15ème législature

Question N° 1186
de Mme Marie-Noëlle Battistel (Socialistes et apparentés - Isère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Avenir d'EDF et du projet Hercule

Question publiée au JO le : 01/12/2020
Réponse publiée au JO le : 09/12/2020 page : 10936

Texte de la question

Mme Marie-Noëlle Battistel attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur l'avenir d'Électricité de France (EDF). La France doit faire davantage pour prendre pleinement la voie de la transition énergétique tout en préservant sa souveraineté énergétique et industrielle afin de garantir pour les générations futures une société bas carbone. Plus que jamais, EDF a un rôle central dans la politique énergétique et climatique de la France et de l'Europe. Elle doit être soutenue par l'État afin d'être en mesure de poursuivre sa propre transition vers une énergie toujours plus décarbonée. En cette période de crise exceptionnelle, EDF a montré toute sa capacité à encaisser les chocs et à assurer la continuité de la production et de la fourniture d'électricité à l'ensemble des Français, à bas prix. Aussi, elle lui demande de bien vouloir préciser l'état des discussions engagées avec la Commission européenne au sujet du projet « Hercule ». Elle lui demande également de préciser quel est le projet porté par le Gouvernement à la Commission européenne, alors que celui-ci suscite d'importantes inquiétudes chez les salariés d'EDF.

Texte de la réponse

AVENIR D'EDF


Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour exposer sa question, n°  1186, relative à l'avenir d'EDF.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Madame la ministre de la transition écologique, depuis un an, les grandes lignes du projet Hercule sont tracées par l'exécutif dans le but de scinder EDF en plusieurs entités étanches entre elles, notamment pour ouvrir le capital de ses activités dans les énergies renouvelables. Ce projet se construit dans le plus grand secret entre l'Élysée et la Commission européenne, ce qui est à l'origine de très fortes et légitimes interrogations chez les salariés, au sein des territoires et chez toutes celles et ceux qui s'intéressent aux enjeux de l'énergie.

Ces dernières semaines, des rumeurs particulièrement inquiétantes ont été relayées par plusieurs médias, mieux informés que la représentation nationale – vous conviendrez que c'est un comble ! Selon les journaux Libération et Les Échos, le Président de la République aurait décidé seul le démantèlement du grand service public qu'est EDF, alors que le contexte nous impose au contraire de défendre une vision intégrée, qui a fait ses preuves et est la seule à même d'affronter les défis énergétiques et climatiques d'aujourd'hui et de demain. La crise sanitaire nous a rappelé l'importance d'être dotés de services publics forts, comme c'est encore le cas d'EDF.

Sur le fond, de très nombreuses questions se posent. Madame la ministre, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale sur quelle base ont lieu les discussions à Bruxelles, où en sont les discussions sur l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique – ARENH –, quels sont le périmètre et le statut envisagés pour la quasi-régie que vous souhaitez créer pour l'hydroélectricité, ce qu'il en est du multi-usage de l'eau, indissociable de la production d'hydroélectricité, et des concessions de la Société hydro-électrique du Midi – SHEM ?

Les questions sont tout aussi nombreuses sur la forme : qu'en sera-t-il de la gouvernance de ces trois entités, quel est le calendrier, comment avez-vous prévu d'associer les parlementaires, élus locaux et syndicats, quel sera le véhicule législatif employé ?

Madame la ministre, nous attendons des réponses précises. Il est grand temps de faire preuve de transparence sur l'avenir de notre entreprise publique d'énergie et de cesser d'ignorer la représentation nationale.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Comme vous l'avez dit, madame la députée, EDF joue et doit continuer de jouer un rôle essentiel pour notre pays en étant l'un des principaux moteurs de la transition écologique, notamment grâce à un parc de production très faiblement émetteur en gaz à effet de serre. EDF développe massivement les énergies renouvelables tout en poursuivant l'exploitation du parc nucléaire existant et en se préparant à la fermeture des centrales à charbon, comme le prévoit la programmation pluriannuelle de l'énergie – PPE.

La priorité du Gouvernement est de veiller à ce que l'entreprise dispose de capacités suffisantes d'investissement, qui vont d'ailleurs être accrues pour participer pleinement à la transition énergétique dans ses différentes composantes. EDF nous permet déjà de produire une électricité qui est l'une des plus décarbonées d'Europe, et qui le sera totalement d'ici à 2050.

Dans cette perspective et dans le cadre du projet Hercule que vous avez évoqué, le Gouvernement a demandé au président-directeur général d'EDF de lui faire des propositions relatives à l'organisation du groupe, afin de permettre à ce dernier de dégager les ressources nécessaires pour répondre au défi d'investissement massif qui s'annonce. En parallèle, nous sommes également en négociation avec la Commission européenne sur la régulation du nucléaire existant.

Cette négociation a différents objectifs. Il s'agit d'abord de conserver un groupe intégré, donc de restructurer sans déstructurer, et de permettre à l'entreprise de disposer de toutes les capacités d'investissement dont elle a besoin, afin que les salariés puissent exercer leur savoir-faire dans les meilleures conditions. Il s'agit ensuite d'assurer le financement du parc nucléaire existant, en cohérence avec les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie, et de protéger durablement les consommateurs de hausses de prix sur les marchés de l'électricité.

Contrairement à ce qu'on a pu lire dans la presse, les négociations avec la Commission n'ont pas encore abouti et se poursuivent. Soyez assurée, madame la députée, que nous menons les pourparlers avec la Commission avec détermination et avec l'ambition de défendre les intérêts que vous avez évoqués. Je ne doute pas que les parlementaires sauront s'associer au projet qui se dessine.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Madame la secrétaire d'État, vous avez rappelé les enjeux et le rôle d'EDF, que nous connaissons, mais vous n'avez malheureusement pas répondu aux questions que j'ai posées. Nos reproches portent sur le fait que le Parlement n'est pas associé : c'est en vain que députés et sénateurs ont demandé des précisions ; aucune information ne leur a été fournie. La logique voudrait pourtant que le Parlement débatte de l'avenir d'EDF puis que le Gouvernement et le Président de la République défendent sa position à Bruxelles. Ce n'est pas du tout ce qui se dessine : nous devrons statuer très rapidement sur le texte qui nous sera soumis.

Nous n'avons toujours pas de réponses au sujet du statut de quasi-régie prévu pour EDF, qui a des implications très importantes s'agissant de la prise en compte de tous les usages de l'eau.

Je crains que nous ne prenions une décision irréversible qui ne soit pas à la hauteur des enjeux. Notre responsabilité est de sécuriser la gestion des biens communs mais cela ne semble pas être l'objectif recherché.