politique étrangère de la France
Question de :
M. Jean-Louis Bourlanges
Hauts-de-Seine (12e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 18 juillet 2018
POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE LA FRANCE
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, ma question s'adresse à celui qui veut bien me répondre. (Sourires.)
Chaque jour qui passe apporte la démonstration que le président Trump a choisi de procéder à une remise en cause fondamentale, à ce que, en d'autres temps, John Foster Dulles aurait appelé une « révision déchirante » de la politique des États-Unis telle qu'elle avait été définie, il y a plus de soixante-dix ans, par le président Truman et poursuivie depuis lors avec un plein succès.
Cette politique reposait sur un principe simple : l'affirmation sans relâche de la solidarité humaine, économique et militaire des deux piliers de la démocratie mondiale que sont, de part et d'autre de l'Atlantique, les peuples européens et américains. Les bases de cette solidarité s'appellent l'Alliance atlantique, l’Union européenne et l'organisation régulée des échanges.
Le président Trump a décidé de piétiner cet héritage, d'agresser ses amis et de flatter ses ennemis, d'opposer les peuples européens entre eux au lieu de les unir, de tourner le dos à tous les principes d'organisation multilatérale, de préservation de l'environnement et de défense des droits fondamentaux, qui forment le cœur de notre engagement collectif et le ciment de notre héritage occidental. Nous ne pouvons plus nous voiler la face. Nous devons opposer à ces tentatives absurdes d'autodestruction du meilleur de notre histoire des réponses qui soient à la hauteur des nouveaux défis.
Militairement, pouvons-nous, face au désengagement moral des États-Unis, nous satisfaire d'une initiative de défense, certes bienvenue, mais totalement sous-dimensionnée ? Judiciairement, pouvons-nous nous accommoder plus longtemps de la compétence prétendue universelle des États-Unis en matière de transactions financières ? Commercialement, si nous voyons bien l'intérêt qu'il y a à ne pas entrer dans le jeu de l'escalade protectionniste, ne devons-nous pas voir, comme les Chinois en font la démonstration, que seule la fermeté est respectée ? Il ne s'agit plus de relancer la construction européenne mais d'oser l'indépendance européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des affaires européennes.
Mme Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes. Monsieur le député, la relation transatlantique connaît en effet une période de tension inhabituelle. Il est très inhabituel qu'un président américain qualifie l’Union européenne d'adversaire des États-Unis ; inhabituel et inexact, car ce sont les Européens qui ont volé au secours de l'Amérique après le 11 septembre 2001 en invoquant l'article 5 du traité de l'Atlantique nord. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. Pierre Cordier. Il faudrait le lui dire, dans les réunions internationales, plutôt que de lui taper sur l'épaule !
Mme Nathalie Loiseau, ministre . Il est aussi très inhabituel qu'un président américain s'en prenne à l'Allemagne ou s'immisce dans la politique intérieure du Royaume-Uni ; c'est inhabituel et c'est inamical. Il est encore inhabituel que des mesures commerciales soient prises par Washington sur la base d'un motif de sécurité nationale qui ressemble davantage à un prétexte.
Que devons-nous faire face à cette situation ? Nous devons à la fois garder nos nerfs et garder notre cap. Garder nos nerfs, cela veut dire faire la différence entre des propos d'un style assez particulier et la réalité. La réalité du sommet de l'OTAN, c'est qu'il a abouti à une déclaration signée par tous et que l'Alliance atlantique est plus solide que jamais pour une raison simple : elle bénéficie à chacun de ses membres. Garder nos nerfs, c'est répondre aux mesures commerciales américaines de manière unie et proportionnée, sans tomber dans le piège d'une guerre commerciale qui ne ferait que des perdants.
Garder le cap, c'est maintenir l'accord sur le nucléaire iranien avec nos partenaires européens, mais c'est surtout refonder une Europe puissante, maîtresse de son destin, fidèle à ses alliances mais jalouse de son indépendance. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Auteur : M. Jean-Louis Bourlanges
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 juillet 2018