Marchés publics
Question de : M. Olivier Falorni (Nouvelle-Aquitaine - Non inscrit)
M. Olivier Falorni attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la négociation en matière de marchés publics. L'article 59 II du décret 2016-360 du 25 mars 2016 autorise l'acheteur à faire régulariser des offres irrégulières en procédure d'appel d'offres ou en procédure adaptée sans négociation, à condition que ces offres ne soient pas anormalement basses. En application de ce même alinéa, les offres inacceptables ou inappropriées ne sont pas régularisables et sont de fait, éliminées. Pour les autres procédures, il est fait application de l'article 59 III du décret 2016-360 du 25 mars 2016 qui autorise, quant à lui, l'acheteur à faire régulariser des offres irrégulières ou inacceptables à l'issue de la négociation ou du dialogue à condition qu'elles ne soient pas anormalement basses. Lorsque la négociation ou le dialogue a pris fin, les offres demeurant irrégulières ou inacceptables sont éliminées sauf si l'acheteur qui dispose à nouveau de la faculté de les régulariser, souhaite autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser leurs offres. Cette possibilité est offerte uniquement dans le cas d'offres qui ne sont pas anormalement basses. Il est précisé à l'article 59 IV que la régularisation ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles des offres. Le texte de l'article 59 III laisse penser que la phase de négociation ou de dialogue permet de régulariser des offres irrégulières ou inacceptables pour les procédures adaptées avec négociation, les procédures formalisées négociées et les procédures de dialogue compétitif. Or, lorsque l'acheteur prévoit dans le règlement de consultation que seules les trois premières offres seront susceptibles de faire l'objet d'une négociation, la possibilité de régulariser les offres irrégulières ne serait alors ouverte qu'aux trois offres arrivées en tête du classement établi à l'issue de l'analyse des offres avant négociation. Dans le cas où une offre est irrégulière en raison de son caractère incomplet notamment sur des éléments techniques, il n'est alors pas possible d'analyser cette offre sans apport des éléments manquants. Elle ne peut donc pas être classée et se retrouve de fait exclue de l'éventuelle régularisation offerte uniquement aux trois premières offres. Cette situation peut créer une inégalité de traitement entre les candidats, notamment en fonction des procédures applicables. En procédure adaptée avec négociation, procédure formalisée négociée ou dialogue compétitif, les candidats ayant remis une offre irrégulière ne bénéficieraient pas des mêmes chances de régularisation que les candidats ayant remis une offre irrégulière en appel d'offres ou procédure adaptée sans négociation. Au sein d'une même procédure, où la négociation a lieu, les candidats dont l'offre est classée parmi les trois premières bénéficient d'une régularisation si nécessaire alors que les autres offres ne sont pas régularisables. Une fois que la négociation a pris fin, d'après le texte de l'article 59 III, il est encore possible pour l'acheteur de demander à ce que tous les soumissionnaires concernés puissent régulariser leurs offres si elles demeurent irrégulières (cette possibilité n'est dès lors plus applicable aux offres inacceptables). Il semblerait donc que ce texte soit soumis à plusieurs interprétations : soit seuls les soumissionnaires dont l'offre a été admise à la négociation disposent de cette possibilité de régularisation de l'offre soit cette possibilité est offerte pour l'ensemble des soumissionnaires ayant remis une offre, que celle-ci ait été ou non admise à la négociation. Dans cette dernière hypothèse, le classement établi par l'acheteur pourrait se trouver modifié et les candidats ayant remis des offres d'abord écartées de la phase de négociation ou de dialogue pourraient prétendre à voir leurs offres régularisées finalement admises à la négociation. En l'occurrence, les acheteurs se demandent si, en procédure adaptée avec négociation, procédure négociée ou procédure de dialogue compétitif et afin de pallier le risque d'inégalité de traitement entre les candidats, ils peuvent demander la régularisation de l'ensemble des offres irrégulières ou inacceptables en amont de toute phase de négociation ou de dialogue. Par ailleurs, il apparaît judicieux d'expliciter ce que sont les caractéristiques substantielles de l'offre évoquées à l'article 59 IV. Pour les acheteurs confrontés à d'éventuelles offres irrégulières, il est en effet difficile d'évaluer le caractère substantiel ou non de la régularisation souhaitée. Dans la perspective du projet du code de la commande publique et de la consultation menée, il paraîtrait opportun de clarifier l'écriture de l'article 59 précité. Aussi, il lui demande de bien vouloir préciser l'interprétation qui doit être donnée aux dispositions de l'article 59 III et IV du décret 2016-360.
Réponse publiée le 13 novembre 2018
Le III de l'article 59 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics précise les modalités selon lesquelles l'acheteur, dans le cadre d'une procédure comportant une phase de négociation telles que la procédure concurrentielle avec négociation ou encore la procédure adaptée avec négociation, peut demander aux soumissionnaires ayant remis une offre irrégulière ou inacceptable de procéder à sa régularisation sous réserve qu'elle ne soit pas anormalement basse. Tout d'abord, la régularisation des offres présentant les caractéristiques d'une offre irrégulière ou inacceptable peut intervenir dans le cadre de la négociation (1er alinéa du III de l'article 59 du décret du 25 mars 2016 précité). Par ailleurs, l'acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié (2ème alinéa du III de l'article 59 du décret du 25 mars 2016 précité). Cette seconde modalité de demande de régularisation, qui concerne toutefois exclusivement les offres irrégulières, peut intervenir à tout moment de la procédure et, par suite, avant le commencement de la phase de négociation. Dans le cadre d'une procédure adaptée où l'acheteur prévoit de limiter, dans le règlement de la consultation, l'accès aux négociations à trois candidats, les possibilités de régularisation diffèrent donc selon que les offres remises par certains soumissionnaires sont irrégulières ou inacceptables. S'agissant des offres irrégulières, l'acheteur sera tenu, afin d'assurer l'égalité de traitement des candidats, soit de rejeter l'ensemble des offres irrégulières soumises, soit d'inviter l'ensemble des soumissionnaires ayant remis de telles offres à les régulariser pour pouvoir procéder ensuite au classement des offres. S'agissant des offres inacceptables, dès lors que leur régularisation ne peut, en principe, être opérée qu'au cours de la négociation, la seule solution juridique pour garantir le principe d'égalité de traitement consistera à écarter l'ensemble des offres recevant cette qualification. Le rejet des offres inacceptables et, le cas échéant, irrégulières s'impose avant que l'acheteur ne détermine les trois meilleures offres admises à négocier, dès lors que pour pouvoir être classée, une offre ne doit pas présenter les caractéristiques d'une offre irrégulière, inacceptable ou inappropriée. Concernant les procédures concurrentielles avec négociation, il ressort de la lecture combinée du I et du II de l'article 73 du décret du 25 mars 2016 précité que l'acheteur doit obligatoirement organiser une première phase de négociation avec l'ensemble des offres remises par les soumissionnaires avant de réduire le nombre de soumissionnaires dont les offres continueront de faire l'objet de phases de négociation. Il s'en infère que les offres irrégulières ou inacceptables peuvent toujours, si l'acheteur le souhaite, être l'objet d'une demande de régularisation. Ainsi, la réduction au nombre de trois des offres à négocier ne pourra valablement intervenir qu'une fois le premier tour des négociations réalisé et, en conséquence, une fois que les soumissionnaires concernés auront été éventuellement mis à même de régulariser leurs offres. Concernant la procédure de dialogue compétitif, le III de l'article 59 n'a pas, a priori, vocation à s'appliquer lors de la phase du dialogue dès lors que ne sont remises, à ce stade, que des solutions de nature à répondre aux besoins de l'acheteur et non des offres fermes engageant les opérateurs économiques. Enfin, il convient de préciser qu'une offre irrégulière ne peut être régularisée qu'à la condition d'être régularisable. La régularisation de l'offre ne peut ainsi en aucun cas avoir pour effet de modifier ses caractéristiques substantielles c'est-à-dire permettre au soumissionnaire de présenter une nouvelle offre ou de changer les termes de celle-ci de telle sorte que son économie générale soit bouleversée. Lorsque les irrégularités constatées sont manifestement trop importantes pour être régularisées sans entraîner une modification significative de l'offre dépassant ainsi ce qui peut être raisonnablement accepté, la régularisation ne saurait être autorisée. A titre d'exemples, pourraient être régularisées l'offre qui présente une simple erreur matérielle, l'offre dont le bordereau des prix unitaires est incomplet ou mal renseigné ou encore l'offre dont l'annexe à l'acte d'engagement n'indique pas, contrairement à ce qui était demandé dans les documents de la consultation, les délai d'exécution du marché alors que ceux-ci figurent dans le planning d'exécution joint au dossier. En revanche, ne pourraient être régularisées l'offre qui ne comprend pas un document important requis dans les pièces de la consultation tel que le mémoire technique. Le caractère régularisable d'une offre doit ainsi faire l'objet d'une appréciation au cas par cas, au regard notamment du principe d'égalité de traitement des candidats.
Auteur : M. Olivier Falorni (Nouvelle-Aquitaine - Non inscrit)
Type de question : Question écrite
Rubrique : Marchés publics
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 17 juillet 2018
Réponse publiée le 13 novembre 2018