15ème législature

Question N° 10756
de M. Stéphane Peu (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > étrangers

Titre > Rétention de mineurs accompagnés

Question publiée au JO le : 17/07/2018 page : 6282
Réponse publiée au JO le : 06/04/2021 page : 3046
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Stéphane Peu alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la situation extrêmement préoccupante que vivent aujourd'hui même plusieurs dizaines d'enfants mineurs étrangers enfermés avec leur famille en rétention administrative ou en zone d'attente. En 2017, la France a battu un triste record avec l'enfermement de 304 mineurs, soit une augmentation de 70 % par rapport à 2016. En 2018, les associations en charge de l'accompagnement des familles évoquent l'enfermement d'au moins 124 enfants. A la date du 8 juillet 2018, 8 enfants, dont un bébé, étaient en rétention. Pourtant, alors que les débats concernant la loi « Pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie » viennent de reprendre à l'Assemblée nationale, le Sénat a fait voter une disposition visant à encadrer, et donc à légitimer, la rétention des mineurs accompagnés, portant le délai maximal d'une telle rétention à cinq jours. Cette mesure est à la fois inutile et dangereuse. Elle est inutile en ce qu'elle ne limitera pas, dans les faits, les délais de rétention des familles puisque les périodes d'enfermement moyennes sont de 48 heures pour l'immense majorité des cas. Cette disposition est également dangereuse parce qu'elle donne de la légitimité, par son inscription dans la loi, à une mesure qui était jusqu'à présent pensée pour être exceptionnelle. La rétention des mineurs, même accompagnés, représente une violation des intérêts supérieurs de l'enfant, la place de ces derniers n'étant pas dans des centres de rétention vétustes et inadaptés. Il est d'ailleurs à rappeler que les enfants concernés sont très jeunes et ont besoin d'un encadrement particulier que ces centres ne proposent pas : en 2017, plus de la moitié des détenus avaient moins de six ans, et un quart entre 6 et 12 ans. Dès lors, il serait inadmissible que la rétention des enfants se généralise, d'autant plus que le droit français fait de l'assignation à résidence la règle et la rétention, l'exception, et que les enfants doivent, plus que tous autres individus, toujours être protégés par la loi. Il est donc urgent de mettre un terme à la rétention des mineurs accompagnés. Il souhaite donc connaître ses ambitions sur ce sujet qui inquiète et indigne à juste titre nombre de citoyens.

Texte de la réponse

La législation française prohibe le placement en rétention des mineurs non-accompagnés. En revanche, elle autorise le placement en rétention de familles et, partant de certains mineurs. De même, le droit de l'Union européenne et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) n'interdisent pas le placement en rétention des mineurs. Dans une recommandation du 7 mars 2017 sur l'efficacité de l'éloignement, la Commission européenne a expressément recommandé aux États membres de ne pas interdire le placement en rétention des familles. Le recours à la rétention des mineurs est strictement encadré par le III bis de l'article L.551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Dans les situations impliquant des mineurs accompagnés, la durée de rétention est réduite au maximum. Ces placements demeurent en outre tout à fait exceptionnels puisque les mineurs représentent 1% à peine de l'ensemble des personnes placées en rétention. Ainsi, le respect du droit national permet de garantir que la rétention reste, s'agissant des mineurs, une mesure exceptionnelle, que sa durée est toujours brève et qu'elle se fait dans des conditions matérielles conformes à l'intérêt supérieur de l'enfant. En rétention, les familles font l'objet d'une attention particulière de la part des chefs de centres et des unités médicales. Dans les conditions ainsi décrites, le placement en rétention de mineurs demeure une voie d'exécution nécessaire de certaines décisions d'éloignement de majeurs accompagnants.