Méthodes alternatives à l'expérimentation animale
Question de :
Mme Laurence Vanceunebrock
Allier (2e circonscription) - La République en Marche
Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur l'utilisation de méthodes alternatives à l'expérimentation animale. D'après le premier alinéa du préambule de la Charte nationale portant sur l'éthique de l'expérimentation animale, « les animaux sont des êtres sensibles, susceptibles de souffrir, dotés de capacités cognitives et émotionnelles, et ayant des besoins physiologiques et comportementaux propres à chaque espèce ». La directive 2010/63/UE impose aux États membres de collecter et publier chaque année des informations statistiques sur l'utilisation d'animaux dans des procédures scientifiques. Cette utilisation requiert une autorisation préalable de son ministère, chargé de la recherche, qui s'appuie sur l'évaluation éthique de comités répartis sur le territoire national, conformément aux articles R. 214-87 et suivants du code rural et de la pêche maritime. L'enquête nationale, conduite et publiée par les services de son ministère, repose sur les données collectées annuellement auprès des établissements utilisateurs d'animaux à des fins scientifiques (EU), en conformité avec l'article R. 214-121 du CRPM et en respectant les indications de la Commission européenne. Les nouvelles dispositions règlementaires françaises ayant été accompagnées de mesures transitoires jusque fin 2017, rendaient inappropriée toute comparaison jusqu'en 2018. Les résultats de l'enquête de 2016 sur l'expérimentation nationale n'étaient pas positifs puisque l'analyse statistique montrait que le nombre d'animaux utilisés avait augmenté de 0,87 % en 2016 par rapport à 2015. Par ailleurs, le nombre d'animaux dont la provenance n'est pas renseignée est en forte hausse (+153 %) et la sévérité des expériences pratiquées a considérablement augmenté entre 2015 et 2016 (+65 %). Elle souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en œuvre afin d'accroître l'utilisation de méthodes alternatives à l'expérimentation animale, conformément à la directive 2010/63/UE.
Réponse publiée le 8 septembre 2020
La directive 2010/63/UE est strictement appliquée en France. Elle repose en effet sur les trois grands principes complémentaires, remplacement, réduction et raffinement, en fonctions desquels les scientifiques doivent systématiquement justifier leur protocole de recherche avant d'engager leurs expérimentations. Le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation est l'autorité compétente pour délivrer en France les autorisations prévues par cette directive. Il porte une attention particulière à la justification par la communauté scientifique de la non-utilisation de méthodes alternatives, ainsi qu'aux conditions dans lesquelles les animaux sont utilisés. Que ce soit en cancérologie, en neurosciences, en immunologie, en génétique, les modèles animaux sont choisis en fonction des objectifs à atteindre qui peuvent aller de l'élucidation des mécanismes moléculaires à l'origine des pathologies jusqu'à la mise au point de nouvelles solutions thérapeutiques, auxquelles l'opinion publique est très favorable. Le nombre d'animaux utilisés doit également être justifié au regard du protocole expérimental. Les demandeurs d'autorisations de projet doivent également préciser les modèles statistiques utilisés, qui permettent de limiter au strict nécessaire le nombre d'animaux utilisés pour l'obtention d'un résultat signifiant. L'insistance ainsi mise sur le raffinement des techniques et des modèles expérimentaux et sur le développement de méthodes expérimentales substitutives à l'utilisation d'animaux vivants devrait confirmer dans les prochaines années une diminution du nombre d'animaux utilisés déjà perceptible. En effet, l'enquête sur l'utilisation d'animaux en 2017, réalisée en 2018 et en cours de publication, montre que 1,92 millions d'animaux ont été utilisés, chiffre stabilisé par rapport aux deux années précédentes. Le chiffre 2017 consolide les réponses de 549 établissements (+ 7,6 % par rapport à 2016 du fait de l'amélioration du taux de réponse à l'enquête). Le nombre d'animaux utilisés ramené au nombre d'établissements répondant est donc en baisse. L'augmentation apparente du nombre d'animaux dont la provenance n'est pas renseignée est un artefact. Elle vient de ce que le questionnaire commun fourni par la Commission européenne ne permet pas de renseigner la provenance dans le cas des animaux réutilisés. L'augmentation du nombre d'animaux réutilisés peut d'ailleurs être considérée comme un signal positif puisque cette réutilisation n'est autorisée réglementairement qu'à l'issue des protocoles expérimentaux les moins impactant pour les animaux. Si la proportion de procédures expérimentales sévères avait augmenté de 2015 à 2016, elle reste stable en 2017. Il est possible que l'augmentation apparente du degré de sévérité qui ressortait des chiffres de 2016 traduise aussi une meilleure assimilation des critères d'appréciation par les établissements utilisateurs, grâce au travail pédagogique assuré par les comités d'éthique et le ministère chargé de la recherche auprès de la communauté scientifique (guides, formations, conférences…). La France soutient bien évidemment toutes les méthodes alternatives, qui constituent le quotidien de nos chercheurs : l'expérimentation animale doit en effet être vue comme un simple maillon dans une chaîne méthodologique d'investigation du vivant, qui va de la simulation numérique aux essais cliniques sur l'homme, en passant par la culture cellulaire. Dans nombre de cas, ce maillon reste encore incontournable : il n'est guère envisageable à court terme que la recherche puisse se passer de l'expérimentation animale. Le fait que la France apparaisse parmi les pays européen utilisant le plus d'animaux n'est que le reflet de l'importance de son effort de recherche dans le secteur de la biologie et de la santé. Le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation est membre de la plate-forme française pour le développement des méthodes alternatives (FRANCOPA), qui fait partie de la plate-forme ECOPA dont le but est de fédérer l'ensemble des acteurs nationaux œuvrant au développement de telles méthodes au niveau européen. Le but commun consiste bien à cantonner l'utilisation d'animaux pour la recherche aux secteurs où elle est pour le moment irremplaçable.
Auteur : Mme Laurence Vanceunebrock
Type de question : Question écrite
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Dates :
Question publiée le 23 octobre 2018
Réponse publiée le 8 septembre 2020