, dont je suis aujourd'hui le porte-parole, à intégrer l'Union européenne.
Ma question est donc double, monsieur le ministre. En octobre 2011, un accord de coopération sur la sécurité intérieure a été signé par l'ancien gouvernement et la Turquie, accord non ratifié à ce jour. Selon ce texte, la France accepte de coopérer en matière de lutte contre le terrorisme. La qualification hasardeuse et arbitraire de " terroriste " par les autorités turques, qui inclut journalistes, avocats et responsables politiques, doit nous conduire à regarder à deux fois cet accord de coopération. Quelle est la position du Gouvernement au sujet de ce texte ?
Enfin, quelles sont les initiatives que la France compte prendre pour appeler les autorités turques au dialogue avec des manifestants pacifiques que le pouvoir ne cesse de qualifier de çapulcu, c'est-à-dire de " maraudeurs ". (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Il est vrai que, depuis plusieurs semaines déjà, il y a en Turquie, pays qui n'est pas éloigné de nous, un mouvement de protestation extrêmement massif.
À ce mouvement de protestation, le gouvernement turc a choisi d'apporter une réponse double : d'une part, l'évacuation par la police des manifestants, avec un bilan lourd, et, d'autre part, la mobilisation de soutiens populaires : ce week-end, ont ainsi été organisées des manifestations qui ont réuni plusieurs dizaines de milliers de partisans du gouvernement à Istanbul et à Ankara.
Vous posez deux questions.
La première concerne le texte de la convention franco-turque signée en octobre 2011 par l'ancien gouvernement. Ce texte, comme vous le savez sans doute, est soumis à l'examen de la commission des affaires étrangères, qui ne l'a pas inscrit à son ordre du jour. N'ayez cependant pas d'inquiétude car, sans entrer dans les détails, le contenu de ce texte, à supposer même qu'il soit adopté, donne la garantie qu'il ne pourra pas être utilisé contre les manifestants dans des conditions contestables.
Pour répondre à votre seconde question, je me suis exprimé en ce qui concerne la Turquie et j'ai redit à mon homologue turc que notre souhait est que la voie du dialogue soit très rapidement retrouvée (" Ah ! " sur les bancs du groupe UMP) ...
M. Philippe Meunier. Ça, c'est une réponse !
M. Laurent Fabius, ministre. ...et que le gouvernement turc fasse preuve d'une grande retenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Auteur : M. Sergio Coronado
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 juin 2013