Individus fichés « S » dans l'administration et les associations publiques.
Question de :
M. François Jolivet
Indre (1re circonscription) - La République en Marche
M. François Jolivet attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le recrutement des individus fichés « S » dans l'administration publique et les associations reconnues d'utilité publique. Face à la menace terroriste, la France a dû adapter son quotidien et faire face à la montée des dangers de l'intégrisme. Selon le rapport 2016 de la Délégation parlementaire au renseignement, plus de 12 000 personnes font en France l'objet de fiches de renseignements dites « S ». À quelques semaines de la discussion dans l'hémicycle du projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, le monde du travail a dû lui aussi s'ajuster : renforcement de la sécurité des transports, des sites industriels, multiplication des moyens de sécurité publique. Le risque est aujourd'hui permanent et impacte l'ensemble des secteurs d'activités. L'administration publique et les associations reconnues d'utilité publique ne sont pas à l'abri. Quels sont les filtres dont dispose l'administration publique et les associations reconnues d'utilité publique lors de leurs recrutements ? Quelles mesures disposent l'administration pour détecter les personnes référencées « S » avant l'embauche ? Les procédures et les méthodes de travail entre le ministère de l'intérieur et le ministère concerné (éducation nationale, transports, administration pénitentiaire et police) sont-elles assez renforcées ? En effet, une fois recruté, il n'existe actuellement aucune possibilité de sanction en droit du travail face à un contractuel menaçant ou dangereux pour la sécurité. Au contraire, il est interdit à un employeur de prendre des mesures discriminatoires en raison de l'appartenance à une ethnie ou à une religion. Une radicalisation dans la religion ne constitue pas en soi un motif de licenciement, ni le fait d'être « fiché S » par la Direction générale de la sécurité intérieure. Face à la menace terroriste, l'État et l'administration doivent aller plus loin. Il lui demande, en pratique, quelles dispositions sont prises pour éloigner les agents fichés déjà intégrés par voie contractuelle au sein de l'administration et des associations à utilité publique et quelles sont les mesures concrètes mise en place pour réduire les risques inhérents à toute intrusion de personnes « fichées S » dans ses secteurs d'activités.
Réponse publiée le 22 octobre 2019
Le I de l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure (CSI) dispose que « les décisions administratives de recrutement […] prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses […] peuvent être précédées d'enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales intéressées n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées. Ces enquêtes peuvent donner lieu à la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification ». Ces dispositions permettent de réaliser une enquête administrative préalablement à l'intervention d'une décision administrative de recrutement pour certains emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'État ainsi que certains emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense. La liste de ces emplois pour lesquels une décision de recrutement peut donner lieu à une enquête administrative en application de l'article L. 114-1 du CSI est précisée aux 2° et 3° de l'article R. 114-2 du CSI. Les décisions de recrutement des personnels dans les associations reconnues d'utilité publique ne figurent pas au sein de cette liste, dans la mesure où ces personnels n'occupent pas des emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'État ou relevant du domaine de la sécurité ou de la défense. Cette enquête administrative peut donner lieu à la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, au nombre desquels figure le fichier des personnes recherchées, autorisée par le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010. La loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme a par ailleurs complété l'article L. 114-1 du CSI par un II aux termes duquel « il peut également être procédé à de telles enquêtes administratives en vue de s'assurer que le comportement des personnes physiques ou morales concernées n'est pas devenu incompatible avec les fonctions ou missions exercées ». Ces dispositions permettent d'effectuer une enquête administrative postérieurement à la décision administrative de recrutement, lorsque la personne concernée est déjà en poste. Le troisième alinéa du IV de l'article L. 114-1 du CSI dispose que « lorsque le résultat de l'enquête fait apparaître que le comportement d'un agent contractuel de droit public […] [occupant un emploi participant à l'exercice de missions de souveraineté de l'État ou relevant du domaine de la sécurité ou de la défense] est devenu incompatible avec l'exercice de ses fonctions, son employeur lui propose un emploi comportant l'exercice d'autres fonctions et correspondant à ses qualifications. En cas d'impossibilité de mettre en œuvre une telle mesure, en cas de refus de l'agent ou lorsque son comportement est incompatible avec l'exercice de toute autre fonction eu égard à la menace grave qu'il fait peser sur la sécurité publique, il est procédé, après mise en œuvre d'une procédure contradictoire, à son licenciement ». Il en résulte que des agents contractuels déjà recrutés par l'administration peuvent être écartés de leurs fonctions, voire licenciés, dès lors qu'ils occupent l'un des emplois mentionnés à l'article R. 114-2 du CSI et que leur comportement est devenu incompatible avec l'exercice de ces fonctions.
Auteur : M. François Jolivet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 26 septembre 2017
Réponse publiée le 22 octobre 2019