Pénurie et hausse des prix des matériaux de construction
Question de :
M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Hervé Saulignac appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la pénurie et la hausse des prix des matériaux de construction. Alors que les stocks s'amenuisent et que les cours des matières premières s'inscrivent à la hausse, le monde du bâtiment tire la sonnette d'alarme et craint pour son activité. Acier, cuivre, bois de construction ou encore polyuréthane, tous les secteurs ont les plus grandes difficultés à s'approvisionner en matière première, notamment dans son département, l'Ardèche. Ce phénomène, effet collatéral de l'épidémie et de la perturbation qu'elle a induite dans l'industrie, s'accélère et créé des situations de pénurie avec une envolée des prix qui pourrait avoir des conséquences dramatiques en matière d'emplois. Le secteur redoute la double peine avec des entreprises qui achètent des matériaux beaucoup plus chers que prévu et feraient alors des chantiers à perte, tout en dépassant les délais en raison de la pénurie et se verraient donc imposer des pénalités de retard. Après une année difficile en raison de la crise sanitaire, les entreprises se voient désormais à l'arrêt alors que, paradoxalement, les carnets de commande sont plus que corrects. Dans ces circonstances, le recours au chômage partiel des 3 900 entreprises ardéchoises du BTP serait dramatique et les plans de relance publics, vains. Le Gouvernement est particulièrement préoccupé par cette question. Aussi, il lui demande de détailler les mesures concrètes que va mettre en œuvre l'État pour ne pas compromettre la reprise, et de bien vouloir lui indiquer comment le Gouvernement entend répondre aux demandes du secteur, à savoir l'organisation d'un dialogue entre les fournisseurs de matière première et les professionnels du BTP, le gel des pénalités de retard ainsi que l'actualisation des prix.
Réponse en séance, et publiée le 9 juin 2021
PÉNURIE ET PRIX DES MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n° 1423, relative à la pénurie et au prix des matériaux de construction.
M. Hervé Saulignac. Le secteur du bâtiment tire la sonnette d'alarme, car les stocks de matériaux s'amenuisent et le cours des matières premières s'envole, faisant craindre à ce secteur des conséquences directes, notamment en termes d'emploi et de prix. C'est particulièrement le cas dans mon département de l'Ardèche, où ce secteur est à la peine pour s'approvisionner en matières premières telles que l'acier, le cuivre, le bois de construction ou le polyuréthane. Cette conséquence directe de l'épidémie et de la perturbation induite dans l'industrie crée des situations de pénurie, avec une envolée des prix qui pourrait, je le répète, avoir des répercussions sérieuses sur l'emploi.
Le secteur du bâtiment redoute également, et à juste titre, une sorte de double peine : d'une part, la hausse des prix des matériaux réduirait les marges et conduirait à réaliser des chantiers à perte et, d'autre part, des dépassements de délais liés à la pénurie et, en conséquence, des risques de pénalités de retard. Après une année difficile – c'est le moins que l'on puisse dire – en raison de la crise sanitaire, certaines entreprises sont désormais presque à l'arrêt, alors que, paradoxalement, leurs carnets de commandes sont plutôt corrects.
Dans ces circonstances, le recours au chômage partiel par les 3 900 entreprises ardéchoises du BTP serait dramatique et les plans de relance publique seraient vains. Je sais que le Gouvernement est particulièrement préoccupé par cette question et je souhaiterais donc, monsieur le secrétaire d'État, que vous puissiez détailler les mesures concrètes que vous envisagez de mettre en œuvre pour ne pas compromettre la reprise, et m'indiquer comment le Gouvernement entend répondre aux demandes du secteur du bâtiment, à savoir l'organisation d'un dialogue entre les fournisseurs de matières premières et les professionnels du BTP, le gel des pénalités de retard et l'actualisation des prix.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Cédric O, secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le député, vous appelez l'attention de M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, sur la pénurie et la hausse des prix des matériaux de construction. Permettez-moi un témoignage personnel : à Marseille, où je me trouvais hier, des chefs d'entreprises de différents secteurs, notamment l'entreprise Richel, qui fabrique des serres dans le nord des Bouches-du-Rhône, m'ont fait part des difficultés liées à l'augmentation des prix, notamment de l'acier, et des difficultés qu'elles rencontrent du fait des retards, des hausses de prix et des réductions des délais de paiements qui leur sont imposés par les fournisseurs, conséquence d'une situation mondiale qui peut avoir des conséquences catastrophiques pour nos entreprises nationales.
La reprise de l'activité industrielle, notamment en Asie, dans un contexte d'incertitude pour de nombreux producteurs de matières premières et de redémarrage plus lent des capacités de production, conduit en effet, à des tensions importantes en matière d'approvisionnements, principalement pour les métaux et les résines plastiques. Cette situation se double d'une hausse importante du prix des énergies, le prix du baril de pétrole brut ayant doublé entre novembre et mars pour atteindre 70 dollars début mars, et celui des quotas d'émissions atteignant 44 euros la tonne de CO2, avec un effet important sur les secteurs consommateurs d'énergie, mais également sur ceux dont les matières premières sont des dérivés pétroliers, notamment les plastiques et de nombreuses bases chimiques.
Ces tensions confirment la pertinence de l'action menée par le Gouvernement depuis plusieurs années et accélérées dans le cadre du plan France Relance pour la résilience de nos approvisionnements et des chaînes de valeur, et pour soutenir les projets qui concourent à notre autonomie stratégique dans les secteurs clés. Nous allons poursuivre et amplifier ces efforts dans les semaines et les mois qui viennent, pour ce qui concerne les semi-conducteurs, mais aussi dans le domaine de la métallurgie, ou encore pour accélérer le développement d'une économie circulaire et mieux maîtriser nos approvisionnements.
Dans le cas des plastiques, nos efforts, déjà engagés en 2020 par un soutien dédié, puis par l'arrêté bonus-malus qui favorise l'incorporation de plastique recyclé dans les emballages, et approfondis en 2021 avec le fonds Économie circulaire de l'ADEME – l'Agence de la transition écologique – et le dispositif ORPLAST 3, à hauteur de 140 millions d'euros, pour soutenir les investissements des plasturgistes dans l'incorporation de matières plastiques recyclées, rendront, à terme, la filière moins sensible aux fluctuations de prix des matières plastiques vierges.
Bruno Le Maire a par ailleurs demandé à ses services d'assurer un suivi précis des situations que vous évoquez, avec une vigilance toute particulière pour le respect d'un équilibre des relations entre clients et fournisseurs, afin d'éviter que ne soient invoquées abusivement des clauses de force majeure. Si des clauses abusives ou des pratiques commerciales déraisonnables sont en cause, soyez certain que nous ferons le maximum pour assurer une application exigeante du droit des contrats. Les juridictions commerciales ont précisément pour vocation de veiller à cet équilibre.
Afin de faire le point sur la situation et sur les meilleures approches pour accompagner les entreprises confrontées à ces situations de tension sur les approvisionnements, le ministre des finances, Bruno Le Maire, a réuni le 14 avril les filières les plus touchées. Nous allons poursuivre ce suivi et veiller au traitement au cas par cas des situations les plus difficiles.
M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac.
M. Hervé Saulignac. Merci, monsieur le secrétaire d'État, de cette réponse. Nous partageons le constat, ce qui est déjà une bonne chose. J'insiste sur le fait que nous devons retrouver une forme d'autonomie, sinon de souveraineté, pour ce qui concerne certains matériaux. J'ai bien pris note de l'engagement du ministre de l'économie d'assurer un suivi précis de ces questions et des relations entre les fournisseurs et les entreprises du BTP. Quant à moi, j'assurerai un suivi précis de son suivi précis !
Auteur : M. Hervé Saulignac
Type de question : Question orale
Rubrique : Bâtiment et travaux publics
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 avril 2021