15ème législature

Question N° 1108
de M. Moetai Brotherson (Gauche démocrate et républicaine - Polynésie Française )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > outre-mer

Titre > avenir de la Nouvelle-Calédonie

Question publiée au JO le : 18/07/2018
Réponse publiée au JO le : 18/07/2018 page : 7565

Texte de la question

Texte de la réponse

AVENIR DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE


M. le président. La parole est à M. Moetai Brotherson, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Moetai Brotherson. Monsieur le Premier ministre, je souhaite tout d'abord saluer votre implication dans le processus qui mène le peuple calédonien au référendum du 4 novembre 2018. Il faut du courage, de la sagesse et de l'humilité pour gérer ce sujet. Il a fallu de la résilience de la part des peuples concernés avant d'y parvenir, mais la paix est le fondement des échanges apaisés et le moteur d'une réussite démocratique, que nous appelons tous de nos vœux.

De la colonisation à Ouvéa, des accords de Nouméa aux accords de Matignon, de la première révision constitutionnelle de 1998 au projet de loi organique adopté le 20 mars 2018 par l'Assemblée nationale, plusieurs étapes ont ponctué l'histoire de la Nouvelle-Calédonie. Cette histoire douloureuse commande que le vivre-ensemble hérité de Yeiwéné Yeiwéné, Jacques Lafleur, Michel Rocard et, bien sûr, Jean-Marie Tjibaou perdure, quelle que soit l'option choisie le 4 novembre prochain.

Pour autant, le chemin ne se terminera pas le 5 novembre. Au contraire, ce sera le commencement d'une refondation institutionnelle et sociétale à laquelle nous devons tous penser dès maintenant. Dès lors, pouvez-vous nous faire un point sur l'état des relations au sein du G10 en Nouvelle-Calédonie ? Pouvez-vous nous éclairer sur l'évolution de la régularisation des listes électorales pour ce référendum ? Enfin, pouvez-vous nous exposer le plan du Gouvernement pour l'après référendum, que le « oui » ou le « non » l'emporte ?

Comment comptez-vous accompagner la transition de la Nouvelle-Calédonie vers l'accession à la personnalité juridique de droit international ou vers les référendums suivants ? Il en va de la politique comme d'un match de football : pour que la partie soit équitable, chaque équipe doit au départ pouvoir compter sur l'impartialité de l'arbitre. Mauruuru, e te aroha ia rahi. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, je vous remercie de vos propos, qui me touchent, mais je dois dire que, sur la question calédonienne, ce qui est le plus impressionnant, c'est le travail effectué par les parties. C'est l'engagement il y a trente ans, autour de Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, d'hommes et de femmes qui, ayant vu le pire, se sont décidés à dialoguer pour construire le meilleur. C'est la ténacité dont ils ont toujours fait preuve, en dépit des difficultés, des incompréhensions, parfois, et des calculs politiques. Ces calculs existent, on ne peut pas se le cacher, mais ils n'ont jamais été assez forts pour faire oublier l'enjeu du processus engagé il y a trente ans à Matignon. C'est donc d'abord et avant tout aux parties qu'il faut rendre hommage.

M. Olivier Faure. À Michel Rocard et à Lionel Jospin, aussi !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, vous m'interrompez, comme si j'oubliais de faire référence à tous ceux qui ont servi cette cause difficile. La question qui m'a été posée se situait sur le plan de l'intérêt général et j'ai toujours dit à cette tribune que l'action du Gouvernement s'inscrivait, de la manière la plus stricte, dans la philosophie, l'esprit, le calendrier et la méthode définis par Michel Rocard en 1988. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe NG.) Alors, ne venez pas nous chercher sur ce point, car ce serait faire preuve de mauvaise foi.

Monsieur le député Brotherson, vous avez raison. La Nouvelle-Calédonie verra le 5 novembre. Le 4 novembre, il y aura une consultation. Il faut qu'elle soit organisée dans de bonnes conditions, et nous y avons veillé. Je veux parler de l'État, car c'est son rôle, mais aussi de l'ensemble des signataires des accords de Matignon. Ce référendum s'organise et nous avons pris, avec le Parlement, l'ensemble des dispositions qui permettront l'organisation la plus fine, la plus respectueuse de la capacité de chacun à prendre part à cette consultation essentielle. Vous savez que nous avons par exemple prévu la possibilité d'un vote à distance et organisé des bureaux de vote pour ceux qui ne pourraient pas retourner chez eux. Tout cela a été pensé et conçu par les signataires et repris par l'Assemblée nationale et le Sénat, dans un souci d'unanimité tout à fait admirable.

Cette consultation aura lieu et le résultat en sera clair. Je ne veux préjuger d'aucun résultat, mais ce que je sais, comme vous, monsieur le député, c'est qu'il y aura un 5 novembre. Le 5 novembre, quel que soit le résultat, les signataires devront se parler, pour construire la suite, pour faire en sorte qu'au-delà de ce moment binaire, où certains diront « oui » et d'autres « non », la Nouvelle-Calédonie puisse construire l'avenir avec un peuple qui souhaite, au fond, vivre, et vivre en paix sur le « Caillou », comme on dit.

Ce sera un exercice délicat, et je ne méconnais en rien les difficultés qui se dressent et qui continueront à se dresser sur le chemin. Le Gouvernement, pour sa part, n'envisage pas son rôle comme celui d'un arbitre. Vous vous souvenez peut-être, monsieur le député, que lors de ma déclaration de politique générale à cette tribune, j'ai indiqué que le Gouvernement n'était pas un arbitre, mais une partie, dans le processus de Matignon. Nous entendrons jouer notre rôle, en accord avec les autres parties du processus de Matignon, pour construire ce lien dans le futur, dans le respect du résultat démocratique du 4 novembre, et avec le souci constant de faire en sorte que la paix demeure et prévale en Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe FI.)