Protection de la filière française des insectes comestibles
Question de :
M. Jean-Luc Lagleize
Haute-Garonne (2e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
M. Jean-Luc Lagleize attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation critique de la filière française des insectes comestibles. En effet, suite au règlement (UE) 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relatif aux nouveaux aliments, modifiant le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant le règlement (CE) n° 258/97 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 1852/2001 de la Commission, entré en application le 1er janvier 2018 et à trois dossiers déposés dans ce sens, l'Union européenne œuvre activement à l'étude de la mise sur le marché des grillons et des vers de farine. Actuellement, la littérature scientifique à travers le monde ne met en avant aucun danger réel ou avéré quant à la consommation des grillons et des vers de farine d'élevage. L’Union européenne a par ailleurs déjà obtenu plusieurs rapports rassurants sur ce sujet de la part de l'Autorité européenne de sécurité des aliments, de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (France) et de l'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (Belgique). Le délai de réponse de l'Union européenne aux demandes de mise sur le marché s'étend de 18 à 24 mois. Conformément à l'article 35 du règlement précité, certains États membres ont décidé d'appliquer une période transitoire de deux ans, permettant aux acteurs de leur filière nationale de poursuivre sereinement leur développement en attendant leur autorisation de mise sur le marché. La France n'ayant pas mis en place cette période de transition à ce stade, l'ensemble des acteurs français de la filière se trouvent dans une situation critique et dans l'incapacité de se mettre en conformité immédiate, les contraignant parfois à déposer le bilan et à licencier leurs personnels. Une solution qui permettrait à la filière française d'exister et de se positionner sur le marché européen et international serait ainsi d'obtenir une période transitoire de 24 mois comme c'est le cas dans d'autres pays européens. Il attire donc son attention sur la situation critique de la filière française des insectes comestibles et lui demande d'envisager toutes les solutions possibles dans les meilleurs délais afin que celle-ci puisse faire face à la concurrence européenne.
Réponse publiée le 4 décembre 2018
La commercialisation d'insectes destinés à l'alimentation humaine entre dans le champ du règlement (UE) n° 2283/2015 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relatif aux nouveaux aliments, abrogeant et remplaçant le règlement (CE) n° 258/97. Il soumet tout nouvel aliment à une autorisation communautaire avant sa mise sur le marché. En application de l'article 35-2 du règlement (UE) n° 2283/2015, un produit peut être éligible à la mise en place d'une période transitoire en attendant de disposer d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). Il doit pour cela réunir plusieurs conditions cumulatives dont la première est de n'être pas entré dans le champ du règlement (CE) n° 258/97. De plus, il doit non seulement avoir été mis sur le marché légalement avant le 1er janvier 2018 mais également entrer dans le champ d'application du règlement (UE) n° 2015/2283. Or, les insectes destinés à la consommation humaine, tels que les grillons et vers de farine, relevaient d'ores et déjà du champ d'application du règlement n° 258/97. Ils étaient à ce titre déjà considérés comme des nouveaux aliments et ne pouvaient être mis sur le marché en l'absence d'une autorisation communautaire. Dès lors, ces produits, qui sont maintenus dans le champ d'application du règlement (UE) n° 2015/2283, ne sont pas éligibles à ladite période transitoire. Par conséquent, leur commercialisation reste interdite jusqu'à délivrance d'une AMM. Par ailleurs, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, dans son avis de 2015 relatif aux risques sanitaires en lien avec la consommation d'insectes, concluait que « les insectes vivants et transformés peuvent être considérés comme des réservoirs et/ou des vecteurs potentiels d'agents biologiques (et de leurs toxines), chimiques et physiques susceptibles d'affecter la santé de l'homme et de l'animal lors d'une consommation directe ou indirecte via l'alimentation des animaux de rente ». L'autorité européenne de sécurité des aliments, dans son avis de 2015, concluait à un manque de données et à des incertitudes relatives au danger potentiel des insectes utilisés à des fins de consommation humaine. Enfin, l'agence fédérale belge pour la sécurité de la chaîne alimentaire concluait, dans son avis de 2014, que les informations disponibles sur la sécurité des insectes étaient peu détaillées et/ou basées sur l'extrapolation de données sur la consommation d'autres denrées alimentaires. En somme, aucune des trois évaluations scientifiques ne conclut à l'absence de risque sanitaire lié à la consommation d'insectes. L'état de l'évaluation scientifique justifie de ce point de vue le contexte réglementaire évoqué ci-dessus.
Auteur : M. Jean-Luc Lagleize
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agroalimentaire
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 9 octobre 2018
Réponse publiée le 4 décembre 2018