lutte contre la haine sur les réseaux sociaux
Question de :
Mme Blandine Brocard
Rhône (5e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 14 novembre 2018
LUTTE CONTRE LA HAINE SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX
M. le président. La parole est à Mme Blandine Brocard, pour le groupe La République en marche.
Mme Blandine Brocard. Monsieur le ministre de l'intérieur, chaque jour, sur internet, nos concitoyens sont exposés à des discours, des commentaires, des prises à partie, des illustrations homophobes, sexistes, racistes, antisémites.
M. Éric Straumann. C'est vrai !
Mme Blandine Brocard. Les insultes et injures publiques ainsi que les discours haineux se propagent, leurs auteurs pensant être protégés par un relatif anonymat, bien trop facilement dissimulés qu'ils sont derrière un écran.
M. Éric Straumann. Les procureurs ne font rien !
Mme Blandine Brocard. Jamais on ne tolérerait ce type de communication dans la rue, à la télévision, à la radio ou dans une quelque publication que ce soit.
Il y a quelques jours, le parquet de Paris a assigné en référé les fournisseurs d'accès à internet aux fins de faire bloquer l'accès à un site internet infâme qui sévit depuis plus de dix-huit mois. La décision ne sera rendue que le 27 novembre, ce qui laisse espérer un filtrage au mieux quinze jours plus tard.
Sur ce site, mes chers collègues, on peut voir des photos de personnalités, dont des membres de cette assemblée, marquées par exemple de l'étoile jaune. On peut découvrir des titres ou des légendes que je suis incapable de dire à voix haute tant les termes employés sont inqualifiables. On peut y lire – veuillez m'en excuser – les expressions « les youpins », « les bougnoules », associées, qui plus est, à des qualificatifs des plus abjects, « les nègres ». Je ne peux vraiment pas aller plus loin car les mots lus sur ce site sont imprononçables. Pourtant, il nous faut les entendre et penser à ceux auxquels ils sont destinés.
Oui, mes chers collègues, c'est abject, c'est ignoble, c'est inqualifiable, mais cela montre hélas que ce qui est indicible se lit sans souci sur internet.
Monsieur le ministre, si, depuis 2014, il est possible de bloquer rapidement des sites à caractère terroriste ou pédopornographique, il semble que nous ne possédions pas les armes efficaces pour lutter contre la propagation de ces abjections haineuses. (M. Meyer Habib applaudit.)
Dès lors, quelles actions sont menées pour qu'internet ne reste pas un espace de non-droit où l'on peut répandre impunément cette odeur nauséabonde qui rappelle le pire des années trente ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, UDI-Agir, LT, SOC et GDR ainsi que sur quelques bancs des groupes FI et LR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Vous évoquez des faits insupportables que leurs auteurs, cachés derrière l'anonymat numérique, pensent pouvoir commettre en toute impunité et être relayés. Or, ce n'est pas parce que les auteurs ne sont pas physiquement présents que leurs agissements sont acceptables. Les propos haineux, discriminatoires, antisémites sur les réseaux sociaux doivent être combattus comme ils le sont dans le monde non virtuel.
Nous devons être très mobilisés. Le Premier ministre vous a invités à travailler sur ce sujet, et vous l'avez fait à l'occasion de l'examen en commission du projet de loi de programmation et de réforme pour la justice. Il avait également confié à l'écrivain Karim Amellal, à la députée Laetitia Avia ainsi qu'au vice-président du Conseil représentatif des institutions juives de France, Gil Taieb, la rédaction d'un rapport consacré au renforcement de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme sur internet. Les vingt propositions qu'ils ont formulées doivent désormais être mises en œuvre. Certaines d'entre elles ont déjà été reprises par la commission des lois dans le cadre du projet de loi présenté par la garde des sceaux que j'ai cité. Un amendement prévoyant une procédure simplifiée applicable aux propos haineux diffusés via internet a ainsi été adopté…
M. Claude Goasguen. À condition de poursuivre !
M. Christophe Castaner, ministre. …de même qu'une disposition permettant les plaintes en ligne.
M. Éric Straumann. Cela ne marche pas !
M. Christophe Castaner, ministre . Cette dernière est essentielle car dans 25 % des cas, la plainte est instruite par la justice. En outre, elle permet de libérer la parole et de protéger ceux qui parlent.
Enfin, je tiens à évoquer l'initiative prise hier par le Président de la République afin que Facebook collabore dans la lutte contre les contenus haineux. Nous devons agir constamment. Soyez sûre, madame la députée, que le Gouvernement est mobilisé pour réguler et sanctionner chaque comportement inacceptable et contraire à nos valeurs républicaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et MODEM.)
M. Éric Straumann. Souvent les plaintes sont classées !
Auteur : Mme Blandine Brocard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Crimes, délits et contraventions
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 14 novembre 2018