Question orale n° 1263 :
Situation du tourisme en France.

15e Législature

Question de : M. Michel Larive
Ariège (2e circonscription) - La France insoumise

M. Michel Larive attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation du tourisme en France. Comme la culture, l'économie du tourisme est frappée de plein fouet par la crise actuelle. Dans sa circonscription en Ariège, plusieurs restaurateurs ont confié à M. le député qu'ils craignaient notamment de ne jamais pouvoir rembourser leur PGE et de devoir mettre la clé sous la porte. M. le ministre ne pense-t-il pas qu'il conviendrait d'étaler la durée de remboursement de ces prêts au-delà de 5 ans, voire d'en convertir une partie en subventions directes pour éviter la catastrophe qui s'annonce ? Certains lui ont expliqué par ailleurs que les modalités de versement du fonds de solidarité n'étaient pas équitables et pouvaient encourager certains comportements non vertueux. En effet, ce fonds n'est versé qu'aux entreprises qui enregistrent des pertes de chiffre d'affaires supérieures à 50 %. Or de nombreux professionnels maintiennent une activité partielle qui les amène à ne pas atteindre ce seuil. Ne pourrait-on pas envisager que ces aides soient versées au prorata du chiffre d'affaires réalisé, plutôt que selon un seuil de 50 % de pertes enregistrées sur le chiffre d'affaires ? Enfin, en Ariège comme dans de nombreux autres départements, la situation des travailleurs saisonniers qui sont des rouages indispensables de l'économie touristique, est tout autant sinon plus préoccupante encore que celles des TPE-PME du secteur. Le chômage partiel touche l'ensemble des saisonniers des remontées mécaniques. M. le ministre peut-il garantir que le dispositif d'aide qui doit garantir l'emploi dans ce secteur sera prolongé jusqu'à la fin théorique de la saison hivernale, c'est-à-dire début avril 2021 ? Les saisonniers du secteur HCR (hôtellerie, cafés, restauration) sont parmi les plus durement touchés. En Ariège, ils sont habituellement 2 500 à 3 000 répartis sur environ 500 établissements. En 2020, ils ont été 50 à 60 % moins nombreux. Les conséquences sociales de cette situation sont dramatiques. La prime de 900 euros mise en place pour aider cette catégorie de travailleurs précaires est largement insuffisante et bien trop discriminante. En effet, pour pouvoir en bénéficier en 2020, il fallait avoir travaillé au moins 60 % du temps en 2019 ; qu'en sera-t-il en 2021, sachant qu'il était impossible pour un saisonnier d'avoir travaillé 7 mois en 2020 ? M. le député pense qu'il faudrait sérieusement envisager que ces travailleurs puissent bénéficier d'une année blanche, au même titre que les intermittents du spectacle par exemple. Il lui demande s'il est prêt à accorder cette année blanche à tous les saisonniers, et dans le cas contraire, ce qu'il propose d'autre pour leur venir en aide.

Réponse en séance, et publiée le 17 février 2021

SITUATION DU TOURISME
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Larive, pour exposer sa question, n°  1263, relative à la situation du tourisme.

M. Michel Larive. Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, l'économie du tourisme est frappée de plein fouet par la crise que nous traversons. Dans ma circonscription, en Ariège, plusieurs restaurateurs craignent notamment de ne jamais pouvoir rembourser le PGE – prêt garanti par l'État – qu'ils ont contracté et de devoir mettre la clé sous la porte. Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait d'étaler la durée de remboursement de ces prêts au-delà de cinq ans, afin d'éviter la catastrophe qui s'annonce ?

Certains m'ont expliqué que les modalités de versement du fonds de solidarité n'étaient pas équitables. En effet, ce fonds n'est versé qu'aux entreprises qui enregistrent des pertes de chiffre d'affaires supérieures à 50 %. Or de nombreux professionnels maintiennent une activité partielle et la baisse de leur chiffre d'affaires reste en dessous de ce seuil. Ne pourrait-on envisager que ces aides soient versées au prorata du chiffre d'affaires réalisé ?

Enfin, en Ariège comme dans de nombreux autres départements, la situation des travailleurs saisonniers, qui sont des rouages indispensables de l'économie touristique, est tout aussi préoccupante. Le chômage partiel touche l'ensemble des saisonniers des remontées mécaniques. Pouvez-vous nous assurer que le dispositif d'aide qui doit garantir l'emploi dans ce secteur sera prolongé jusqu'à la fin théorique de la saison hivernale, c'est-à-dire début avril 2021 ?

Les saisonniers du secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration sont parmi les plus durement touchés. En Ariège, leur nombre a baissé de 50 % à 60 % en 2020. La prime de 900 euros mise en place pour aider cette catégorie de travailleurs précaires est largement insuffisante et bien trop discriminante. En effet, pour pouvoir en bénéficier en 2020, il fallait avoir travaillé au moins 60 % du temps en 2019 : qu'en sera-t-il en 2021, sachant qu'il était impossible pour un saisonnier de travailler sept mois l'année dernière ? Il faudrait sérieusement envisager que ces travailleurs puissent bénéficier d'une année blanche, au même titre que les intermittents du spectacle, par exemple. Monsieur le ministre délégué, êtes-vous prêt à accorder cette année blanche à tous les saisonniers ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics. Vous avez évoqué trois points dans votre interpellation.

Le premier concerne les prêts garantis par l'État. Il s'agit d'un outil efficace qui a permis à des milliers d'entreprises de bénéficier d'un apport de trésorerie pour passer le cap de la crise. Sur les 300 milliards d'euros que l'État s'est engagé à garantir, plus de 130 milliards, garantis à 90 % par l'État, ont déjà été accordés par les établissements bancaires.

Nous avons mis en place plusieurs dispositifs supplémentaires pour accompagner les entreprises dans la perspective du remboursement de leur prêt. Le premier outil est la prolongation du prêt jusqu'à six ans. Le deuxième, important, vise à donner la possibilité aux entreprises qui le souhaitent de procéder à un différé, voire à un second différé de la première échéance de remboursement. La durée maximale de remboursement des PGE est encadrée par des règles communautaires : le différé de la première échéance réduit la durée d'étalement du remboursement. Avec Bruno Le Maire, nous travaillons à la recherche d'assouplissements de la durée totale du remboursement des PGE.

Nous avons accompagné cette mesure de deux dispositions importantes pour rassurer les chefs d'entreprise qui nous écoutent. La première concerne les PME : le secteur bancaire s'est engagé à plafonner et à encadrer les taux d'intérêt applicables aux PGE entre 1 % et 2,5 %. La seconde disposition est un engagement de la Banque de France consistant à ne pas considérer le différé de remboursement de la première échéance comme une défaillance et de ne pas dégrader la cotation des entreprises en conséquence.

Nous devrons étudier les moyens d'accompagner certaines entreprises de manière spécifique et développer, non pas en remplacement mais en complément des dispositifs déjà déployés, les prêts participatifs, prévus par le plan de relance et considérés comme des fonds propres.

Le deuxième point évoqué dans votre question est le fonds de solidarité. Nous avons effectivement retenu un seuil, 50 % de pertes de chiffre d'affaires, qui correspond à un double choix. Tout d'abord, un tel choix se traduit inévitablement par les effets de seuil que vous avez mentionnés. Nous n'avons pas trouvé de méthode qui permette, sauf au prix d'une grande complexité, de traiter les centaines de milliers de demandes enregistrées chaque mois pour le fonds de solidarité autrement que par des seuils, lesquels s'appliquent moyennant quelques dérogations, notamment dans le secteur viticole – mais je sais que vous les avez en tête. Le second choix a consisté à ne pas défalquer du fonds de solidarité le produit de la vente à emporter – le fameux click and collect, en mauvais français –, considérant qu'il y avait là la possibilité d'un maintien d'activité pour des entreprises fermées par décision administrative et d'un maintien d'une forme d'espoir pour des commerçants qui souhaitent garder le contact avec leur clientèle.

Sur le troisième point, les travailleurs saisonniers, nous avons pris plusieurs dispositions. Je ne puis répondre favorablement à votre demande spécifique, s'agissant d'une année blanche calquée sur celle des intermittents, pour une raison particulière : si nous parlons de saisonniers – et parfois d'« extras » –, c'est précisément parce que ces catégories de population ont été sorties du régime de l'intermittence par la réforme de 2014.

Un dispositif de garantie de revenus, à hauteur de 900 euros, a été décidé. Les aides ont été versées le 5 février, avec effet rétroactif. Élisabeth Borne a annoncé hier la reconduction pour trois mois, au-delà du terme prévu, de cette aide spécifique aux saisonniers, avec bien évidemment l'espoir de voir le bout du tunnel de cette épidémie, afin que les saisonniers puissent retrouver leur activité et en vivre, comme ils le faisaient précédemment.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Larive.

M. Michel Larive. Je vous remercie, monsieur le ministre délégué, pour toutes vos réponses. Les gestionnaires de stations de ski ont d'abord constaté l'aberration du protocole qui leur a été proposé : on pouvait louer des skis, mais pas faire de ski puisque les remontées mécaniques étaient fermées ; on leur avait expliqué à Noël que les hébergements pouvaient créer des clusters, mais le secrétaire d'État au tourisme dit à tout le monde de partir en vacances ; les hébergements sont ouverts, les remontées sont toujours fermées et les commerçants toujours ouverts. Après le constat de ces aberrations, je vous annonce qu'il y a maintenant une grande colère des gestionnaires des stations de ski.

Données clés

Auteur : M. Michel Larive

Type de question : Question orale

Rubrique : Tourisme et loisirs

Ministère interrogé : Économie, finances et relance

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 février 2021

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