Impact du Brexit sur la coopération franco-britannique en matière de défense
Question de :
Mme Caroline Janvier
Loiret (2e circonscription) - La République en Marche
Mme Caroline Janvier interroge Mme la ministre des armées sur l'impact du Brexit sur le sujet de la coopération franco-britannique en matière de défense. En effet, la France et le Royaume-Uni détiennent une place particulière en matière de défense en Europe. Ils sont les deux plus grandes puissances militaires du bloc européen. Ils concentrent une partie importante du budget de défense à l'échelle européenne et par la même occasion les capacités de défense européenne. Dans la droite ligne de l'entente cordiale de 1904 et du traité de Lancaster House de 2010, la France et le Royaume-Uni se sont engagés dans un ambitieux programme de coopération en matière militaire pour tirer parti des nombreuses synergies possibles dans un contexte de réduction des dépenses publiques. Que cela soit au niveau opérationnel avec la Force expéditionnaire commune conjointe (CJEF), industriel avec nombre de projets initiés ou encore en matière de dissuasion nucléaire, cette alliance dans des domaines de souveraineté démontre l'intensité du partenariat franco-britannique. Dans un environnement international global fragile, cette coopération n'a jamais été aussi essentielle. À l'heure du Brexit et de ses incertitudes, il apparaît comme primordial de préserver le partenariat stratégique entre deux alliés historiques. Elle souhaiterait savoir quelles sont les modalités que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour préserver et, au-delà, renforcer cette alliance fondamentale entre le Royaume-Uni et la France.
Réponse publiée le 19 mars 2019
Le 23 juin 2016, le Royaume-Uni a décidé, par référendum, de quitter l'Union européenne (UE) et le gouvernement britannique a donc invoqué, le 29 mars 2017, l'article 50 du traité sur l'UE. En principe, le Royaume-Uni devrait donc quitter l'UE le 29 mars 2019. La question de l'adoption par le parlement britannique de l'accord de retrait conclu avec l'UE demeure cependant à ce jour ouverte. Dans ce contexte, l'enjeu est, pour la France, de préserver une relation de défense structurante avec le seul autre pays européen doté d'ambitions globales, disposant d'une dissuasion nucléaire et capable de mener des opérations de haute intensité. Si la participation britannique à la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) est limitée, une sortie sans accord n'en aurait pas moins des impacts négatifs. En plus de priver l'UE des contributions britanniques dès 2019, elle empêcherait, du moins à court terme, la conclusion d'un accord d'association en matière de défense, souhaitable au regard de la proximité d'intérêts avec le Royaume-Uni. Dans un tel scénario, il s'agira avant tout de veiller à ce que les futures discussions sur la participation des Etats tiers, par exemple à la coopération structurée permanente (CSP) et au fond européen de défense (FED), permettent un accord avec le Royaume-Uni conforme à nos ambitions, tout en préservant la préférence européenne essentielle et l'autonomie de décision de l'Union européenne. Toutefois, en cas de sortie sans accord, les accords bilatéraux en vigueur continueront d'asseoir la coopération de défense franco-britannique. Les conséquences directes du Brexit sont donc limitées, et des mesures préventives ont été mises en place pour y faire face (adoption du projet de loi Brexit par le parlement). En revanche, les conséquences indirectes du Brexit ne doivent pas être sous-estimées, en particulier les risques d'alignement stratégique plus marqué du Royaume-Uni sur les Etats-Unis et l'OTAN, de compétition à travers l'affirmation de « Global Britain » dans des régions comme l'Indo-pacifique, de projets capacitaires concurrents et de désengagement de certaines coopérations. A cela s'ajoutent les conséquences économiques potentielles de la sortie du Royaume-Uni de l'UE, qui ne pourront être pleinement évaluées qu'à l'issue du Brexit (accord ou non, dévaluation de la livre, accord sur la relation future avec l'UE). Le budget de la défense, déjà fragile (difficulté à réaliser les économies envisagées dans la Strategic Defence and Security Review (SDSR), achats d'équipements non prévus) pourrait en pâtir.Les prochaines échéances bilatérales de 2019 visent à atténuer ces risques et renforcer notre partenariat, déjà très étroit, dans les domaines stratégiques, opérationnels et capacitaires/industriels selon les objectifs fixés lors du dernier sommet de Sandhurst (2018) et plus généralement par les traités de Lancaster House.
Auteur : Mme Caroline Janvier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Dates :
Question publiée le 25 décembre 2018
Réponse publiée le 19 mars 2019