15ème législature

Question N° 1242
de M. Patrice Perrot (La République en Marche - Nièvre )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Glyphosate - études scientifiques

Question publiée au JO le : 26/09/2017 page : 4535
Réponse publiée au JO le : 13/02/2018 page : 1154
Date de changement d'attribution: 03/10/2017

Texte de la question

M. Patrice Perrot appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la procédure européenne de renouvellement de l'autorisation d'utilisation du glyphosate. Lors de la réunion du comité des produits phytopharmaceutiques (PAFF), les 5 et 6 octobre 2017, les 28 États membres auront à se prononcer sur la prolongation de l'autorisation du glyphosate, dont la licence en Europe expire fin 2017. L'autorisation en cours du glyphosate a déjà été prolongée de 18 mois faute de consensus entre les États membres. Les représentants des États se fondent sur des éléments techniques pour étayer leur décision, parmi lesquels les études menées sur ce produit. Or il y a un désaccord entre les études de l'Agence européenne de la sécurité alimentaire (EFSA) et les études de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Le principal point de divergence porte sur le fait que, selon l'OMS, le glyphosate doive être testé en association avec d'autres substances. Cette controverse a été attisée en mars 2017 par la décision de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) de ne pas classer le glyphosate comme produit cancérogène. De même, au sein de l'Agence de protection de l'environnement (EPA) américaine, deux départements de l'agence, celui de recherche et développement (ORD) et celui de l'évaluation des pesticides (OPP) rendent des conclusions divergentes sur le glyphosate. Par ailleurs, une grande partie des études - y compris de l'EFSA - ne sont pas disponibles au public ou aux scientifiques indépendants. Pire, aux États-Unis, des études d'agences d'État ont été discréditées, les scientifiques qui les ont menées ayant été suspectés de rétribution par des firmes. L'organisation, le 11 octobre 2017, par le comité sur l'environnement, la sécurité alimentaire et la santé publique et celui sur l'agriculture du Parlement européen d'une audition publique sur « Les Monsanto Papers et le glyphosate » visent d'ailleurs à évaluer la stratégie étendue de la firme pour faire pression sur des scientifiques. S'il revient aux représentants des États membres de rendre un avis politique sur ce dossier, son acceptation par les citoyens et alors qu'il existe un intérêt croissant pour le rôle de la science en politique, particulièrement aiguë dès qu'il s'agit de santé et d'alimentation, ne pourra être envisageable que si les études qui fondent la décision sont indépendantes et accessibles au public, en transparence. De la même manière, aucun consensus ne pourra se dégager au sein de la Commission européenne en l'absence de tels éléments. Aussi, il lui demande si la France entend, dans le cadre de la discussion qui sera engagée, porter la demande d'une seule étude indépendante, approfondie et partagée quant aux effets directs et indirects de ces produits sur les organismes vivants, l'environnement et l'homme du glyphosate. Il lui demande également si la France entend agir auprès de l'Union européenne pour faire évoluer le modèle des études scientifiques à l'échelle européenne vers un modèle fiable qui éclaire efficacement les choix démocratiques et gagne la confiance des citoyens.

Texte de la réponse

Le glyphosate est un herbicide non sélectif, agissant sur les différentes adventices des espèces cultivées. Il s'agit de l'herbicide le plus utilisé en France et dans le monde, du fait de son efficacité combinée à un faible coût. L'annonce en mars 2015 par le centre international de recherche sur le cancer (CIRC), placé auprès de l'organisation mondiale de la santé, selon laquelle le glyphosate devrait être classé comme cancérigène probable pour l'homme, a ouvert un débat au sein de l'Union européenne (UE) sur l'innocuité de la substance. En juin 2016, la Commission européenne, qui devait statuer sur le renouvellement de l'approbation du glyphosate, a finalement prolongé l'approbation en vigueur jusqu'en décembre 2017 au plus tard, dans l'attente d'un réexamen de la classification harmonisée par l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) et d'une évaluation complémentaire d'un possible caractère perturbateur endocrinien par l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). À l'issue de ces travaux, l'ECHA n'a pas modifié le classement harmonisé actuel du glyphosate. L'EFSA, quant à elle, a conclu à l'absence de caractère perturbateur endocrinien. Une première proposition de la Commission européenne, visant à renouveler l'approbation du glyphosate pour dix ans, n'a pas recueilli un soutien suffisant de la part des États membres. Finalement, la Commission a renouvelé l'approbation pour cinq ans, jusqu'en décembre 2022. La France a considéré que cette durée était trop longue compte tenu de la controverse scientifique. Elle s'est engagée activement dans la transition vers une agriculture moins dépendante aux produits phytopharmaceutiques. Conformément aux annonces faites lors de la clôture des états généraux de l'alimentation, le 21 décembre 2017, une concertation a été lancée en janvier 2018 concernant un projet de feuille de route gouvernementale sur les produits phytopharmaceutiques, en vue de sa finalisation avant la fin du premier trimestre 2018. Parmi les priorités identifiées figurent la diminution rapide de l'utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et l'environnement, le renforcement de la recherche sur les impacts des produits phytopharmaceutiques sur la santé, le renforcement des mesures de protection des populations et la recherche d'alternatives pour les agriculteurs. S'agissant plus spécifiquement du glyphosate, la proposition de feuille de route envisage la conduite d'une étude expérimentale sur la dangerosité de la substance afin d'en porter les résultats au niveau européen, ainsi qu'un renforcement de la recherche-développement pour accélérer la disponibilité en méthodes alternatives et leur appropriation par les agriculteurs. Ces travaux sur les alternatives pourront s'appuyer sur l'état des lieux établi par l'institut national de la recherche agronomique (INRA), qui a rendu en novembre 2017 un rapport intitulé « Usages et alternatives au glyphosate dans l'agriculture française », à la demande des ministres de l'agriculture et de l'alimentation, de la transition écologique et solidaire, de la santé, et de l'enseignement supérieur et de la recherche. En ce qui concerne les usages non agricoles, l'utilisation du glyphosate par les collectivités dans les espaces verts ouverts au public est déjà interdite en France depuis le 1er janvier 2017. De plus, son utilisation par les particuliers sera interdite à partir du 1er janvier 2019. Le Gouvernement souhaite fixer une stratégie de réduction de la dépendance de l'agriculture aux produits phytosanitaires. Les alternatives à ces produits sont un des moyens pour atteindre les objectifs que le Gouvernement s'est fixés, et il n'entend pas laisser les agriculteurs sans solution pour réaliser la transformation des modèles agricoles nécessaire à la protection de l'environnement et de la santé des consommateurs français.