15ème législature

Question N° 14223
de M. Éric Ciotti (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité des biens et des personnes

Titre > Mission sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité

Question publiée au JO le : 13/11/2018 page : 10111
Réponse publiée au JO le : 15/09/2020 page : 6293
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Éric Ciotti interroge M. le ministre de l'intérieur sur la proposition 15 de la mission d'information sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité « Mettre en œuvre une interface entre les différents fichiers auxquels un agent a accès, permettant leur consultation simultanée à partir de la saisie d'une identité ou d'un identifiant technique ; Étudier la possibilité de mettre en œuvre, dans le cadre de cette interface, un système d'alerte de présence, indiquant uniquement si une personne est inscrite au sein d'autres fichiers auxquels l'agent n'a pas accès ». Il lui demande quelles suites il entend y donner.

Texte de la réponse

Les policiers et les gendarmes disposent en mobilité, dans le cadre du projet NEO (nouvel équipement opérationnel), sur un premier périmètre de fichiers auxquels ils ont accès, d'une interface permettant leur consultation simultanée à partir de la saisie d'une identité ou d'un identifiant technique. Un dispositif similaire est en cours de finalisation pour les accès depuis les postes fixes. Quant à la possibilité de mettre en œuvre, dans le cadre de cette interface, un système d'alerte de présence, indiquant uniquement si une personne est potentiellement inscrite au sein d'autres fichiers auxquels l'agent n'a pas accès, elle est réalisable d'un point de vue technique. Toutefois, le cadre juridique doit absolument être modifié au préalable. Ainsi le système d'alerte évoqué doit être considéré comme une forme de mise en relation entre différents traitements, au travers de l'interface proposé. Or ce type de mise en relation nécessite que le cadre juridique soit absolument modifié si l'agent qui en bénéficie n'est ni accédant, ni destinataire autorisé des données contenues dans le traitement d'où provient le signal. S'il figure parmi les destinataires autorisés (c'est-à-dire ne bénéficiant pas des accès directement mais autorisé à se faire communiquer un partie des données), une simple demande d'avis à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) suffit, sans qu'une modification des actes réglementaires soit absolument nécessaire (articles 33 et 35 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés). La proposition n° 15 du rapport d'information sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité, publié le 17 octobre 2018, formule deux recommandations. En premier lieu, il est proposé de « mettre en œuvre une interface entre les différents fichiers auxquels un agent a accès, permettant leur consultation simultanée à partir de la saisie d'une identité ou d'un identifiant technique ». La mise en place d'une interface entre les différents fichiers auxquels un agent a accès, permettant leur consultation simultanée à partir de la saisie d'une identité ou d'un identifiant, fonctionne déjà sur tous les terminaux mobiles NEO (tablettes, smartphones) de la police et de la gendarmerie nationales pour les fichiers les plus couramment utilisés au quotidien tels que le fichier des personnes recherchées, le fichier des objets et des véhicules signalés, le traitement des antécédents judiciaires, le système national des permis de conduire ou le système d'immatriculation des véhicules. D'autres applications métiers, en cours de développement, intègrent également de telles interfaces. Des travaux en cours de développement sont aussi menés par les services du ministère de l'intérieur afin d'étendre cette interface à travers un outil présent sur tous les postes fixes des commissariats de police et des brigades de gendarmerie. En second lieu, il est recommandé « d'étudier la possibilité de mettre en œuvre, dans le cadre de cette interface, un système d'alerte de présence, indiquant uniquement si une personne est inscrite au sein d'autres fichiers auxquels l'agent n'a pas accès ». La mise en place d'un système d'alerte de présence d'une personne dans un fichier auquel l'agent n'a pas accès, bien que réalisable techniquement, soulève des difficultés juridiques importantes. En effet, la seule indication qu'une personne apparaît dans un fichier constitue une donnée à caractère personnel. D'une part, une importante modification du cadre juridique serait nécessaire, au travers de décrets Conseil d'Etat soumis à l'avis de la CNIL pour modifier l'ensemble des actes réglementaires (décrets ou arrêtés) autorisant la mise en œuvre des traitements considérés. Par ailleurs et compte tenu du fait que la plupart des traitements concernés sont susceptibles d'engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes, notamment à raison des données qu'ils contiennent, une analyse d'impact relative à la protection des données à caractère personnel devra être produite pour chacun de ces traitements. En outre, l'extension de ce système d'alerte à d'autres traitements que ceux du ministère de l'intérieur devrait recueillir l'accord des ministères responsables des traitements concernés. D'autre part, au regard du nouveau cadre juridique européen de la protection des données – constitué du règlement général sur la protection des données et de la directive européenne 2016/680, dite « Police - Justice » – et en application des principes de proportionnalité et de minimisation des données, la mise en place d'un tel système d'alerte ne pourra pas être étendue à toutes les forces de sécurité et sera nécessairement limitée. Cette seconde recommandation de la proposition n° 15 du rapport d'information sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité doit donc faire l'objet d'un travail d'analyse juridique approfondi au sein des services concernés du ministère de l'intérieur.