Question orale n° 142 :
Désenclavement du sud Ardèche

15e Législature

Question de : M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Nouvelle Gauche

M. Hervé Saulignac interroge Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur le désenclavement du sud Ardèche. Certains éléments d'information laissent supposer que l'État serait en passe de reporter le projet de désenclavement du sud Ardèche en mettant un coup d'arrêt au projet de contournement du Teil. Si tel était le cas, il s'agirait d'une remise en cause incompréhensible, injuste et surtout insupportable. Cet investissement doit fluidifier et sécuriser les déplacements de la route nationale 102. La RN 102 est classée depuis 2003 grande liaison d'aménagement du territoire. Elle est la seule transversale entre Lyon et Nîmes qui dessert le Massif central. Elle est également la seule route classée « nationale » de la Vallée du Rhône en liaison est / ouest. Le contournement du Teil est un projet chiffré à 64 millions d'euros de travaux, dont 40 % sont financés par la région Auvergne-Rhône-Alpes et le département de l'Ardèche soit 28 millions d'euros investis par les collectivités territoriales sur une route qui n'est pourtant pas de leurs compétences. C'est dire l'importance portée à cet investissement ! L'Ardèche se distingue à bien des égards et notamment en étant le seul département de France dépourvu de transport ferré de voyageurs. Voilà plus de 30 ans que les Ardéchois attendent le contournement du Teil ! La patience des Ardéchois a été exemplaire. Leur demander d'aller au-delà serait un profond manque de respect. Il lui rappelle que le premier « dossier de prise en considération » de la déviation du Teil par le ministère de l'équipement date de 1986. Entretemps, le trafic a doublé avec plus de 16 000 véhicules jour et nuit, dont 2 200 poids lourds. Pour cette commune de 8 700 habitants, véritable goulot d'étranglement, la ministre comprendra que le centre-ville soit au bord de l'asphyxie. L'État ne s'y est d'ailleurs pas trompé. Le Teil est la seule ville ardéchoise à avoir été retenue pour conclure un programme ANRU, parce que le contournement de la ville était justement lancé. Le protocole 2018-2023 qui mobilisera 16 millions d'euros de fonds publics doit d'ailleurs être signé avec l'État dans les prochains jours. Les conséquences économiques et sociales d'un report du désenclavement du Sud-Ardèche seraient considérables : l'éloignement de la Vallée du Rhône est un frein à l'installation d'entreprises en Ardèche méridionale et à l'emploi, pour un territoire où le nombre de bénéficiaires du RSA est un des plus élevés de Rhône-Alpes. L'accès à l'emploi passe par le désenclavement des territoires. Le rapport du comité d'orientation des infrastructures qui lui a été remis le 1er février 2018 préconise, à cet égard, une amélioration de la desserte routière nationale des territoires enclavés, faisant écho à son annonce d'un plan de désenclavement lors de la clôture des assises de la mobilité. L'Ardèche ne peut pas se réduire à un département touristique pour les urbains en mal de verdure. C'est un territoire vivant, innovant, qui a besoin que promesse soit tenue pour continuer à se développer ! À ce jour, le projet est finalisé. Les prestataires ont même été choisis. Des maisons situées sur le linéaire du tracé ont déjà été détruites. Les pelleteuses sont suspendues à sa décision. Aussi il lui propose que, si l'État n'a pas le volume des autorisations d'engagement nécessaires en 2018 pour la première tranche, le département de l'Ardèche est prêt à faire l'avance à l'État. Cela serait du jamais vu en France. Mais la population et les élus ardéchois y sont prêts et ne comprendraient pas que cette main tendue puisse être refusée. Il lui demande sa position sur cette question.

Réponse en séance, et publiée le 21 février 2018

DÉSENCLAVEMENT DU SUD ARDÈCHE
M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n°  142, relative au désenclavement du Sud Ardèche.

M. Hervé Saulignac. Madame la secrétaire d'État, les Ardéchois ont atteint les limites de leur patience. Ils l'ont exprimé hier dans la rue, à travers une manifestation qui rassemblait des élus d'origine et de confession très diverses. Voilà plus de trente ans, en effet, qu'ils attendent le contournement du Teil et des travaux d'aménagement sur la route nationale 102.

Le ministère de l'équipement avait identifié ce projet en 1986 et l'avait déclaré d'intérêt public en 1993. Vingt-cinq ans se sont écoulés, durant lesquels le trafic a doublé : 16 000 véhicules par jour, dont 2 200 poids lourds, traversent quotidiennement les rues de la commune du Teil, qui est au bord de l'asphyxie.

Cette situation n'est plus tenable, d'autant que l'État a eu l'audace – pour ne pas dire autre chose – de venir chercher les collectivités pour payer une partie de cette opération. Et en effet, la région Auvergne-Rhône-Alpes et le conseil départemental de l'Ardèche vont mettre sur la table 28 millions d'euros pour moderniser une route nationale, qui relève des compétences de l'État.

Dans ces conditions, il me semble que la moindre des marques de reconnaissance serait d'engager l'opération. Cessez de reporter le contournement du Teil : nous ne l'accepterons plus !

L'Ardèche n'a pas de transport ferré de voyageurs. L'Ardèche n'a pas d'autoroute. La liaison Est-Ouest est déterminante pour son économie, pour le développement de l'Ardèche méridionale, pour le bassin albenassien et pour le développement de la montagne ardéchoise. Quant au contournement du Teil, il est absolument essentiel à la qualité de vie des Teillois, qui n'en peuvent plus de devoir supporter ces nuisances.

Désormais, plus rien ne s'oppose à ce que l'on mette enfin en œuvre ce chantier. Les études ont été réalisées, les acquisitions foncières ont été faites, les marchés ont même été passés. Si je comprends que les arbitrages budgétaires sont parfois difficiles, je ne comprendrais pas que nous nous fassions doubler et que ces arbitrages profitent à d'autres sans raison valable.

Mme la ministre Élisabeth Borne a récemment dit publiquement sa volonté de désenclaver les territoires ruraux : qu'elle la prouve, en faisant de la RN 102 une priorité pour 2018 et non pour 2019 ou pour 2020.

Pour vous montrer à quel point les Ardéchois sont déterminés, je vous fais une proposition, madame la secrétaire d'État. Chacun le sait, le département de l'Ardèche est extrêmement riche… Dès lors, il est disposé à faire l'avance des crédits de l'État : nous sommes prêts à vous accorder la trésorerie qui vous manque ! L'Ardèche, banquier de l'État, voilà une main tendue que vous ne pouvez pas refuser. Merci de la saisir aujourd'hui, de la saisir maintenant !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le député, vous avez souhaité faire part à la ministre des transports, Élisabeth Borne, de l'attention que vous prêtez à l'aménagement de la route nationale 102, en Ardèche, notamment à la mise en œuvre du projet de contournement nord de l'agglomération du Teil.

Assurant la desserte de la montagne ardéchoise, la RN 102 constitue un axe important qui permet de connecter le sud-est du Massif central à la vallée du Rhône. Elle dessert ainsi efficacement un vaste territoire.

La politique d'investissements routiers de l'État en Ardèche est aujourd'hui constituée d'une combinaison d'actions, parmi lesquelles figure la réalisation du contournement du Teil. Ce projet est inscrit à l'actuel contrat de plan État-région Auvergne-Rhône-Alpes pour un montant notable de 63,8 millions d'euros, dont 35,3 millions apportés par l'État. Ce projet est constitué d'une infrastructure routière nouvelle, bidirectionnelle, de 4,5 kilomètres, contournant Le Teil par l'Ouest et le Nord. Sa déclaration d'utilité publique a été prononcée fin 2011 et prorogée par un arrêté préfectoral du 26 septembre 2016.

Cette opération est fortement soutenue au niveau local, tant par le conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes que par le conseil départemental de l'Ardèche, qui apportent respectivement 17 et 10,9 millions d'euros au plan de financement de l'opération, finalisé par une convention signée récemment, le 22 janvier dernier.

Conscients des besoins de fiabilisation des temps de parcours pour le trafic d'échange et de transit, comme des besoins de sécurisation et d'amélioration des conditions de vie pour les riverains de la RN 102, les services de l'État se sont mobilisés afin de faire avancer cette opération. Les études de conception détaillée du projet se sont poursuivies et le dossier final, comportant une estimation précise des coûts, devrait bientôt être approuvé. Des fouilles archéologiques ont d'ores et déjà été menées au cours du premier semestre 2017. Les procédures en vue de la maîtrise du foncier nécessaire à la réalisation de l'opération sont terminées : les dernières acquisitions foncières et démolitions de maisons se sont poursuivies jusqu'à la fin de l'année 2017.

La priorité donnée aux opérations en cours et les difficultés budgétaires de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF, n'ont pas permis d'inscrire à la programmation initiale 2018 les travaux du contournement du Teil. Je prends note, au nom de la ministre des transports, de la proposition formulée par le département de l'Ardèche de faire l'avance des crédits de l'État pour permettre un démarrage rapide des travaux. Cette proposition traduit la mobilisation des acteurs locaux autour du projet, et nous l'entendons.

J'ajoute que le financement de l'opération fait l'objet d'un examen très attentif : nous étudions actuellement la possibilité d'inscrire des capacités de financement supplémentaires. En effet, ce projet s'inscrit tout à fait dans la politique que le Gouvernement souhaite mener pour le désenclavement des territoires – une priorité gouvernementale, monsieur le député –, puisqu'il permettra d'améliorer significativement pour les Ardéchois l'accès à la vallée du Rhône et, au-delà, à la Drôme.

M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d'État. J'ai simplement envie de vous dire : « Encore un petit effort ! » Vous évoquez des crédits supplémentaires : je vous demande de bien vouloir les confirmer très rapidement et, bien entendu, de confirmer qu'ils seront destinés à cette opération ardéchoise.

Données clés

Auteur : M. Hervé Saulignac

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports routiers

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 février 2018

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