15ème législature

Question N° 1408
de Mme Aude Bono-Vandorme (La République en Marche - Aisne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > police

Titre > Équipement des vehicules des forces de sécurité en boîtier E85

Question publiée au JO le : 27/04/2021
Réponse publiée au JO le : 09/06/2021 page : 4691

Texte de la question

Mme Aude Bono-Vandorme rappelle à M. le ministre de l'intérieur que la troisième loi de finances rectificative pour 2020 que le Parlement a votée a permis de dégager une enveloppe de 75 millions d'euros pour engager le renouvellement du parc automobile des policiers et des gendarmes. Ainsi, 1 263 véhicules électriques et 1 335 Peugeot 5008 ont été livrés en 2020. Ce renouvellement va se poursuivre tout au long de cette année. Cette action permet aux forces de sécurité de travailler dans de meilleures conditions. Il y avait urgence, comme Mme la députée a pu le constater dans une brigade de gendarmerie de sa circonscription à Montcornet. La vétusté de leurs véhicules faisait peine à voir. Récemment invitée à la remise des clés de leurs nouveaux véhicules, Mme la députée a noté que le choix s'est porté sur des véhicules essence. Ayant été rapporteure pour avis sur le budget de la gendarmerie pendant trois ans, Mme la députée connaît l'importance de la part du budget concernant l'achat de carburant. Afin de limiter la dépendance de la gendarmerie à l'énergie fossile, elle avait proposé, en 2018, d'équiper les voitures de patrouille en boîtier E85. Il lui avait été alors répondu que cette proposition était à l'étude. Trois ans après, toujours rien. Le carburant E85 présente de nombreux avantages, aussi bien en termes d'économies budgétaires (0,65 euros le litre de E85 contre 1,46 euros le litre de E10 soit plus du double) que de transition écologique (réduction des gaz à effet de serre de 60 % par rapport à l'essence fossile). Par ailleurs, la France est depuis plusieurs années le premier producteur européen d'éthanol avec 11 à 12 millions d'hectolitres produits par an. En 2020, 350 millions de litres de E85 ont été consommés en France. L'offre de ce carburant, qui est de plus en plus généralisée (2 370 stations-service en France en proposent soit 1 station sur 4 et 28 dans l'Aisne), donne ainsi un débouché supplémentaire aux producteurs betteraviers des régions. Or l'installation du boîtier s'élève à peu près à 1 000 euros. Ce coût serait très rapidement amorti pour les véhicules des forces de l'ordre, qui circulent 24 heures sur 24 dans les territoires ruraux. On peut estimer l'économie mensuelle à 388 euros par mois, soit un boîtier amorti en 3 mois pour un véhicule parcourant 100 000 km par an. Elle lui demande, compte tenu de ces éléments, s'il n'est pas le moment d'équiper les voitures des forces de sécurité en boîtier E85 ou tout au moins d'expérimenter cette possibilité dans le département de l'Aisne.

Texte de la réponse

ÉQUIPEMENT DES VÉHICULES DE PATROUILLE EN BOÎTIERS E85


M. le président. La parole est à Mme Aude Bono-Vandorme, pour exposer sa question, n°  1408, relative à l'équipement des véhicules de patrouille en boîtiers E85.

Mme Aude Bono-Vandorme. La troisième loi de finances rectificative a permis de débloquer une enveloppe de 75 millions d'euros pour engager le renouvellement du parc automobile des policiers et des gendarmes. En 2020, 1 263 véhicules électriques et 1 335 Peugeot 5008 ont déjà été livrés. Cette action permet à nos forces de sécurité de travailler dans de bien meilleures conditions. Il y avait urgence, comme j'ai pu le constater au sein d'une brigade de gendarmerie de ma circonscription, à Montcornet : la vétusté de leurs véhicules faisait vraiment peine à voir !

Récemment invitée à la remise des clés de leurs nouveaux équipements, j'ai noté que le choix s'était porté sur des voitures à essence. Pour avoir été rapporteure pour avis des crédits de la mission « Gendarmerie nationale » pendant trois ans, je connais l'importance de la part dédiée à l'achat du carburant et j'avais proposé, dès 2018, d'équiper les véhicules de patrouille en boîtiers E85.

Le carburant E85 présente en effet de nombreux avantages, aussi bien sur le plan budgétaire – il coûte 65 centimes d'euros le litre contre 1,46 euro pour le E10, soit plus du double – que sur le plan de la transition écologique – il émet 60 % de gaz à effet de serre en moins que l'essence fossile. Il m'avait alors été répondu que la proposition était à l'étude – mais trois ans après, toujours rien !

Rappelons que la France est le premier producteur européen d'éthanol, à hauteur de 12 millions d'hectolitres par an. En 2020, 350 millions de litres de E85 ont été consommés dans le pays. Cette offre de carburant, qui se généralise toujours plus, offre un débouché supplémentaire aux producteurs betteraviers de nos régions. L'installation d'un boîtier permettant d'utiliser du E85 s'élève à environ 1 000 euros : ce coût serait amorti au bout de trois mois seulement pour les véhicules de police et de gendarmerie, qui circulent vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans les territoires ruraux. N'est-ce pas le moment de les équiper, ou, tout au moins, d'expérimenter cette possibilité dans le département de l'Aisne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Le renouvellement du parc automobile des forces de sécurité intérieure est une priorité pour le ministère de l'intérieur et il est déjà en cours dans un quart du parc. Ce renouvellement massif s'effectue dans le plus grand respect des normes environnementales : comme vous l'aurez certainement remarqué, l'accent a été mis sur les commandes de véhicules électriques, avec les équipements afférents. L'effet de volume de ces commandes, aux caractéristiques énergétiques plus favorables, améliorera significativement l'impact environnemental d'un parc vieillissant et soumis à une utilisation intensive.

S'agissant de l'équipement des véhicules en boîtiers E85 – dans la gendarmerie notamment – pour rouler au bioéthanol, cette solution présenterait certes des avantages mais aussi plusieurs inconvénients. Tout d'abord, sachant que la part du diesel dans la flotte de la gendarmerie était supérieure à 80 % en 2018, l'intérêt du E85 serait limité. Ensuite, le nombre réduit de points de distribution de E85 peut représenter une contrainte forte pour l'action opérationnelle des unités. Il est vrai que 25 % des stations-services en distribuent, mais elles ne sont pas réparties de manière homogène sur le territoire, et se situent souvent en agglomération. Enfin, les véhicules roulant au bioéthanol ont une autonomie réduite de 20 % par rapport à leurs équivalents fonctionnant à l'essence.

Le nombre important d'acquisitions de véhicules à essence, ces derniers mois, entraîne mécaniquement une réduction du nombre de véhicules diesel : c'est un argument pour relancer le débat sur l'utilisation des boîtiers E85. Cependant, cette avancée ne résout pas le problème du nombre limité de points de distribution. De plus, rien ne prouve, à ce stade, que la modification technologique de véhicules récents, non équipés de boîtiers E85 d'origine, ne les rendrait pas inéligibles à la garantie constructeur. Outre la densification indispensable des points de distribution de E85, l'homologation encore récente de cette technologie nécessite donc une parfaite connaissance des effets induits par l'utilisation de ce carburant. Le ministère de l'intérieur suit avec une attention particulière ce dossier qui, le moment venu, constituera un atout supplémentaire dans la composition de ses flottes.

M. le président. La parole est à Mme Aude Bono-Vandorme.

Mme Aude Bono-Vandorme. Je vous remercie pour ces réponses encourageantes. Le nombre de stations-services distribuant du E85 est en forte augmentation : l'avenir est donc favorable pour ce carburant et pour les betteraviers. Par ailleurs, la flotte roulant au diesel est en nette diminution ; le moment est donc opportun pour s'intéresser à l'implantation des boîtiers E85. Vous qui défendez la recherche, madame la ministre, vous reconnaîtrez que l'avenir est à la valorisation de notre potentiel de production d'éthanol – ce qui nous permettrait, de surcroît, d'acquérir une certaine souveraineté. Je compte sur vous.