15ème législature

Question N° 1437
de M. Belkhir Belhaddad (La République en Marche - Moselle )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > professions de santé

Titre > Formation des infirmiers en zone frontalière franco-luxembourgeoise

Question publiée au JO le : 04/05/2021
Réponse publiée au JO le : 16/06/2021 page : 5052

Texte de la question

M. Belkhir Belhaddad attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la crise des vocations et la pénurie d'infirmiers qui n'est pas propre à la Moselle. À l'échelle mondiale, il en manquera 9 millions dans le monde entier. À cette heure, 7 500 postes ne sont pas pourvus en France. Pour autant, ce problème revêt une importance encore plus particulière dans la circonscription de M. le député et les circonscriptions voisines, en raison de l'attractivité du recrutement par les établissements hospitaliers du Grand-Duché de Luxembourg. M. le député parle d'un pays voisin où le salaire moyen infirmier s'élève à 94 000 euros, soit trois fois plus que du côté français. Immanquablement, les infirmiers formés dans les IFSI en France ne sont pas attirés par les postes proposés dans les hôpitaux français et rejoignent les plus de 100 000 travailleurs pendulaires journaliers vers le Luxembourg. M. le député croit urgent de poser ce sujet sur la table avec les Luxembourgeois, non pas pour réduire le salaire de quiconque mais pour envisager en commun la formation des infirmiers, en adaptant leur nombre aux besoins des deux pays et en partageant le financement. On pourrait, au nom de la différenciation des territoires, concevoir en Moselle les premiers instituts binationaux de formation des infirmiers et infirmières. On pourrait, au nom des liens qui unissent les deux pays et comme on a commencé à le faire sur la mobilité, concevoir un projet commun, porté par une convention bilatérale. Il souhaiterait connaître les initiatives prises par le Gouvernement, du côté de M. le ministre comme de celui du Quai d'Orsay, pour répondre à cette problématique. Il souhaiterait également savoir si ce sujet a été porté à l'ordre du jour de la prochaine conférence inter- Gouvernementale entre la France et le Luxembourg.

Texte de la réponse

FORMATION DES INFIRMIERS EN ZONE FRONTALIÈRE FRANCO-LUXEMBOURGEOISE


M. le président. La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour exposer sa question, n°  1437, relative à la formation des infirmiers en zone frontalière franco-luxembourgeoise.

M. Belkhir Belhaddad. La crise des vocations et la pénurie des infirmiers et des infirmières ne sont pas propres à la Moselle. À l'échelle du monde, il en manquerait près de 9 millions, tandis que ce sont près de 7 500 postes qui ne sont pas pourvus en France. Ce problème revêt une dimension particulière dans ma circonscription et dans les territoires voisins, en raison de la proximité et de l'attractivité des établissements hospitaliers du Grand-Duché du Luxembourg.

Je parle d'un pays voisin où le salaire moyen d'un infirmier s'élève à près de 94 000 euros par an, soit trois fois plus que de notre côté de la frontière. J'ai bien conscience des efforts considérables qui ont été fournis par le Gouvernement dans le cadre du Ségur de la santé pour revaloriser les salaires, mais les infirmiers et infirmières formés dans nos IFSI – instituts de formation en soins infirmiers – demeurent insuffisamment attirés par les postes proposés par les établissements de santé, en particulier de mon département. Ils préfèrent rejoindre les près de 100 000 travailleurs frontaliers exerçant au Luxembourg.

Je crois urgent de discuter de cette question avec nos amis luxembourgeois afin d'envisager conjointement la formation de nos infirmiers et infirmières, en adaptant leur nombre aux besoins des deux pays et en partageant à la fois la conception, le financement et la gouvernance des projets pédagogiques. Nous pourrions, au nom de la différenciation des territoires, concevoir en Moselle les premiers instituts binationaux de formation des infirmiers et des infirmières. Nous pourrions, au nom des liens qui unissent nos deux pays, et comme nous l'avons fait dans le domaine de la mobilité, concevoir un projet défini par une convention bilatérale.

Je souhaiterais donc connaître les initiatives prises par le Gouvernement, issues aussi bien du ministère de la santé que du Quai d'Orsay, pour répondre à cette problématique. J'aimerais également savoir de quelle manière cette question sera prise en compte dans la préparation de la prochaine conférence intergouvernementale entre la France et le Luxembourg, qui aura lieu dans les semaines qui viennent.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Monsieur le député Belkhir Belhaddad, je prends toute la mesure de ce dont vous faites état, c'est-à-dire la concurrence du Luxembourg, qui pèse sur notre démographie infirmière. Le sujet, dont les enjeux se posent en termes de formation, de coopération et d'attractivité, est l'une des priorités du Gouvernement.

Une mesure du plan de relance prévoit la création de 6 000 nouvelles places de formation entre 2020 et 2022. La région Grand Est fait d'ailleurs partie des régions qui contribuent le plus à cet effort, avec 510 nouvelles places de première année supplémentaires prévues en 2022. L'ARS participe à cet effort financier pour une partie des places créées en 2020, aux côtés de votre région.

En matière d'attractivité, vous conviendrez que le Gouvernement entame, dans le cadre du Ségur, une revalorisation historique de ces professions, pour assurer l'attractivité des carrières publiques. C'est historique mais, dans le contexte transfrontalier que vous évoquez, nous devons aller plus loin. La diplomatie française œuvre à cette fin.

En matière de coopération, le Gouvernement est pleinement conscient de la mobilité des populations entre la France et le Luxembourg et, dans un souci d'amélioration de la qualité de soins et de l'organisation des systèmes de soins, les deux pays ont formalisé leur coopération sanitaire par l'accord-cadre et son accord d'application du 21 novembre 2016. Il s'agit d'assurer un meilleur accès aux soins et une continuité des soins pour les populations transfrontalières.

Cette coopération prévoit notamment d'optimiser l'organisation des soins en facilitant l'utilisation et le partage des moyens humains et matériels. Le sujet des formations communes en santé est évidemment l'un des thèmes de cette coopération dans les domaines de la santé et de l'enseignement supérieur. Il est prévu qu'il soit inscrit à l'ordre du jour de la prochaine conférence intergouvernementale, qui aura lieu cet été, et a d'ores et déjà été abordé lors de la conférence préparatoire qui s'est tenue mi-mars au Luxembourg. À cette occasion la proposition de formation commune et d'échanges de stagiaires que vous évoquez a d'ailleurs été formulée. Le Luxembourg a indiqué qu'une réforme des études de santé était en cours et qu'il était prêt à travailler sur les échanges de stagiaires et le principe d'une formation commune pour les infirmiers spécialisés. Les autorités françaises et luxembourgeoises ont convenu de prolonger le groupe de travail que nous avons mis en place sur ce thème et d'organiser cet accueil dès septembre 2021.

Le Gouvernement a donc pris toute la mesure de cet enjeu et mobilise tous les leviers dont il dispose pour assurer une meilleure offre de soins à nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Belkhir Belhaddad.

M. Belkhir Belhaddad. Merci pour toutes ces précisions, madame la ministre déléguée. Vous avez bien fait de souligner les avancées de ces dernières années et de ces derniers mois, notamment la création de plus de 6 000 places de formation, financées par l'ARS du Grand Est et la région.

Je compte vraiment sur vous, à l'occasion de la conférence intergouvernementale, pour porter haut la voix de la France et faire en sorte que les solutions trouvées rétablissent une forme d'équité.