15ème législature

Question N° 1043
de M. Moetai Brotherson (Gauche démocrate et républicaine - Polynésie Française )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Titre > limitation du cumul des mandats en Polynésie française

Question publiée au JO le : 27/06/2018
Réponse publiée au JO le : 27/06/2018 page : 6703

Texte de la question

Texte de la réponse

LIMITATION DU CUMUL DES MANDATS EN POLYNÉSIE FRANÇAISE


M. le président. La parole est à M. Moetai Brotherson, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Moetai Brotherson. Madame la ministre des outre-mer, Paul Ricœur disait : « Ce qui arrive est toujours autre chose que ce que nous avions attendu ».

À lire le projet de réforme des institutions qui nous est annoncé, nous sommes tentés de lui donner raison.

En effet, ce projet de révision s'accompagne de deux projets de loi organique et ordinaire, qui fixent notamment l'interdiction du cumul des mandats électifs dans le temps, au-delà de trois mandats consécutifs. Les Français attendaient une limitation du nombre des mandats, une réduction par rapport à un existant sans contrainte.

Étant issu du privé, je fais partie de ceux qui approuvent cette limitation, gage de renouvellement de la classe politique. Un lagon sans passe est, à l'instar d'une classe politique éternelle, un écosystème qui finit par s'étouffer, faute de renouvellement. Dans les faits, ce qui arrive est conforme, à une exception près, à la Polynésie.

Depuis le gouvernement précédent, des échanges, des réflexions entre les élus polynésiens, le Gouvernement central, le Conseil économique, social et culturel, ont mené aux accords de Papeete, prélude aux accords de l'Elysée. Dès l'arrivée du nouveau Gouvernement, la grande réflexion des Assises de l'outre-mer a été lancée, dont nous aurons les conclusions cette semaine.

Madame la ministre, à aucune des étapes de ces réflexions, à aucun moment de ces échanges, à aucune tribune politique récente ne s'est exprimé le besoin, ou même l'envie, d'augmenter le nombre de mandats successifs du président de l'exécutif local de Polynésie. C'est pourtant ce que propose le projet de réforme, qui tend à modifier l'article 74 de la loi organique, portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Cette modification, paradoxalement, introduit une augmentation et non une diminution du nombre de mandats successifs, qui passerait alors de deux à trois.

Madame la ministre, c'est à l'unanimité que l'Assemblée de Polynésie s'est prononcée, le 7 juin dernier, contre ce projet de réforme. Le Gouvernement persistera-t-il à aller jusqu'au bout du paradoxe, pour donner raison à Paul Ricœur ? Mauruuru e te aroha la rahi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe NG.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Monsieur le député, jeudi dernier déjà, au Sénat, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur cette relation entre le Gouvernement et la Polynésie, qui repose sur deux principes. Le premier est celui d'un dialogue constant et confiant, qui prenne en compte les particularités de la Polynésie et les enjeux de ce pays. C'est le sens du toilettage du statut sur lequel nous échangeons depuis plusieurs mois, c'est aussi la prise en compte des contraintes spécifiques de la Polynésie, comme l'a rappelé le Premier ministre, notamment pour ce qui est des questions de santé ou de développement numérique. C'est aussi une volonté ferme du Gouvernement d'accompagner les conséquences des essais nucléaires et nous pouvons nous féliciter du bon fonctionnement de ce dossier depuis quelques mois.

J'ai évoqué tous ces sujets avec le président de la Polynésie, M. Édouard Fritch, qui vient d'être réélu.

Le second principe est de parler de transparence et de parler vrai. C'est pourquoi, je le répète, les engagements du Président de la République pour une démocratie représentative, efficace et responsable, parce qu'ils concernent tous les Français, seront aussi appliqués en Polynésie française.

Alors oui, le nombre de parlementaires sera réduit. Les autorités exécutives locales sont concernées par cette nouvelle règle de limitation dans le temps du cumul des mandats. Quant au mandat du président du pays, le droit commun s'appliquera là encore.

Vous me connaissez, monsieur le député, je me bats toujours pour que l'on reconnaisse les spécificités des territoires d’outre-mer, pour que l'on prenne en compte la nécessité d'assumer la différenciation. Le Président de la République le veut, mais il est certains sujets pour lesquels la différenciation n'est pas possible : les sujets d'intérêt national.