15ème législature

Question N° 1209
de M. Pierre Cordier (Les Républicains - Ardennes )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Accueil d'un EPR à Chooz dans les Ardennes

Question publiée au JO le : 05/01/2021
Réponse publiée au JO le : 13/01/2021 page : 29

Texte de la question

M. Pierre Cordier appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur l'avenir de la filière nucléaire en France. La nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie pour la période 2019 à 2028 prévoit en effet la fermeture d'un certain nombre de réacteurs, mais envisage aussi d'en construire de nouveaux. L'objectif doit être d'avoir une production d'électricité décarbonée à un coût abordable pour les citoyens comme pour les entreprises. D'ici à 2040, 34 réacteurs d'EDF (le parc de 900 mégawatts) vont également atteindre les soixante années d'exploitation, à condition que l'autorité de sûreté nucléaire autorise l'allongement de leur durée de vie au-delà de quarante puis de cinquante ans. On peut donc s'attendre à une multiplication de fermetures au cours des vingt prochaines années, qui ne seraient que très partiellement compensées par quelques nouveaux réacteurs, certes plus puissants, mais mettant l'équilibre offre-demande sous forte pression. Le Gouvernement envisagerait de subventionner à hauteur de 25,6 milliards d'euros la construction de six nouveaux réacteurs nucléaires par EDF. Le coût total des chantiers s'élèverait à 47,2 milliards d'euros et les travaux s'étaleraient sur 20 ans entre 2024 et 2044. Alors que les Allemands ont rouvert des centrales à charbon et que la consommation d'électricité est croissante en France, il n'est pas sérieux d'attendre 2022 et la mise en service de l'EPR de Flamanville pour prendre des décisions et lancer de nouveaux programmes. Plusieurs sites, à l'instar de Chooz dans la pointe des Ardennes, sont tout à fait adaptés pour accueillir un nouveau réacteur nucléaire. Il souhaite par conséquent savoir si le Gouvernement entend revoir son calendrier et si les sites possibles sont déjà présélectionnés.

Texte de la réponse

IMPLANTATION D'UN EPR À CHOOZ DANS LES ARDENNES


M. le président. La parole est à M. Pierre Cordier, pour exposer sa question, n° 1209, relative à l'implantation d'un EPR – réacteur à eau pressurisée – à Chooz dans les Ardennes.

M. Pierre Cordier. Je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur l'avenir de la centrale nucléaire de Chooz dans le département des Ardennes.

La nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie – PPE – pour la période 2019 à 2028 prévoit la fermeture de certains réacteurs nucléaires mais la construction de nouveaux. Le Gouvernement envisage ainsi de subventionner à hauteur de 25,6 milliards d'euros la construction de six nouveaux réacteurs par EDF. Va-t-il retenir la centrale de Chooz, dans la pointe des Ardennes, pour accueillir un nouveau réacteur nucléaire – rappelons que cela fait plusieurs années que cette hypothèse est évoquée ? Ce site est particulièrement adapté d'un point de vue géographique. En tant que président de la commission locale d'information de la centrale nucléaire, je rencontre régulièrement les membres de la direction, les salariés, les riverains et je ne peux que saluer la bonne communication entre les différents acteurs.

J'ajoute qu'un brevet de technicien supérieur « Maintenance nucléaire » vient d'être créé à Givet, toujours dans les Ardennes, pour compléter le bac professionnel « Techniques d'intervention sur installations nucléaires ». C'est ainsi qu'une véritable filière d'excellence dans le domaine du nucléaire se développe sur le territoire ardennais.

Le département a besoin d'un soutien fort du Gouvernement. Les emplois de la filière nucléaire sont indispensables pour la vallée de la Meuse, qui connaît d'importantes difficultés économiques et sociales. Le taux de pauvreté y est de 19,6 %, le taux de chômage s'élève à 17,4 % dans le nord du département et plus de 10 000 foyers bénéficient du revenu de solidarité active.

C'est pourquoi, madame la ministre chargée du logement, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement concernant l'accueil d'un nouvel EPR à Chooz. Les élus et les habitants de ces territoires espèrent un geste fort de sa part.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement. Atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 suppose qu'à long terme, le mix électrique soit totalement décarboné. Avant 2035, de nouvelles capacités nucléaires ne paraissent pas nécessaires. Au-delà, nous devons nous interroger sur les nouveaux moyens de production d'électricité décarbonée qu'il faudra construire pour équilibrer l'offre et la demande, au fur et à mesure du déclassement du parc existant. Conformément aux orientations de la programmation pluriannuelle de l'énergie pour la période 2019-2028, le Gouvernement a lancé un programme de travail sur le mix électrique postérieur à 2035 ; il s'intéressera notamment à l'opportunité et aux modalités d'un éventuel nouveau programme nucléaire, en lien avec les acteurs de la filière. Ces travaux visent à instruire les enjeux environnementaux, économiques, industriels et concurrentiels du déploiement d'éventuelles nouvelles centrales. Ils intègrent également une étude approfondie de plusieurs scénarios d'évolution du système électrique à l'horizon de 2050, incluant des hypothèses où les énergies renouvelables atteindront des proportions élevées, y compris jusqu'à 100 %. Les conclusions de ces études sont attendues mi-2021.

D'ici à la prise de décision, la filière doit démontrer qu'elle est capable de soutenir la construction de nouveaux réacteurs dans des délais et à des coûts prédéterminés. Cela passe, d'une part, par la mise en service de la centrale Flamanville 3 – qui mettra un terme aux nombreux déboires industriels constatés sur le chantier et à des surcoûts importants – et, d'autre part, par une remise à niveau de la filière nucléaire grâce aux plans d'actions définis par EDF et par la filière elle-même. Les premiers résultats de ces actions ne pourront être constatés et évalués avant plusieurs mois.

Aucune décision de principe n'ayant encore été prise sur l'opportunité de construire de nouveaux réacteurs, je ne peux répondre complètement à votre question : il est trop tôt pour évoquer des sites d'implantation potentiels pour des investissements postérieurs à 2035. Ce choix devra reposer sur une analyse approfondie des conséquences et des caractéristiques locales ; il devra aussi, bien sûr, être effectué en concertation avec les élus locaux et la société civile.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cordier.

M. Pierre Cordier. Vous imaginez ma déception, madame la ministre déléguée, alors que, voilà seulement quelques mois, nous évoquions avec insistance la création de nouveaux EPR en France ! J'ai l'impression que le Gouvernement fait quelque peu marche arrière. Quoi qu'il en soit, le site de Chooz reste candidat à l'accueil d'une telle structure.

Par ailleurs, l'implantation d'éoliennes donne lieu actuellement à un débat dans le département des Ardennes. Vous ne connaissez sans doute pas la vallée de la Meuse, madame la ministre déléguée, et je vous y invite volontiers : située dans le nord des Ardennes, elle est voisine du Jura et des Vosges et n'a rien à voir avec le sud du département. L'implantation d'éoliennes dans ce paysage qui mérite d'être préservé, avec ses collines et ses petites montagnes, suscite une levée de boucliers. En tant que député de la deuxième circonscription des Ardennes, je m'opposerai fermement à l'implantation d'éoliennes dans ce territoire. Nous sommes tous favorables aux énergies alternatives, mais le cadre de vie doit être préservé – d'autant que le département des Ardennes compte déjà de nombreuses éoliennes. Il arrive un moment où il faut dire stop. J'ajoute que l'énergie hydraulique se développe considérablement dans la vallée de la Meuse. Nous devons redoubler de vigilance en la matière ; comptez sur moi, madame la ministre déléguée, pour qu'on ne fasse pas n'importe quoi dans la vallée de la Meuse.