Révision des critères de classement des écoles en zone d'éducation prioritaire
Question de :
Mme Émilie Chalas
Isère (3e circonscription) - La République en Marche
Mme Émilie Chalas alerte M. le ministre de l'éducation nationale sur la situation d'écoles situées dans des quartiers particulièrement défavorisés mais ne bénéficiant plus du statut REP depuis leur rattachement à un collège situé hors du quartier. C'est le cas par exemple de l'école Anatole France située dans le quartier Mistral de Grenoble, l'une des zones urbaines sensibles de l'agglomération grenobloise, quartier classé politique de la ville, malheureusement trop souvent marqué par des faits de délinquance grave et présentant les indicateurs sociaux parmi les plus défavorables de l'agglomération, notamment en termes de déscolarisation. Cette école ne bénéficie plus du statut REP depuis 2011, date à laquelle elle a été rattachée au collège Aimé Césaire qui accueille également les enfants du quartier voisin des Eaux-Claires. Si l'on ne peut que se réjouir de la mixité sociale permise par ce nouveau collège, il est paradoxal que cela ait eu pour conséquence de déclassifier les écoles de la filière amont situées dans des quartiers défavorisés. Par ce fait les enfants de ces quartiers ne peuvent bénéficier des mesures spécifiques telles que le dédoublement des classes de CP et CE1. Alors que cette situation ne semble pas isolée, il semble impératif de revoir les critères permettant de classer les écoles en zone d'éducation prioritaire afin que tous les enfants des quartiers les plus défavorisés bénéficient du plein soutien de la République pour leur réussite scolaire et leur future émancipation sociale. Elle lui demande quelle est la stratégie du ministère pour remédier à cette incohérence et compenser cette situation dans la période de transition avant la prochaine carte scolaire.
Réponse publiée le 4 décembre 2018
La politique d'éducation prioritaire concerne les territoires socialement défavorisés. L'actuelle carte de l'éducation prioritaire a été mise en place à la rentrée 2015 actualisant une cartographie devenue au fil du temps partiellement inadaptée aux réalités sociales. Cette actualisation a permis de mieux cibler, en collaboration avec les autorités académiques, les écoles et établissements des territoires les plus fragiles privilégiant une approche en réseau composé du collège et des écoles de rattachement présentant un profil sociologique similaire. L'enjeu est d'agir concrètement tout au long du parcours des élèves, depuis la toute petite section maternelle jusqu'à la fin de la troisième, et de construire une réponse pédagogique et éducative cohérente, inscrite dans la durée et la continuité des apprentissages. Si les données du collège constitue une base importante pour cibler ces réseaux, le profil sociologique des écoles fait lui aussi l'objet d'étude au travers des données de l'INSEE, de données issues des élèves de sixième du collège par écoles d'origine. Dans ces réseaux ainsi constitués, un travail collectif des équipes éducatives du premier et du second degré se développe autour d'un projet éducatif et pédagogique construit à partir du « référentiel de l'éducation prioritaire » qui permet de répondre en cohérence aux besoins des élèves et aux problématiques professionnelles des enseignants. La politique d'éducation prioritaire ne constitue donc pas la meilleure approche pour les écoles qui accueillent une forte proportion d'élèves issus des catégories sociales défavorisées quand elles se trouvent rattachées à des collèges mixtes socialement qui ne connaissent pas les mêmes difficultés. Il convient dans ces situations d'œuvrer autant qu'il est possible pour le rétablissement d'une certaine mixité sociale, qui doit être un objectif à rechercher prioritairement. Quand bien même elles ne sont pas classées en éducation prioritaire, une attention soutenue est apportée à ces écoles tant il est important de cibler les efforts sur le premier degré là où se construisent les premiers apprentissages. Ainsi, les IA-DASEN ont été invités à prendre en compte les situations sociales de chaque école et/ou établissement pour procéder à une allocation progressive et différenciée des moyens, comme le fait le ministère entre les académies, évitant ainsi des effets de seuil qui ont pu être parfois trop forts entre les REP et des écoles ou collèges qui ont des indicateurs proches mais ne relèvent pas de l'éducation prioritaire. Des conventions de priorités éducatives ont pu être mises en place entre les autorités académiques et départementales de l'éducation nationale et les collectivités locales afin de prendre en compte ces situations et assurer les équipes d'une continuité des moyens à effectif constant. Les orientations pédagogiques préconisées dans le "référentiel de l'éducation prioritaire" peuvent être recommandées et mises en œuvre par les équipes pédagogiques dans toute école ou tout collège où cela semble utile afin de mieux répondre aux besoins des enfants dont l'origine sociale est un facteur défavorable à la réussite scolaire. Il n'est donc pas nécessaire qu'une école qui accueille une forte proportion d'élèves issus de milieux socialement défavorisés soit classée en éducation prioritaire pour recevoir l'attention et les moyens qui répondent à ces besoins. Ainsi dans cette même logique d'allocation progressive des moyens, les académies peuvent décider localement de réduire les effectifs des classes de CP et de CE1 dans des écoles qui ne sont pas labellisées « éducation prioritaire » (dans le cadre du dédoublement des classes de CP et de CE1 échelonné sur les rentrées scolaires 2017 à 2019 en REP+ et en REP). Concernant le cas particulier de l'école Anatole France de Grenoble, il est à noter qu'elle n'est plus en éducation prioritaire depuis 2011 puisque rattachée à un collège qui n'est pas classé en éducation prioritaire. Elle est située dans un quartier classé prioritaire pour la politique de la ville. Les indicateurs à disposition du ministère indiquent que cette école accueille environ 49 % d'élèves issus des catégories sociales défavorisées (à la rentrée 2017), tandis que le collège de rattachement (Aimé Césaire) en accueille 37,4 %. La moyenne nationale se situe autour de 40 %, elle est de 55,6 % en REP et 67,2 % en REP+ au niveau national. L'ensemble de ces éléments nous indique que les structures scolaires de ce quartier ne relève pas de la politique d'éducation prioritaire mais qu'une attention particulière doit être apportée aux écoles. Ce qui est le cas puisque l'école Anatole France, comme l'école Jean Racine et Libération, sorties de l'éducation prioritaire en 2011, continuent de bénéficier des repères appliqués dans le département aux établissements en REP et REP+ soit 27 élèves maximum sur les niveaux maternelles et 25 sur les niveaux élémentaires. En réalité, les moyennes de classe oscillent entre 20 et 25 en élémentaire et entre 21 et 26 en maternelle. Par ailleurs, afin de prendre en charge, dans les meilleures conditions possibles, les difficultés des élèves sur ce secteur, l'école Anatole France accueille un pôle RASED composé d'un maître E, un maître G et un psychologue scolaire. Cette équipe intervient prioritairement sur ces trois écoles. L'école Anatole France bénéficie également pour favoriser la scolarisation des moins de 3 ans, d'un dispositif avec un enseignant spécifiquement dédié qui accueille chaque année une quinzaine d'élèves.
Auteur : Mme Émilie Chalas
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse
Dates :
Question publiée le 17 juillet 2018
Réponse publiée le 4 décembre 2018