Question orale n°107 : Question sur la formation dans le milieu du bâtiment

15ème Législature

Question de : M. Bruno Millienne (Ile-de-France - Mouvement Démocrate et apparentés)

M. Bruno Millienne interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la formation dans le milieu du bâtiment. L'avènement des nouvelles technologies a un impact qui s'étend sur de multiples domaines, notamment sur la construction et les matériaux utilisés. Nous savons que la matière première qu'est le sable risque de se retrouver rapidement en pénurie si nous ne réagissons pas, et à ce titre, il faut se réjouir de l'éclosion de l'utilisation d'infrastructures vertes, qui change la manière de concevoir le foyer tout en étant moins coûteux. Tous ces aspects, de la conception à la réalisation, sont très techniques et doivent dorénavant être complètement repensés afin de s'adapter aux défis - et avantages - que posent les nouvelles technologies. Afin de permettre la continuité du savoir-faire français dans le bâtiment, ces aspects devraient être maîtrisés par toute personne désireuse de monter une entreprise dans ce domaine, en s'inspirant du modèle de Michel et Augustin qui, tout en lançant leur entreprise de pâtisserie française, sont également titulaires d'un CAP dans ce domaine. Il souhaite donc l'interroger sur l'utilité d'imposer que les personnes désireuses de montrer une entreprise dans le bâtiment soient titulaires d'une formation spécifique pour cela, d'un BEP ou d'un bac pro - le CAP ayant un niveau trop faible à l'heure actuelle.

Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2018

FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LE BÂTIMENT
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Millienne, pour exposer sa question, n°  107, relative à la formation professionnelle dans le bâtiment.

M. Bruno Millienne. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

L'avènement des nouvelles technologies influe sur de multiples domaines, notamment sur la construction et les matériaux utilisés. Nous savons que la matière première qu'est le sable risque de se retrouver rapidement en pénurie si nous ne réagissons pas. À ce titre, il faut se réjouir de l'utilisation croissante de matériaux biosourcés, qui changent la manière de concevoir le foyer, tout en n'étant pas nécessairement plus coûteux.

Tous ces aspects, de la conception à la réalisation, sont très techniques et doivent dorénavant être complètement repensés afin de s'adapter aux défis et aux avantages des nouvelles technologies. Afin de permettre la continuité du savoir-faire français dans le bâtiment, ces aspects devraient être maîtrisés par toute personne désireuse de créer une entreprise dans ce domaine, en s'inspirant du modèle de Michel et Augustin qui, tout en lançant leur entreprise de pâtisserie française, sont également titulaires d'un certificat d'aptitude professionnelle – CAP – dans ce domaine.

Je souhaite donc interroger M. le ministre de l'éducation nationale sur l'utilité d'imposer aux personnes désireuses de créer une entreprise dans le bâtiment d'être titulaires d'une formation spécifique – brevet d'études professionnelles, bac professionnel ou CAP, à condition de relever le niveau de ce dernier –, autrement dit de supprimer la possibilité de créer une entreprise du BTP avec seulement trois ans d'expérience professionnelle.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le député, le Gouvernement ne partage pas totalement les craintes que vous exprimez. J'espère que les éléments que j'apporte vous permettront d'être rassuré sur le niveau de qualification des entrepreneurs du bâtiment.

Comme vous l'avez dit, les entreprises de construction, d'entretien et de réparation des bâtiments sont soumises à une obligation de qualification professionnelle, prévue à l'article 16 de la loi du 5 juillet 1996. À ce titre, leur activité doit être réalisée sous le contrôle effectif et permanent d'une personne qui, soit détient un diplôme de niveau V ou supérieur, ce qui correspond à un diplôme de niveau CAP ou BEP ; soit, comme vous l'avez évoqué, justifie d'une expérience professionnelle de trois ans dans le métier exercé. Vous considérez que cette exigence n'est pas suffisante, et qu'il conviendrait d'augmenter le niveau de qualification requis eu égard aux nouvelles techniques utilisées dans le secteur du bâtiment.

Pour le Gouvernement, cette modification n'est pas nécessairement opportune, pour trois raisons.

La première tient à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui autorise le législateur à apporter des restrictions à la liberté d'entreprendre à la double condition qu'elles soient justifiées par l'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi. Le niveau de qualification professionnelle exigé doit donc être justifié par l'objectif de protection de la santé et de la sécurité des personnes poursuivi par le législateur, et il doit être proportionné aux risques encourus. Le secteur du bâtiment fait l'objet d'un encadrement technique strict et suffisant pour assurer un haut niveau de protection de la santé et la sécurité des personnes. Il n'y a aujourd'hui, à notre connaissance, aucune étude faisant état de risques qui seraient liés à un niveau d'exigence de qualification trop faible.

La deuxième raison est que cette mesure serait préjudiciable aux entreprises. Le secteur du bâtiment est en pleine croissance et créateur d'emplois. En exigeant un diplôme de niveau supérieur, l'exercice de cette activité de manière indépendante serait interdit aux personnes qui ne détiennent qu'un diplôme de niveau V, ce qui nous fait craindre des conséquences pour l'emploi.

La troisième et dernière raison pour laquelle un relèvement du niveau minimal de formation initiale requis ne nous semble pas opportun est qu'il ne garantirait pas que les entreprises du bâtiment s'emparent pleinement des nouvelles technologies et des nouveaux produits de construction. La formation tout au long de la vie et les démarches de certification volontaire comme le label RGE – reconnu garant de l'environnement –, qui reconnaît aux professionnels une compétence particulière en matière d'efficacité énergétique, permettent davantage d'appréhender ces problématiques et technologies nouvelles que le renforcement de la formation initiale, et ce, quel que soit le niveau de qualification initial.

J'espère, monsieur Millienne, que ces éléments vous auront permis de comprendre pourquoi le Gouvernement ne considère pas aujourd'hui votre proposition comme opportune. Le Gouvernement n'en demeure pas moins extrêmement attentif aux conditions dans lesquelles ces métiers, comme tous les autres, sont exercés, ainsi qu'aux qualifications requises.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Millienne.

M. Bruno Millienne. Monsieur le secrétaire d'État, j'entends bien votre réponse, que je comprends parfaitement. Je voulais simplement alerter le Gouvernement sur le fait qu'en raison de l'absence programmée de sable d'ici à 2050, nous utiliserons de plus en plus de matériaux biosourcés dont le travail nécessite une technicité très importante, donc une formation à la hauteur.

Données clés

Auteur : M. Bruno Millienne (Ile-de-France - Mouvement Démocrate et apparentés)

Type de question : Question orale

Rubrique : Bâtiment et travaux publics

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2018

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