15ème législature

Question N° 1454
de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés - Sarthe )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Culture
Ministère attributaire > Culture

Rubrique > culture

Titre > Conséquences de la crise sanitaire dans le secteur culturel

Question publiée au JO le : 04/05/2021
Réponse publiée au JO le : 16/06/2021 page : 5032

Texte de la question

Mme Marietta Karamanli attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur la question de l'accès à la culture et de ses conséquences sur les travailleurs précaires de ce secteur. L'accès à la culture est aujourd'hui en crise ; les mesures sanitaires prises pour lutter contre la pandémie mettent en cause l'accès à la culture. La crise dure et certains annoncent que le retour à la normale ne se fera pas avant l'été 2022. Si les structures nationales et les institutions culturelles de taille comme les musées, les théâtres, les grands équipements bénéficient logiquement d'aides dès aujourd'hui et peuvent espérer s'être redressées au moment où le soutien financier public refluera, se pose la question de ce qu'on nomme le tiers secteur, le secteur non lucratif et associatif. Les restrictions apportées aux manifestations et regroupements artistiques et culturels touchent de plein fouet les associations, institutions, artistes et intermittents qui donnent vie à ce droit pour de nombreux citoyens. L'État et les collectivités territoriales doivent jouer un rôle clef dans la sauvegarde d'un secteur économique important pour tous. Au Mans, le Théâtre des Jacobins est occupé depuis plusieurs semaines par les intermittents du spectacle. La relance initiée par l'Union européenne et la France doivent prendre en compte la culture et ce tiers secteur conformément à la résolution du Parlement européen sur la relance culturelle de l'Europe (septembre 2020) mettant en évidence, entre autres, la prépondérance de petites structures aux revenus irréguliers. Les conditions d'emploi et de protection sociale des intermittents du spectacle doivent être une priorité. Des propositions ont été formulées par les organisations représentatives des entreprises et organismes du secteur. Certains pays voisins ont, pour éviter une dégradation durable du paysage culturel et contribuer au maintien de la diversité culturelle, décidé de compenser au moins de façon forfaitaire les pertes de revenus habituels ou attendus (billetterie, location, aides non versées, coûts supplémentaires liés directement à la crise comme le report et annulations des engagements hors autres indemnités) de ces acteurs culturels. Un fonds spécial en vue d'aider le secteur non marchand devrait être activé. Il pourrait être financé au moins pour partie par la taxation des géants du numérique (GAFA pour Google, Apple, etc.), que cette dernière se fasse au seul plan national ou au plan européen. La crise rend cette taxation d'autant plus légitime que les revenus de ces GAFA, globalement peu ou pas taxés, proviennent, entre autres, de la vente de produits culturels dont ils tirent un large profit. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté fin avril 2021 une résolution sur la fiscalité numérique visant à ce qu'elle puisse servir étendre la protection sociale des travailleurs précaires Elle lui demande quelles mesures elle entend prendre en faveur du tiers secteur culturel, de ses travailleurs précaires et lier une aide temporaire urgente à un financement plus large et pérenne.

Texte de la réponse

CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE DANS LE SECTEUR CULTUREL


M. le président. La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, n°  1454, relative aux conséquences de la crise sanitaire dans le secteur culturel.

Mme Marietta Karamanli. Ma question s'adresse à la ministre de la culture. L'accès à la culture est aujourd'hui en crise ; il est remis en cause par les mesures sanitaires prises pour lutter contre la pandémie. La crise dure depuis un certain temps, et d'aucuns annoncent que le retour à la normale n'interviendra pas avant l'été 2022.

Si les structures nationales et les institutions culturelles établies comme les musées, les théâtres et les grands équipements bénéficient logiquement d'aides dès aujourd'hui et peuvent espérer s'être redressées au moment où le soutien financier public refluera, se pose la question de ce que l'on nomme le tiers secteur, le secteur non lucratif et associatif.

Les restrictions apportées aux manifestations et regroupements artistiques et culturels touchent de plein fouet les associations, institutions, artistes et intermittents qui donnent vie à ce droit pour de nombreux citoyens. L'État et les collectivités territoriales doivent jouer un rôle clef dans la sauvegarde d'un secteur économique important pour tous. Au Mans, le théâtre des Jacobins est occupé depuis plusieurs semaines par les intermittents du spectacle.

La politique de relance engagée par l'Union européenne et la France doit prendre en compte la culture et ce tiers secteur conformément à la résolution du Parlement européen sur la relance culturelle de l'Europe mettant en évidence, entre autres, la prépondérance de petites structures aux revenus irréguliers. Les conditions d'emploi et de protection sociale des intermittents du spectacle doivent être une priorité. Des propositions ont été formulées dans ce sens par les organisations représentatives des entreprises et organismes du secteur.

Certains pays voisins ont, pour éviter une dégradation durable du paysage culturel et contribuer au maintien de sa diversité, décidé de compenser, au moins de façon forfaitaire, les pertes de revenus habituels ou attendus – billetterie, etc. – des acteurs culturels du tiers-secteur.

Un fonds spécial en vue d'aider le secteur non marchand devrait être activé et pourrait même être financé, au moins pour partie, par la taxation des géants du numérique. Que cette dernière se fasse au seul plan national ou au plan européen, la crise la rend d'autant plus légitime que les revenus des GAFA – Google, Amazon, Facebook, Apple –, globalement peu ou pas taxés, proviennent notamment de la vente des produits culturels dont ils tirent un large profit. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté, fin avril, une résolution sur la fiscalité numérique qui doit permettre d'étendre la protection sociale des travailleurs précaires. Quelles mesures entend prendre le Gouvernement en faveur des travailleurs précaires du tiers-secteur culturel afin de lier une aide temporaire urgente à un financement assis sur une assiette plus large et plus pérenne ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail. Je vous prie d'excuser l'absence de ma collègue Roselyne Bachelot. Je vais pouvoir répondre à votre question sur la base des éléments qu'elle m'a communiqués.

Il est inutile de rappeler que le secteur culturel a été l'un des plus impactés par la crise sanitaire. Vous avez aussi d'ailleurs souligné que le Gouvernement a déployé un accompagnement financier important sur lequel vous me permettrez de revenir quelques instants : plus de 7 milliards d'aides transversales, 1,2 milliard d'aides sectorielles, 946 millions d'euros au titre de l'année blanche pour les intermittents depuis mars 2020. Cela montre l'engagement du Gouvernement aux côtés des acteurs de la culture.

L'ensemble du tiers-secteur, pour en venir plus précisément à votre question, fait l'objet de mesures de soutien spécifiques. Tiers-secteur et lieux intermédiaires sont par ailleurs pleinement intégrés dans le plan de relance. Les DRAC, les directions régionales des affaires culturelles, ont bénéficié de crédits dédiés aux tiers-lieux pour un montant de 3 millions d'euros et elles ont été invitées à soutenir le plus grand nombre de structures telles que celles que vous avez évoquées.

S'agissant de l'intermittence, un véritable enjeu, l'année blanche a été essentielle, convenez-en, en termes de protection sociale et de préservation des capacités artistiques et techniques. Une concertation a été lancée avec les organisations professionnelles à l'issue de la remise du rapport d'André Gauron sur les suites à donner à ce dispositif.

Vous avez également évoqué la taxation des géants du numérique. La fiscalité culturelle a été adaptée depuis plusieurs années pour mieux associer les acteurs du numérique au financement de la création, notamment à travers le fonds de soutien au cinéma, à l'audiovisuel et au multimédia. Ainsi, la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels affectée au financement de ce fonds a été refondue par la suppression de la taxation différenciée entre les diffuseurs linéaires historiques et les nouveaux acteurs, notamment les plateformes de vidéo à la demande qui se renforcent depuis plusieurs années maintenant.

Enfin, le projet de décret d'application de l'ordonnance transposant la directive relative à la fourniture de services de médias audiovisuels fixe un haut niveau d'ambition pour le financement de la production cinématographique et audiovisuelle par les plateformes puisque celles-ci devront y consacrer 20 % ou 25 % de leur chiffre d'affaires réalisé en France et ainsi, comme vous le souhaitez, soutenir la création culturelle française. Voilà aussi l'engagement de Roselyne Bachelot, ministre de la culture.