15ème législature

Question N° 1035
de M. Maxime Minot (Les Républicains - Oise )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Éducation nationale et jeunesse
Ministère attributaire > Éducation nationale et jeunesse

Rubrique > enseignement maternel et primaire

Titre > Bilan de la réouverture des écoles dans le cadre du déconfinement

Question publiée au JO le : 19/05/2020
Réponse publiée au JO le : 09/12/2020 page : 3522

Texte de la question

M. Maxime Minot appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la réouverture des écoles dans le cadre de la stratégie de déconfinement. Il souhaite l'interroger sur le bilan de la première semaine de retour en classe, depuis la rentrée scolaire partielle du 12 mai 2020.

Texte de la réponse

RÉOUVERTURE DES ÉCOLES EN PÉRIODE DE DÉCONFINEMENT


M. le président. La parole est à M. Maxime Minot, pour exposer sa question, n°  1035, relative à la réouverture des écoles en période de déconfinement.

M. Maxime Minot. Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, alors que notre pays traverse une crise sans précédent et est entré dans une seconde phase, celle du déconfinement progressif, la question de la réouverture des écoles est hautement sensible et, très certainement, fort épineuse. Permettez-moi d'ailleurs de remercier à travers vous tous les enseignants qui, lors du confinement, ont assuré, comme vous venez de le dire, la continuité pédagogique, laquelle a parfois été rendue très difficile par les inégalités sociales et territoriales, ainsi que par la fracture numérique dont je vous ai déjà parlé à maintes reprises.

Je voudrais comprendre les motivations qui ont présidé à votre décision, visant notamment à assurer la prise en charge des enfants les plus vulnérables. En effet, je n'ai pas été convaincu, en raison de la responsabilité que vous faites peser sur les élus et des surcoûts induits pour les collectivités – qui ne seront sans doute pas compensés. Ainsi, de nombreux maires de l'Oise ont pris des arrêtés différant la réouverture des écoles, voire la reportant à septembre. En tant qu'ancien maire, je mesure pleinement leurs réticences.

Je ne suis pas convaincu non plus par le contenu pédagogique proposé. Dans de nombreux cas, en effet, la reprise de l'école s'accompagne d'un retour à la normale, mais elle se limite parfois à de la garderie et isole les enfants les uns des autres pour limiter tout contact, ce qui entraîne pour eux de la frustration.

Enfin et surtout, je ne suis pas convaincu non plus en raison du risque sanitaire que votre décision fait courir aux enfants aux parents, aux enseignants et aux personnels municipaux. Dans le département de l'Oise, qui est toujours classé rouge, les écoles referment leurs portes quelques jours seulement après les avoir rouvertes, en raison des nombreux cas de covid-19 détectés.

Comme dans de nombreuses situations, il faut ici mettre en balance les bénéfices et les inconvénients. Ici, la balance penche indéniablement du mauvais côté, et je ne m'en réjouis pas – bien au contraire. Quel premier bilan tirez-vous de cette rentrée pour le moins particulière et comment évaluez-vous le risque d'un retour en arrière, à l'heure où, dans mon département de l'Oise, de nombreux enseignants font valoir leur droit de retrait ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Votre question porte, en creux, celle de savoir ce que vous feriez si c'était à vous qu'incombait la décision à prendre. J'en déduis que vous êtes favorable à un retour des élèves en classe en septembre. Il faut assumer la responsabilité de cette position.

M. Maxime Minot. Bien sûr !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . Cela signifie que vous acceptez le décrochage de pans entiers de notre jeunesse, car c'est de cela qu'il s'agit.

M. Maxime Minot. Pourquoi, alors, seulement les élèves du primaire ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . Ce choix, qui n'est pas celui que font majoritairement d'autres pays européens, ne serait pas du tout responsable. Déjà – et je vous renvoie à ce propos à la réponse que je viens de faire à M. Peu –, les quelques semaines de confinement que nous avons connues produisent inévitablement du décrochage. Il ne s'agit du reste pas là d'une spécificité française, et puisqu'il nous a plu, tout au long de la crise, de nous comparer à d'autres pays, je vous invite à comparer ce qui se passe en Allemagne avec ce qui a été fait en France : vous ne rougirez pas d'être Français.

M. Maxime Minot. Je n'ai pas parlé de l'Allemagne !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . L'enseignement à distance a plutôt bien réussi, malgré bien des failles, mais n'a pas empêché un décrochage, notamment en lycée professionnel, ainsi qu'à l'école primaire, où nous avons aujourd'hui des difficultés à faire revenir les élèves de CP – cours préparatoire – et de CM1 – cours moyen première année –, de REP+ – réseau d'éducation prioritaire renforcé –, au moment même où ils doivent rentrer à l'école.

Cette école n'est pas une garderie et vous ne rendez pas service à l'école de la République en prétendant qu'elle en est une, alors précisément que nous travaillons à ce qu'elle ne le soit pas, au moyen notamment de la rentrée par niveau et de toutes les mesures que vous critiquez. Si nous faisions ce que vous voulez, l'école serait en effet une garderie, mais ce n'est pas ce que nous faisons. C'est ainsi que nous mettons en œuvre l'entrée par niveau, avec des circulaires pédagogiques pour chaque niveau, et assurons un soutien aux équipes enseignantes. Certes, nous avons pleinement assumé la souplesse locale, visant à la fois à ce que les équipes enseignantes s'organisent et à ce que les communes fassent qu'elles souhaitent.

Je retiens de votre propos que vous êtes solidaire du petit pourcentage de communes qui ont décidé de ne pas rouvrir les écoles d'ici à septembre – 7 % à 8 % à ce stade, et ce chiffre diminuera encore. C'est une position, encore une fois, que vous devez assumer. Notez néanmoins que 92 % des maires de France ont raisonné différemment, quelle que soit leur tendance politique. On peut certes toujours souligner, sur chaque point, les inconvénients, mais c'est un sport un peu trop facile. Il faut en revanche, comme vous l'avez dit, les mesurer aux avantages, et je n'ai aucune peine à assumer devant vous le fait que, dans ce domaine, nous avons mesuré ce rapport, et que c'est la raison pour laquelle nous sommes en train de déconfiner. D'autres pays observent ce que nous faisons car la France a une manière particulièrement intéressante de lutter contre le décrochage scolaire causé par le confinement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Minot.

M. Maxime Minot. Monsieur le ministre, vous parlez de décrochage scolaire pour nos élèves, mais dans mon département de l'Oise, où il a été décidé de rouvrir l'ensemble des écoles primaires pour éviter le décrochage des enfants vulnérables, il y a aussi des décrocheurs scolaires dans le secondaire et dans les universités.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. C'est pour cela que nous allons essayer de les rouvrir !

M. Maxime Minot. Pourquoi donc rouvrir les écoles, où nos jeunes peuvent être infectés par le covid-19 ? Je note une claire contradiction dans votre raisonnement depuis le début de la crise : vous disiez précédemment qu'il fallait vite fermer les classes pour lutter contre la propagation du virus, et vous devenez maintenant un ardent défenseur de la réouverture, alors que le virus circule fortement dans notre département de l'Oise et sur le territoire national.