15ème législature

Question N° 13286
de Mme Béatrice Descamps (UDI, Agir et Indépendants - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Enfance et familles

Rubrique > famille

Titre > Aliénation et exclusion parentales

Question publiée au JO le : 16/10/2018 page : 9221
Réponse publiée au JO le : 26/04/2022 page : 2753
Date de changement d'attribution: 04/08/2020

Texte de la question

Mme Béatrice Descamps attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'aliénation parentale et ses conséquences. Le nombre de séparations parentales dites conflictuelles connaît un accroissement inquiétant (+10 %). L'aliénation parentale, c'est-à-dire le comportement mû par la volonté d'exclure l'autre parent de l'environnement éducatif et affectif de l'enfant qui consiste à ne pas présenter l'enfant à l'autre parent en temps et en heure (200 000 cas recensés par an, concernant donc 12 % des divorces) ou à conditionner progressivement l'enfant au rejet de l'un de ses parents, est de plus en plus observée. Si elle se justifie bien évidemment dans les cas de violences ou de suspicion de violences physiques, psychologiques, affectives ou de négligence sur l'enfant ou sur le parent aliénant, elle devient elle-même une forme de violence lorsque les deux parents sont responsables, conscients, bienveillants, protecteurs et de bonne volonté. Les effets de l'aliénation parentale, et de sa conséquence la plus grave, à savoir l'exclusion parentale, sont à la fois affectifs, psychologiques, parfois physiques, vont à l'encontre du devoir d'éducation des parents et de leurs obligations légales et ils ne doivent en tout cas pas être pris à la légère. Les enfants, qui ne sont en rien responsables de la séparation de leurs parents, ont le droit de conserver un contact avec leurs ascendants. Nos voisins européens ont mis en place un certain nombre de dispositifs importants, dont nous pourrions nous inspirer. Elle souhaite connaître sa position sur cette question importante.

Texte de la réponse

Le secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles, rappelle que le « syndrome d'aliénation parentale » ne fait pas l'objet de consensus médical. Ainsi, l'Organisation mondiale de la santé ne l'a pas retenu dans la Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM-11). Dès juillet 2018, le ministère de la Justice a mis en ligne une note d'information sur le site intranet de la direction des affaires civiles et du sceau pour « informer les magistrats du caractère controversé et non reconnu du syndrome d'aliénation parentale, les inciter à regarder avec prudence ce moyen lorsqu'il est soulevé en défense et leur rappeler que d'autres outils sont à leur disposition en matière civile ». Dans son avis du 27 octobre 2021, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (la CIIVISE) « appelle l'ensemble des professionnels à proscrire le recours au pseudo syndrome d'aliénation parentale, tout particulièrement dans le processus de décision judiciaire ». Cet avis précise que l'utilisation du SAP « contribue à l'invisibilisation des violences sexuelles faites aux enfants, de même qu'il rend impossible d'être un parent protecteur, puisque la mère tentant de protéger son enfant victime d'inceste se trouve accusée de le manipuler ». Ainsi, le ministère appelle les acteurs de la protection de l'enfance et des services aux familles à ne pas utiliser cette notion controversée. Cela n'empêche néanmoins pas les pouvoirs publics d'agir pour la protection des enfants dans les situations de séparations. En effet, les conflits parentaux graves peuvent être sources de souffrance psychologique pour les enfants et les adolescents et sont des facteurs de risque pour leur santé dans les cas où ils sont instrumentalisés. Afin d'apaiser les conflits entre parents en instance de séparation ou séparés, la branche famille de la sécurité sociale a soutenu financièrement près de 270 services de médiation familiale en 2017, ainsi que des espaces de rencontre, qui sont des structures chargées d'organiser la rencontre de l'enfant qui réside chez un seul de ses parents avec l'autre parent. Le développement de ces dispositifs a fait l'objet d'une grande attention lors de la préparation de la convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la Caisse nationale des allocations familiales conclue pour la période 2018-2022. Celle-ci prévoit en effet que les crédits affectés au financement des services de médiation familiale, qui étaient de 20,2 millions d'euros en 2017, atteignent un montant de 30,2 millions d'euros en 2022, soit une augmentation moyenne annuelle de 8,4 %, et de 50 % sur l'ensemble de la période. En cas de conflit important, les parents séparés pourront également utiliser les nouvelles possibilités offertes par l'article 31 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Elle prévoit un renforcement de l'exécution des décisions du juge aux affaires familiales en matière d'autorité parentale en autorisant le recours au concours de la force publique pour faire exécuter des décisions et conventions relatives à l'autorité parentale, l'astreinte pour l'exécution de la décision du juge aux affaires familiales et l'amende civile, jusqu'à 10 000 €, lorsqu'un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l'exécution d'une décision ou d'une convention. Enfin, la question du soutien à la parentalité doit être pensée globalement et au-delà de la seule situation des parents séparés. Avec la réforme des services aux familles de mai 2021, le soutien à la parentalité a été reconnu comme une politique publique à part entière faisant son entrée dans le code de l'action sociale et des familles. L'arrêté du 9 mars 2022 portant création d'une charte nationale de soutien à la parentalité a permis de fixer les principes clés de cette politique.