15ème législature

Question N° 1542
de Mme Virginie Duby-Muller (Les Républicains - Haute-Savoie )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > État

Titre > grand débat national

Question publiée au JO le : 16/01/2019
Réponse publiée au JO le : 16/01/2019 page : 41

Texte de la question

Texte de la réponse

GRAND DÉBAT NATIONAL


M. le président. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller.

Mme Virginie Duby-Muller. Monsieur le Premier ministre, après des mois de crise au sommet de l'État, Emmanuel Macron s'est soudainement souvenu que « ceux qui ne sont rien », « ceux qui n'ont pas le droit de se plaindre », méritaient, peut-être, d'être écoutés.

Aujourd'hui, vous lancez donc le fameux « grand débat national ». La position du groupe Les Républicains est constante et claire : nous y contribuerons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Nous n'avons jamais eu peur d'écouter et de débattre. Nous avons beaucoup de propositions à faire – sur le gaspillage de l'argent public,…

M. Erwan Balanant. C'est vrai que jusqu'à maintenant, vous n'avez jamais rien gaspillé !

Mme Virginie Duby-Muller. …sur le pouvoir d'achat, sur l'immigration, sur la valeur travail, sur notre ruralité.

Mais, monsieur le Premier ministre, encore faut-il que ce grand débat ait un sens, qu'il soit utile, que la parole soit libre. Or deux tiers des Français estiment déjà qu'il ne permettra pas de sortir de la crise.

Je ne vous cache pas notre sidération devant l'exercice d'encadrement auquel le Gouvernement s'adonne depuis plusieurs semaines. Grand débat, oui, mais encadré par une lettre du Président qui précise déjà que les « grandes orientations » de sa politique ne changeront pas après le débat : il invite donc les Français à bavarder sur quelques thèmes, mais ne compte rien changer. Grand débat, oui, mais piloté par des ministres macronistes : des animateurs, certes, mais seulement de la start-up nation.

Mme Patricia Mirallès. Et les maires ?

Mme Virginie Duby-Muller. Est-ce donc cela, votre vision de l'impartialité et de l'indépendance ? Grand débat, oui, mais sans précision sur qui en rédigera les conclusions ; or nous refusons que les comptes rendus soient condamnés à prendre la poussière sur une étagère. Grand débat, oui, mais en se souvenant soudainement du rôle clé de nos maires, après les avoir méprisés pendant plus d'un an et demi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR ainsi que parmi les députés non inscrits.) Grand débat, oui, mais comme un écran de fumée pour masquer le fait que la seule personne qui refuse de se remettre en question, c'est Emmanuel Macron – qui de surcroît en rajoute sur le sens de l'effort des Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Monsieur le Premier ministre, comment voulez-vous donner la parole aux Français en refusant de leur passer le micro ? Quand accepterez-vous enfin d'écouter nos concitoyens pour que ce débat soit utile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la députée, je voudrais être le plus clair possible : si vous pensez, par principe, qu'un débat ne sert à rien…

M. Thibault Bazin. Elle vient de dire que nous y contribuerons !

M. Éric Straumann. Vous n'avez rien écouté…

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … alors il me sera difficile…

M. Christian Jacob. Commencez donc par écouter les questions !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Monsieur le président Jacob, je vois que vous avez pris des forces pendant les vacances, mais laissez-moi répondre à votre collègue ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. Seul M. le Premier ministre a la parole.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la députée, le débat s'engage aujourd'hui. Il va durer deux mois. Quatre thèmes ont été fixés…

M. Fabien Di Filippo. Il y en avait cinq au départ !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …, trente-cinq questions ont été posées par le Président de la République – qui a lui-même écrit dans une lettre dont je suis certain que vous l'avez lue avec attention que les Français étaient bien évidemment libres de s'exprimer comme ils l'entendent, de choisir les thèmes qu'ils souhaiteront aborder. Personne ne songe une seconde à interdire aux Français de s'exprimer, et quand bien même quelqu'un voudrait essayer, nous connaissons suffisamment nos concitoyens pour savoir qu'une telle entreprise serait vouée à l'échec – rien ne les arrête, et ils ont bien raison !

Le débat est donc ouvert. Le Président de la République a souhaité poser trente-cinq questions – ce n'est pas rien ! – et tracer quatre champs de débat. Ce qui y sera dit sera utilisé par le Gouvernement pour prendre les décisions qui suivront : voilà à quoi servira ce débat. C'est un débat entre les Français, afin qu'ils disent ce qu'ils pensent, où qu'ils soient, qu'ils aient utilisé leur gilet jaune pour dire ce qu'ils voulaient, ou au contraire qu'ils ne l'aient pas utilisé – ces derniers pensent aussi beaucoup de choses, ont parfois le sentiment de ne pas être entendus dans cette période de grande crispation, et ont envie de s'exprimer. Nous pensons – vous comme moi, j'en suis certain – aussi à eux, et le débat servira aussi à cela.

Si nous nous adressons aux maires, ce n'est pas pour leur demander d'organiser le débat, car nous ne voulons pas leur donner quelque ordre que ce soit ; mais nous leur disons qu'en raison de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent dans notre démocratie et sur nos territoires, ils sont les mieux placés, s'ils le souhaitent, pour participer à l'organisation de ces débats.

J'observe que ce sont les maires ruraux qui, les premiers, en réaction à ces événements, ont souhaité prendre l'initiative. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Ne nous reprochez pas de les avoir entendus ! Au contraire, considérez avec moi que leur engagement est sans doute la meilleure des nouvelles.

Nous allons essayer de les accompagner, sans jamais les forcer, mais en facilitant ce qui pourra l'être. C'est ce que j'ai dit à toutes les associations d'élus ; c'est ce que Sébastien Lecornu, en tant que ministre chargé des collectivités territoriales, dira à l'ensemble des maires de France.

Si l'on veut que ça marche, il faut des responsables ! La responsabilité de Sébastien Lecornu, c'est d'aider ceux des 36 000 maires de France qui souhaitent s'engager dans ce processus, de leur répondre, de leur transmettre les informations utiles. La responsabilité d'Emmanuelle Wargon, c'est de faire en sorte que la chaîne logistique, c'est-à-dire l'ensemble des éléments indispensables à l'organisation du débat, soit prête.

Mais, madame la députée, ceux qui prendront les décisions, notamment lors de la rédaction des synthèses, notamment pour faire remonter l'information, ce n'est ni moi, ni Sébastien Lecornu, ni Emmanuelle Wargon. Ces décisions ne pourront être prises que sous le contrôle du collège des garants. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe LR.)

C'est pourquoi nous avons demandé aux présidents de l'Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental de désigner chacun un représentant, une personnalité reconnue qui veillera au respect des principes d'objectivité, d'impartialité et de transparence.

M. Frédéric Reiss. Et Mme Jouanno ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre . On peut très bien juger que ce mode de désignation n'apporte aucune garantie. Mais si vous pensez cela, alors il y a un certain nombre de nominations qui seront très rapidement contestées ! Il est, je pense, utile que les trois assemblées de la Ve République participent de cette façon – au moins de cette façon – au grand débat qui vient. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)