Composition des bureaux de vote pour les élections départementales et régionales
Question de :
M. Jérôme Nury
Orne (3e circonscription) - Les Républicains
M. Jérôme Nury attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'organisation des élections départementales et régionales qui devraient se tenir au mois de juin 2021. Ces élections organisées de manière concomitante supposent qu'un bureau de vote composé d'assesseurs différents soit affecté à chacun des scrutins : un pour le scrutin départemental et un pour le scrutin régional. Dans de nombreuses communes nouvelles, les bureaux de vote des communes déléguées ont souvent été conservés. Or, depuis les élections municipales de 2020, le nombre des conseillers municipaux a particulièrement diminué afin de se conformer aux dispositions de l'article L. 2121-2 du CGCT. Cette multiplication du nombre d'assesseurs risque de poser problème. En effet, dès lors que tous les assesseurs ne peuvent être désignés parmi les conseillers municipaux, le code électoral prévoit que ce rôle est dévolu aux électeurs de la commune. Or le risque est grand que ces électeurs soient peu mobilisés pour prendre part à la tenue des bureaux de vote au regard du contexte sanitaire et de la transmissibilité du virus. Ainsi, il lui demande, au regard de crise sanitaire et de la situation exceptionnelle, s'il ne pourrait pas être envisagé pour les communes et notamment les communes nouvelles qui le souhaiteraient d'avoir des assesseurs communs aux deux scrutins.
Réponse en séance, et publiée le 3 mars 2021
ÉLECTIONS DÉPARTEMENTALES ET RÉGIONALES
M. le président. La parole est à M. Jérôme Nury, pour exposer sa question, n° 1314, relative aux élections départementales et régionales.
M. Jérôme Nury. Les élections départementales et régionales, initialement prévues en mars, devraient en principe se tenir en juin si la situation sanitaire le permet. Elles seront organisées de manière simultanée, ce qui suppose qu'un bureau de vote composé d'assesseurs différents soit affecté à chacun des scrutins en un même lieu. Le nombre d'assesseurs mobilisés le jour du scrutin sera donc beaucoup plus important que d'habitude, ce qui ne manque pas d'inquiéter les maires chargés d'organiser ce temps démocratique.
M. Jérôme Nury. Pour répondre à cette difficulté, un décret du 4 février a modifié l'article R. 42 du code électoral, en permettant à une même personne d'exercer les fonctions de président des deux bureaux de vote ; le principe est le même pour les fonctions de secrétaire. C'est évidemment une avancée, mais elle paraît insuffisante pour de nombreux élus : il faudrait plutôt que l'ensemble des membres du bureau soient communs aux deux scrutins. Or cette possibilité n'est admise que dans les communes équipées de machines à voter, ce qui en exclut un très grand nombre, notamment en milieu rural.
M. Jérôme Nury. Si de nombreux maires demandent un aménagement exceptionnel pour le scrutin de juin, c'est qu'ils craignent de manquer d'assesseurs, notamment dans les communes nouvelles, fruits de récentes fusions. Ces dernières ont connu un grand succès puisqu'elles ont concerné plus de 2 500 communes, formant plus de 800 nouvelles entités. Dans la plupart de ces communes nouvelles – notamment dans l'Orne, où nous avons été précurseurs –, le choix a été fait de conserver les communes déléguées et, de facto, le nombre des bureaux de vote associés. Dans les communes nouvelles toutefois, depuis les élections municipales de 2020, le nombre de conseillers municipaux a considérablement diminué, afin de se conformer au code général des collectivités territoriales. Or ce sont ces élus qui remplissent le rôle d'assesseurs dans les bureaux de vote. Comment résoudre cette équation impossible entre la diminution du nombre d'élus et la multiplication des bureaux de vote, impliquant un doublement du nombre d'assesseurs nécessaires ?
M. Jérôme Nury. Dans l'hypothèse où les conseillers municipaux ne seraient pas assez nombreux, le code électoral prévoit de désigner des assesseurs parmi les électeurs de la commune. La situation sanitaire – même si elle sera probablement moins critique en juin qu'aujourd'hui – risque néanmoins d'inquiéter encore de nombreux citoyens, qui ne répondront donc pas volontiers à l'appel des maires pour être assesseurs.
M. Jérôme Nury. Au vu de ces circonstances exceptionnelles, tenant autant au contexte pandémique qu'à l'organisation simultanée de deux élections locales, ne serait-il pas possible d'aller plus loin que le décret du 4 février, notamment pour les communes nouvelles ? Il faut faciliter le travail d'organisation des maires, soit en leur permettant de faire appel à des assesseurs communs aux deux scrutins, soit en acceptant, en concertation avec les préfets – et seulement pour cette consultation, de manière exceptionnelle – de regrouper les lieux de vote d'une même commune en quelques endroits, sans pour autant réduire le nombre de communes déléguées.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Je tiens tout d'abord à confirmer que les élections départementales et régionales seront bien organisées les 13 et 20 juin, comme je m'y suis engagée devant le Parlement, au nom du Gouvernement. Par ailleurs, le Gouvernement est conscient de l'effort demandé aux communes pour organiser ce double scrutin particulier. C'est pourquoi, dès le mois de septembre, le ministre de l'intérieur a demandé à l'ensemble des préfets de consulter les maires de leur département, en lien avec l'AMF – Association des maires de France – et l'AMRF – Association des maires ruraux de France.
À la suite de ces consultations, le Gouvernement a proposé plusieurs assouplissements de la règle du strict dédoublement des bureaux de vote : d'une part, les salles de vote pourront accueillir les bureaux de vote des deux scrutins, et les isoloirs pourront être mutualisés à condition d'être aménagés pour que le parcours des électeurs se déroule dans de bonnes conditions sanitaires ; d'autre part, le Gouvernement a pris un décret, le 4 février, prévoyant qu'en cas de scrutins simultanés, une même personne puisse exercer les fonctions de président des deux bureaux de vote, lorsque les opérations électorales se déroulent dans la même salle. La même dérogation a été prévue pour les fonctions de secrétaire. Ainsi, deux bureaux de vote mutualisés pourront compter un minimum de six membres : un président et un secrétaire communs, ainsi que deux groupes de deux assesseurs. En revanche, le Gouvernement et le Conseil d'État ont considéré que ce nombre – six membres pour un double bureau de vote – constituait un plancher. En effet, si l'un des deux membres doit s'absenter, il est impératif qu'au moins deux personnes continuent de surveiller l'urne et la liste d'émargement, pour garantir la sincérité du scrutin. Il ne nous semble donc pas envisageable de mutualiser les assesseurs.
Pour toutes ces raisons, il n'est pas envisagé de mutualiser les fonctions d'assesseur ; en revanche, la mutualisation de la fonction de président du bureau, prévue par le décret du 4 février, allégera la charge des conseillers municipaux dans l'organisation de ce double scrutin.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Nury.
M. Jérôme Nury. Il est bon qu'un décret allège la procédure, mais cela reste insuffisant. L'Orne a été précurseur dans la création de communes nouvelles : quelque trente entités y ont vu le jour, issues de la fusion de 140 communes. Certains regroupements portent sur deux ou trois communes, d'autres sur huit ou neuf ; l'un, celui de Gouffern en Auge, est même issu de la fusion de quatorze communes rurales. Mettez-vous à la place du maire de Gouffern en Auge et des délégués qui l'entourent : pour les 13 et 20 juin prochains, ils doivent trouver plus de quatre-vingts personnes devant composer les bureaux de vote, alors que le conseil municipal compte seulement cinquante-trois membres. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : pourriez-vous étudier la possibilité de porter plus loin les dérogations ? En milieu rural et dans les communes nouvelles, nous en avons besoin.
Auteur : M. Jérôme Nury
Type de question : Question orale
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 février 2021