Conditions d'exercice des personnels d'aides à domicile
Question de :
M. Joaquim Pueyo
Orne (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Joaquim Pueyo interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur les conditions d'exercice des personnels d'aides à domicile (aide ménagère, auxiliaires de vie, technicienne de l'intervention sociale et familiale, aide-soignante, aide médico-psychologique). On n'a pas attendu la crise sanitaire liée au covid-19 pour découvrir les difficultés auxquelles faisaient face ces Français, et surtout ces Françaises, chargés d'accompagner les plus fragiles dans leur vie quotidienne. Il faut tout de même rappeler les conditions difficiles dans lesquelles ils ont eu à opérer au début de cette épidémie. En contact avec des populations à risque (personnes âgées, personnes handicapées, malades chroniques...), ils n'ont pas pu disposer des protections (masques, gels, kits de protection) en quantité suffisante. Pourtant, ils ont accompli leur mission car c'est dans les moments de crise que les plus fragiles sont surexposés. Parfois isolés de leurs familles, ces derniers dépendaient grandement de tous ces personnels accompagnants. Or M. le député avait déjà soulevé les difficultés rencontrées par ces professions en février 2019 à l'occasion d'une précédente question orale. La question de la revalorisation de leurs activités et de la prise en compte d'aspects organisationnels était déjà de mise. Dans les territoires ruraux, la mobilité est centrale et les déplacements longs plus nombreux. M. le député avait indiqué que plusieurs trajets dans une journée n'étaient ni indemnisés financièrement ni décomptés dans le temps de travail. Il lui avait été répondu qu'il avait été procédé à un agrément à la convention collective de branche de l'aide à domicile, afin de mieux prendre en compte le temps et les frais de déplacement des personnels, et qu'une mission avait été confiée à la direction générale de la cohésion sociale pour définir et mettre en œuvre des actions concrètes visant à améliorer la qualité de vie au travail des professionnels de l'aide à domicile. Qu'en est-il ? Durant la crise sanitaire, sans bruit, ces personnels ont joué un rôle primordial de protection sociale et psychologique. Le nombre de personnes âgées va augmenter, les besoins en aide à la personne sont de plus en plus importants alors même que ces métiers font face à un défaut d'attractivité. Il est notamment dû aux faibles rémunérations proposées, aux temps partiels subis, à la non prise en compte des spécificités de la profession (planning hachés, pénibilité) et à l'insuffisance de la prise en charge des frais professionnels. Une réflexion devait s'engager sur les métiers de la dépendance dans le cadre du projet de loi sur ce sujet qui n'a malheureusement toujours pas été présenté et examiné. Selon les associations, ce sont plusieurs centaines de millions d'euros qui doivent être investies afin de répondre à cette situation et la crise du covid-19 a démontré, s'il était encore nécessaire, le rôle fondamental de ces professions d'accompagnement des Français les plus fragiles. Il lui demande les mesures qui seront ajoutées au futur projet de loi pour répondre à ces problématiques et ainsi utiliser le retour d'expérience de la crise actuelle.
Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020
AIDES À DOMICILE
M. le président. La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour exposer sa question, n° 1047, relative aux aides à domicile.
M. Joaquim Pueyo. Nous n'avons pas attendu la présente crise sanitaire pour découvrir les difficultés auxquelles les aides à domicile faisaient face dans l'accompagnement quotidien des plus fragiles. Il faut tout de même rappeler les conditions dans lesquelles elles ont dû opérer au début de l'épidémie. En contact avec des populations à risque – personnes âgées ou handicapées, malades chroniques… –, ces personnels n'ont pas disposé des protections – masques, gels, kits de protection – en quantité suffisante. Pourtant, ils ont accompli leur mission avec une grande conscience professionnelle car c'est dans les moments de crise que les plus fragiles sont surexposés. Parfois isolés de leurs familles, ces derniers dépendaient grandement des aides à domicile pour conserver un minimum de lien social – je tiens donc ici à les remercier pour leur engagement sans faille.
En février 2019, à l'occasion d'une précédente question orale, j'avais déjà soulevé les difficultés rencontrées par ces professions : la revalorisation de leurs activités et la prise en compte d'aspects organisationnels étaient déjà d'actualité. En ce qui concerne le temps de travail et les frais de déplacement, il m'avait été indiqué qu'une mission avait été confiée à la direction générale de la cohésion sociale – DGCS – pour définir et mettre en œuvre des actions concrètes visant à améliorer la qualité de vie au travail des professionnels de l'aide à domicile. Qu'en est-il ?
Nous le savons, avec le vieillissement de la population, la demande d'aide va augmenter considérablement, alors même que ces métiers souffrent d'un défaut d'attractivité. Or la qualité de la prise en charge est étroitement liée à celle de la prestation humaine apportée. L'heure est venue de reconnaître l'action de ces professionnels par une revalorisation significative de leur rémunération. Une réflexion doit en outre être engagée sur les métiers de la dépendance dans le cadre d'un projet de loi qui n'a malheureusement toujours pas été présenté ni examiné.
Madame la secrétaire d'État, à quel moment les primes dédiées aux auxiliaires de vie seront-elles versées, et selon quelles modalités ? Pouvez-vous préciser le calendrier de l'examen du projet de loi sur la dépendance ? Quelles mesures seront-elles proposées afin d'utiliser l'expérience de la crise que nous traversons ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie d'appeler l'attention sur les services d'aide et d'accompagnement à domicile – SAAD. Nous connaissons les difficultés dans lesquelles ils ont eu à travailler au début de l'épidémie. Le ministère les a soutenus tout au long de cette crise, avec des livraisons hebdomadaires de masques prélevés sur les stocks de l'État, par l'intermédiaire des ARS et des pharmacies. Les départements ont également été présents aux côtés des ARS pour en distribuer aux professionnels. Un accompagnement sanitaire a été proposé grâce à l'instauration d'une astreinte gériatrique. En matière de soutien financier, les ordonnances du 25 mars et du 15 avril 2020 prévoient une garantie de financement des SAAD, tarifés ou non, par le département. La signature du décret précisant les modalités de cette garantie, nécessaire pour traverser la crise, est imminente.
Pour ce qui est du versement d'une prime exceptionnelle pour les professionnels des SAAD, particulièrement mobilisés pendant la crise, les échanges se poursuivent avec les départements, dans le respect des compétences de chacun, pour en assurer le financement. Nous sommes encore au cœur de la crise ; comme toutes les crises, celle-ci souligne et amplifie à la fois les atouts et les difficultés. Les atouts sont évidents : les intervenants des services à domicile font partie des 800 000 professionnels du grand âge qui se sont fortement mobilisés. Quant aux difficultés structurelles du secteur, il est crucial d'y répondre : je pense aux difficultés économiques récurrentes des professionnels, qui ne leur permettent pas de faire face aux coups durs, mais aussi aux problèmes de coordination entre l'accompagnement et le soin, au manque de reconnaissance des personnels et à la pénibilité des métiers.
Des travaux techniques sont en cours pour la mise en œuvre de mesures concrètes destinées à revaloriser ces métiers, mesures inspirées notamment des propositions du rapport de Myriam El Khomri sur le sujet. Outre la question centrale de l'évolution des rémunérations, qui fera l'objet d'échanges spécifiques avec l'ensemble des acteurs du secteur, les autres dispositions portent sur l'évolution des compétences, la diminution des risques professionnels et l'augmentation des entrées en formation. Tout ce qui touche à l'attractivité des métiers du grand âge fera très rapidement l'objet d'échanges avec tous les partenaires impliqués dans le secteur en vue de déboucher sur un plan partagé et intégré dans la réflexion plus large sur la réforme du grand âge.
M. le président. La parole est à M. Joaquim Pueyo.
M. Joaquim Pueyo. Merci pour cette mise en perspective. Il est néanmoins urgent d'agir dans la mesure où les aides à domicile font face à des difficultés : emploi à temps partiel, rémunérations très faibles, temps de transport qui n'est pas toujours rémunéré ou qui n'est rémunéré qu'en partie… Le sujet est d'autant plus important que, j'y insiste, la population vieillit. Si l'on veut améliorer la prise en charge de nos aînés, il faut renforcer l'aide à domicile et diversifier les hébergements en dehors des maisons de retraite. C'est un sujet de société qui me paraît majeur, d'où la question que je me suis permis de vous poser. Nous serons bien entendu attentifs à votre projet de loi sur la dépendance, à mes yeux essentiel.
Auteur : M. Joaquim Pueyo
Type de question : Question orale
Rubrique : Professions et activités sociales
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2020