Question orale n° 1036 :
Transférabilité des contrats d'assurance-vie

15e Législature

Question de : M. Patrick Hetzel
Bas-Rhin (7e circonscription) - Les Républicains

M. Patrick Hetzel interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'épargne investi par les citoyens en partie en assurance vie. Cet investissement confère des avantages fiscaux et notamment en matière de transmission du patrimoine dès lors que le contrat a été souscrit avant l'âge de 70 ans par l'épargnant. Se pose toutefois la question de la transférabilité de ces contrats. Aujourd'hui, un concitoyen qui veut transférer son contrat doit en réalité d'abord le « racheter » puis réinvestir via un nouveau contrat. Ce qui pose évidemment problème pour les épargnants de plus de 70 ans qui perdent ainsi les avantages fiscaux liés au contrat. En raison de la situation actuelle des marchés financiers et de l'économie, ne pourrait-on pas autoriser ces épargnants à transférer leur contrat sans rachat préalable, dès lors qu'ils placent leur épargne exclusivement en « unités de comptes » et non plus en « fonds en euros » ? Cela aurait le double avantage de leur donner un peu plus de liberté dans leur gestion patrimoniale d'une part, et d'autre part d'encourager les investissements dans l'économie réelle qui, pour se redévelopper après la crise du covid-19, aura bien besoin de financements et d'investisseurs. Il souhaite connaître son avis sur ce sujet.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020

TRANSFÉRABILITÉ DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE
M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour exposer sa question, n°  1036, relative à la transférabilité des contrats d'assurance-vie.

M. Patrick Hetzel. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'action et des comptes publics, concerne l'épargne investie par nos concitoyens en assurance-vie. Cet investissement confère des avantages fiscaux, notamment en matière de transmission du patrimoine, dès lors que l'épargnant a souscrit le contrat avant l'âge de 70 ans. Se pose toutefois la question de la transférabilité des contrats. Pour l'heure, quelqu'un souhaitant transférer son contrat doit d'abord le racheter avant de le réinvestir dans un nouveau ; cela pose évidemment problème aux épargnants de plus de 70 ans, qui perdent ainsi tous les avantages fiscaux liés aux contrats pourtant souscrits avant cet âge.

Compte tenu de l'état des marchés financiers et de notre économie, ne pourrait-on pas autoriser ces épargnants à transférer leur contrat sans rachat préalable, pourvu qu'ils placent leur épargne uniquement en unités de compte, à l'exclusion de ce que l'on appelle « les fonds en euros » ? Cela représenterait un double avantage : d'une part, leur donner un peu plus de liberté dans leur gestion patrimoniale ; d'autre part, encourager les investissements dans l'économie réelle, qui, après la crise du covid-19, a bien besoin de financement et d'investisseurs. Le Gouvernement serait-il donc prêt à faire évoluer les règles en vigueur dans ce domaine, ce qui contribuerait à réinjecter de l'argent frais dans notre économie réelle ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Votre question, monsieur Hetzel, permet de préciser la position du Gouvernement sur les différentes options que vous avez évoquées et de rappeler les règles en vigueur pour les épargnants qui souhaitent transférer leur contrat d'assurance-vie. Il existe deux possibilités.

La première consiste à racheter son contrat puis à réinvestir les sommes récupérées dans un nouveau. Cela conduit à perdre les avantages fiscaux liés à l'antériorité du contrat, justifiés notamment par la volonté d'inciter à une détention longue de l'épargne, une assurance-vie étant un produit liquide dont le montant peut être retiré à tout moment. Permettre une transférabilité avec un changement d'assureur conduirait à accroître la liquidité des contrats de manière disproportionnée, ce qui amènerait, selon nous, les assureurs à limiter davantage leurs investissements en actions. Cette mesure irait donc à l'encontre de la loi PACTE – relative à la croissance et la transformation des entreprises – du 22 mai 2019, dont l'objectif est au contraire de développer l'investissement en actions. Elle irait également à l'encontre des travaux menés au niveau européen pour que la directive Solvabilité II soit moins pénalisante vis-à-vis des investissements en actions à long terme. Enfin, au niveau prudentiel, en cas de remontée des taux, la transférabilité viendrait dangereusement menacer le bilan des assureurs, qui s'en trouveraient exposés à des retraits potentiellement élevés dans le cas où leurs actifs perdraient de la valeur. Une mesure de transférabilité permettant de changer d'assureur, parce qu'elle ferait peser un risque sur la sécurité de l'épargne, n'est donc pas envisagée à ce stade.

Mais il existe une deuxième possibilité de transférer son contrat, qui consiste à le transformer en un nouveau contrat souscrit auprès du même assureur. L'article 125-0 A du code général des impôts, simplifié par la loi PACTE, permet à l'épargnant, par avenant au contrat ou souscription d'un nouveau contrat auprès du même assureur, de transformer son contrat tout en conservant son antériorité fiscale. Ainsi le nouveau contrat issu d'une transformation est réputé avoir été souscrit à la date du premier versement effectué sur le bon ou le contrat d'origine, avec toutes les conséquences attachées à cette antériorité, y compris pour l'application des articles 757 B et 990 I du code général des impôts relatifs au régime fiscal applicable en cas de décès.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Vous avez rappelé le droit en vigueur et la politique poursuivie par le Gouvernement, alors que je vous demandais si vous étiez prêts à faire évoluer les règles relatives à l'assurance-vie. Je retiens donc de votre réponse que non. Vous nous dites que la transférabilité comporte le risque d'obtenir encore moins d'investissements pour l'économie réelle. J'insiste sur l'argument que j'ai développé : l'idée n'est pas simplement de faciliter le transfert ; il s'agit de l'autoriser dès lors que l'on investit non plus en fonds en euros mais en unités de compte. Le problème que vous mentionnez serait ainsi résolu. Vous ne répondez donc pas à ma question. J'aimerais savoir si le Gouvernement ne pourrait pas envisager une telle évolution des règles : la transférabilité serait possible, mais à condition d'opérer une reconversion en unités de compte et non plus en fonds en euros.

M. Xavier Breton. Très bien !

Données clés

Auteur : M. Patrick Hetzel

Type de question : Question orale

Rubrique : Assurances

Ministère interrogé : Action et comptes publics

Ministère répondant : Action et comptes publics

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2020

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