Question orale n° 1331 :
Géotextiles sans additif

15e Législature

Question de : Mme Bénédicte Taurine
Ariège (1re circonscription) - La France insoumise

Mme Bénédicte Taurine attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur les procédés de fabrication des géotextiles pour la stabilisation des sols utilisés actuellement sur le sol français. La stabilisation des sols uniquement par les techniques du génie végétal est devenue obligatoire depuis la loi sur l'eau de 1992. Ces applications végétales sont largement répandues sur les berges des cours d'eau, les confortements des digues et des talus et même dans la limitation de l'érosion des pistes de ski. Le recours à des géotextiles et géofilets biodégradables est une composante essentielle pour les premiers mois de revégétalisation de ces sols. Or aucune norme, aucun marquage « CE » n'existe pour des géotextiles ou géofilets de fibres végétales ou animales biodégradables fabriqués sans additif. À ce jour, seuls les géofilets à base de fibres de coco ou de jute tissés manuellement en Asie, car réalisés dans des conditions avantageuses de main d'œuvre, sont utilisés, sans traçabilité sur les traitements subis. À titre d'exemple, le fil de fibres de jute est assoupli pour les métiers à tisser avec du pétrole brut. En 2018, les résultats d'analyses biochimiques de composition en laboratoire ont fait apparaître, en plus des hydrocarbures, des polluants organiques persistants, les fameux POP, et du chlorure de sodium. Ces composés chimiques se trouvent donc irrémédiablement dans les sols, les nappes phréatiques et le sodium est néfaste pour la faune et la flore. C'est d'autant plus problématique lorsque ces produits sont utilisés dans des zones souvent classées espaces sensibles ou Natura 2000. Des procédés de fabrication permettent de produire des géotextiles composés exclusivement en fibres naturelles (laine ou chanvre) liées sans aucun additif et dont les chaînes de production se trouvent en France. Une production à grande échelle pourrait permettre la relance du secteur textile en France et améliorer la rétribution des éleveurs d'ovins qui n'ont aucun débouché pour leur laine actuellement. Mme la ministre dit vouloir encourager les relocalisations et s'inscrire dans la transition écologique. Elle lui demande ce qu'elle attend pour tarir ces filières d'importations aux contenus toxiques, permettre le développement de ces produits écologiquement et socialement plus vertueux, en orientant la commande publique.

Réponse en séance, et publiée le 24 mars 2021

GÉOTEXTILES
M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour exposer sa question, n°  1331, relative aux géotextiles.

Mme Bénédicte Taurine. La stabilisation des sols uniquement par les techniques du génie végétal est devenue obligatoire depuis la loi sur l'eau de 1992. Le recours à des géotextiles et des géofilets biodégradables est une composante essentielle lors des premiers mois de revégétalisation des sols, qu'il s'agisse des berges des cours d'eau, du confortement des digues ou pour limiter l'érosion de pistes de ski. Ces géotextiles sont très largement répandus et doivent être totalement biodégradables, puisque les particules sont ensuite assimilées par les végétaux ou peuvent se retrouver dans l'eau ou dans le sol.

À ce jour, les géofilets majoritairement utilisés seraient tissés en Asie, dans des conditions avantageuses sur le plan de la main-d'œuvre, supposément des enfants. Or aucune norme n'existe et il n'y a pas de traçabilité s'agissant des traitements subis ni des conditions de fabrication, sans parler de l'impact carbone lié au transport de ces produits.

En 2018, les résultats d'analyses biochimiques de composition réalisées en laboratoire ont laissé apparaître dans leurs composants des hydrocarbures, des polluants organiques persistants, les POP, et du chlorure de sodium. Ces composés chimiques se retrouvent ensuite irrémédiablement dans les sols et les nappes phréatiques, alors que le sodium est nuisible à la faune et à la flore. Ces produits posent d'autant plus de problèmes lorsqu'ils sont utilisés dans des zones classées en espaces naturels sensibles ou Natura 2000.

Il est cependant possible de fabriquer des filets en fibres naturelles, sans additif et à grande échelle. Des chaînes de production existent en France et disposent d'une importante capacité de développement. De surcroît, cela permettrait de soutenir, voire de relancer, le secteur textile – je m'adresse particulièrement à vous par rapport au pays d'Olmes qui est une zone économiquement sinistrée – et d'améliorer la rétribution des éleveurs d'ovins.

J'ai déposé en ce sens un amendement au projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui a malheureusement été rejeté. Vous dites vouloir encourager les relocalisations et vous inscrire dans la transition écologique. Qu'attendez-vous pour prendre des mesures permettant de tarir ces filières d'importation aux contenus toxiques et orienter vertueusement la commande publique ? Pour conclure, j'espère que vous donnerez un avis favorable à l'amendement que je déposerai en séance.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement. Vous appelez l'attention du Gouvernement sur la présence de substances chimiques dangereuses, comme les polluants organiques persistants, dans les géotextiles qui visent à stabiliser les sols sur les pentes des berges de certains cours d'eau, des digues ou des talus à proximité des routes.

La lutte contre la présence de substances chimiques toxiques est un sujet de préoccupation majeure. C'est pourquoi les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF –, ainsi que les services des douanes, effectuent régulièrement des contrôles sur la conformité des produits importés notamment, quant à la présence de matières toxiques.

La solution passe par la relocalisation d'une industrie textile en Europe, comme vous le soulignez. La Commission européenne a ainsi lancé récemment deux initiatives intéressantes que nous soutenons : d'abord, l'engagement d'une stratégie sur le textile durable, dans le cadre du plan de développement de l'économie circulaire, soumise à la consultation publique en janvier 2021 ; ensuite l'entrée en vigueur de la stratégie européenne sur les produits chimiques, qui vient consolider les démarches engagées par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire du 10 février 2020, qui a rendu obligatoire l'affichage de la présence de substances dangereuses dans les produits de consommation.

Cette stratégie impliquera la modification de plusieurs directives européennes, notamment le règlement relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances chimiques – CLP : Classification, labelling, packaging –, dont la nouvelle version sera présentée lorsque la France assurera la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022.

Enfin, les services du ministère de la transition écologique se tiennent à la disposition des fabricants et des producteurs de textiles de lin ou de chanvre qui souhaiteraient se diversifier en proposant la fabrication de produits dépourvus de substances chimiques, à base de fibres naturelles, notamment s'ils souhaitent développer un écolabel, que ces matières soient destinées aux géotextiles ou à toute autre application.

M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Taurine.

Mme Bénédicte Taurine. Nous avons effectivement dans notre territoire des entreprises à même de fabriquer ce type de produits et il serait intéressant de les recevoir comme vous le proposez.

Données clés

Auteur : Mme Bénédicte Taurine

Type de question : Question orale

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Transition écologique

Ministère répondant : Transition écologique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 mars 2021

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