15ème législature

Question N° 1291
de Mme Paula Forteza (Non inscrit - Français établis hors de France )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Tourisme, Français de l'étranger et francophonie
Ministère attributaire > Tourisme, Français de l'étranger et francophonie

Rubrique > Français de l'étranger

Titre > Covid-19 - Situation sanitaire et économique des Français de l'étranger

Question publiée au JO le : 09/02/2021
Réponse publiée au JO le : 17/02/2021 page : 1655

Texte de la question

Mme Paula Forteza interroge M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, sur la situation des Français de l'étranger, et plus particulièrement des Français vivant en Amérique Latine et dans les Caraïbes, dans le contexte sanitaire que l'on connaît. Que ce soit d'un point de vue économique ou sanitaire, les Français de l'étranger traversent de grandes difficultés aujourd'hui. Mais cette crise a aussi amplifié des dysfonctionnements préexistants. Mme la députée aimerait entendre M. le ministre sur quatre points : les aides d'urgence mises en place pour les Français de l'étranger , les situations particulières liées au versement des pensions , le taux de remboursement des soins et la stratégie vaccinale adoptée. En avril 2020, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a mis en place un secours occasionnel exceptionnel pour faire face à la situation des Français qui ont connu une perte ou une diminution conséquente de revenus du fait de la crise sanitaire. Mme la députée se félicite ce dispositif d'urgence dont ont pu bénéficier nombre de Français de l'étranger et qui sera reconduit en 2021. D'autre part, les familles ont pu bénéficier d'une mobilisation renforcée des dispositifs de bourses scolaires à hauteur de 50 millions d'euros. Les bourses scolaires ont très largement aidé les familles en difficulté, et permettent de maintenir la scolarisation de leurs enfants dans le réseau AEFE. Les campagnes pour les pays de la zone sud ont été lancées depuis le début du mois de janvier 2021 dans les consulats. Il est important de souligner ici que la politique d'aide scolaire également attribuée aux familles non-françaises scolarisant leurs enfants dans les établissements AEFE a été unanimement saluée. Ce dispositif sera-t-il pérennisé pour l'année 2021 ? Les retards de paiement des pensions sont devenus presque systématiques et les bénéficiaires font face à plusieurs complications. D'une part, la délivrance des certificats de vie en période épidémique est relativement difficile, si ce n'est impossible, dans certaines régions. Le consulat de Mexico avait mis, par exemple, en place une excellente solution de délivrance de ces certificats à distance, sans besoin de se déplacer et limitant ainsi les risques de contamination. Les compagnies d'assurance retraite suspectant les risques de fraudes, le dispositif a été depuis abandonné. D'autre part, les démarches pour obtenir le versement des pensions sont trop longues et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) est très difficilement joignable. Enfin, les frais de virement bancaires sont élevés dans certains pays, et les bénéficiaires de petites pensions voient celles-ci lourdement grevées (60 euros pour des frais de virement, pour une pension de 250 euros, exemple de cas au Nicaragua). Quelles solutions peut-on proposer aux retraités afin de leur faciliter l'accès aux certificats de vie et ainsi leur permettre d'obtenir leurs versements sans encombre ? Que M. le ministre d'actions visant à réduire les frais bancaires liés au versement des pensions lorsque les montants sont faibles ? Sur le volet sanitaire, concernant les taux de remboursement, l'arrêté pris par le ministre de la santé en date du 25 juin 2019, en application de l'article 4 de la loi du 24 décembre 2018 relative à la réforme de la Caisse des Français de l'étranger, fixe différents taux de remboursement selon quatre zones géographiques. À cotisation égale, un même médicament est susceptible d'être remboursé à 65 % en Argentine, contre 20 % en Uruguay. Un tel écart s'avère préjudiciable pour les plus précaires, particulièrement durant la séquence actuelle. Peut-il ainsi clarifier la position du ministère et indiquer sur quels éléments repose la différence de remboursement d'un pays par rapport à un autre ? Enfin, elle souhaiterait aborder la question cruciale des vaccins. Les citoyens sont inquiets vis-à-vis de la mise en œuvre de la couverture vaccinale de la covid-19 à l'égard des Français de l'étranger. Beaucoup de Français présentant des comorbidités seraient en théorie prioritaires pour obtenir une vaccination. Cependant, les couvertures vaccinales sont très disparates d'un pays à un autre. De plus, plusieurs pays d'Amérique latine tels que l'Argentine ou le Venezuela ont homologué des vaccins non acceptés par l'Union européenne, tel que le vaccin russe Spoutnik 5. Elle lui demande s'il peut clarifier la stratégie vaccinale du Gouvernement à l'égard des Français résidant à l'étranger, en particulier pour les cas de ceux résidant dans des pays où des vaccins non homologués par l'UE ont été choisis.

Texte de la réponse

SITUATION SANITAIRE ET ÉCONOMIQUE DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER


Mme la présidente. La parole est à Mme Paula Forteza, pour exposer sa question, n°  1291, relative à la situation sanitaire et économique des Français de l'étranger.

Mme Paula Forteza. Ma question porte sur la situation, dans le contexte pandémique, des Français vivant à l'étranger, plus particulièrement en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Tout d'abord, les citoyens français résidant à l'étranger doivent justifier d'un motif impérieux pour accéder au territoire national et font part de leur désarroi à ce propos. Selon plusieurs conseillers consulaires, qui ont saisi le Conseil d'État, cette décision soulève des interrogations sur le plan juridique et constitutionnel. Est-il envisagé d'assouplir les mesures de restriction pour nos compatriotes afin qu'ils puissent retrouver leur famille dans des conditions allégées ? Nous pourrions prévoir à cet égard un dispositif sanitaire renforcé : obligation de présenter un test négatif au départ et à l'arrivée sur le sol français ; prise en charge médicale et isolement en cas de test positif à l'arrivée. Par ailleurs, le rapprochement de conjoint pourrait-il devenir un motif impérieux pour les couples binationaux ?

Je tiens ensuite à vous alerter sur le versement des pensions : les retards sont devenus presque systématiques et les bénéficiaires font face à plusieurs complications. D'une part, la délivrance des certificats de vie en période épidémique est relativement difficile, voire impossible dans certaines régions. Le consulat général de France à Mexico avait trouvé une excellente solution pour les délivrer à distance, mais le dispositif a été abandonné depuis lors, les compagnies d'assurance retraite suspectant des risques de fraude. D'autre part, les démarches pour obtenir le versement des pensions sont trop longues, et la Caisse nationale d'assurance vieillesse – CNAV – est très difficilement joignable. Quelles solutions pouvons-nous proposer pour faciliter l'accès des retraités au certificat de vie et améliorer la réactivité de la CNAV ?

En outre, depuis la réforme introduite le 25 juin 2019 par le ministère des solidarités et de la santé, le taux de remboursement d'un même médicament par la Caisse des Français de l'étranger est susceptible de varier, à cotisation égale, de 65 % en Argentine à 20 % en Uruguay. Un tel écart se révèle préjudiciable pour les plus précaires de nos compatriotes, particulièrement dans la période actuelle. Pouvez-vous m'indiquer sur quels éléments repose la différence de remboursement d'un pays à l'autre ?

Enfin, je souhaite aborder la question cruciale des vaccins. Nos compatriotes sont inquiets au sujet de la mise en œuvre de la stratégie vaccinale contre la covid-19. Beaucoup de nos concitoyens présentant des comorbidités seraient en théorie prioritaires pour obtenir une vaccination. Cependant, les stratégies vaccinales sont très disparates d'un pays à l'autre. De plus, certains pays d'Amérique latine, notamment l'Argentine et le Venezuela, ont homologué des vaccins non acceptés par l'Union européenne, par exemple le vaccin russe Spoutnik V. Pouvez-vous clarifier la stratégie vaccinale du Gouvernement à l'égard de nos compatriotes résidant à l'étranger, en particulier ceux qui vivent dans des pays où des vaccins non homologués par l'Union européenne ont été choisis ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées. Vous avez mentionné de nombreux points dans votre question, qui nous donne l'occasion de rappeler – je vous en remercie – tout ce que la France a fait pour ses communautés à l'étranger depuis le début de la pandémie.

Tout d'abord, le Gouvernement a engagé plus de 220 millions d'euros en faveur des Français établis hors de France : des aides sociales ont été versées aux Français dans le besoin ; des subventions ont été accordées aux associations d'aide aux Français de l'étranger ; des sommes importantes ont été attribuées au réseau scolaire de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Grâce à ces aides, des milliers de Français ont pu bénéficier d'un appui médical dans des pays où les systèmes de santé sont parfois moins résilients. Nous avons déployé de la télémédecine, acheminé des matériels et des médicaments indisponibles sur place et procédé à des évacuations sanitaires dans les cas les plus graves. La solidarité nationale s'exprime au-delà de nos frontières ; c'est la force du modèle français, dont la pandémie n'a fait que confirmer la pertinence.

En ce qui concerne votre dernier point, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères prête une grande attention à la vaccination de nos compatriotes à l'étranger, et nous nous y préparons en lien étroit avec le ministère des solidarités et de la santé. Notre réseau diplomatique et consulaire a déjà été mobilisé pour nous éclairer sur la situation pays par pays et envisager toutes les solutions possibles. Ce travail est réalisé en concertation avec les conseillers consulaires au niveau local, et Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, a déjà organisé deux réunions de concertation avec les élus des Français de l'étranger.

Nous abordons la situation avec humilité mais détermination. La préparation que nous envisageons devra s'adapter à la propagation du virus et de ses variants, aux possibilités offertes par les différents vaccins au fur et à mesure de leur disponibilité et, enfin, aux situations locales. À ce stade, compte tenu des connaissances qui sont les nôtres, nous articulons notre préparation autour des principes suivants : suivre, bien entendu, la stratégie vaccinale française, avec l'ordre de priorité qui a été défini, sans ignorer les difficultés que pourraient poser des divergences avec les stratégies locales ; appliquer autant que possible la subsidiarité.

Partout où un vaccin reconnu par l'Agence européenne des médicaments sera accessible, il faudra privilégier la vaccination locale. Pour des raisons de responsabilité, notre ligne devra être de ne recommander à nos compatriotes que les vaccins autorisés en France là où divers vaccins sont disponibles. Si les vaccins disponibles ne sont pas homologués, on pourra étudier deux options : soit une vaccination en France à l'occasion de déplacements quand ceux-ci seront de nouveau possibles ; soit, en dernier recours, l'envoi de vaccins, avec les difficultés que cela présente sur le plan logistique. Tout notre réseau diplomatique et consulaire continuera d'être mobilisé pour définir les solutions envisageables pays par pays.

Il est acquis que les étrangers qui résident en France pourront se faire vacciner, comme l'ensemble de la population, et au même rythme. La solidarité nationale s'applique à tous nos compatriotes, y compris, bien sûr, aux Français de l'étranger.<