15ème législature

Question N° 154
de M. Boris Vallaud (Nouvelle Gauche - Landes )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Relations avec le Parlement
Ministère attributaire > Relations avec le Parlement

Rubrique > emploi et activité

Titre > fusion Alstom-Siemens

Question publiée au JO le : 12/10/2017
Réponse publiée au JO le : 12/10/2017 page : 2991

Texte de la question

Texte de la réponse

FUSION ALSTOM-SIEMENS


M. le président. La parole est à M. Boris Vallaud, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Boris Vallaud. Monsieur le Premier ministre, vous avez successivement annoncé deux bonnes nouvelles, avec la création d'un Airbus de la mer puis la création d'un Airbus du rail. Deux Airbus en quinze jours ! Pour autant, les auditions du ministre de l'économie et des finances et du président-directeur général d'Alstom ce matin n'ont pas levé nos inquiétudes. Si nous pouvons concevoir la nécessité d'une consolidation ferroviaire européenne face à la concurrence chinoise, le projet de fusion Alstom-Siemens ne se fonde sur aucun accord intergouvernemental. L'accord conclu avec Siemens est déséquilibré et cette fusion n'offre aucune garantie au-delà d'un horizon de quatre ans.

La question industrielle porte avant tout en elle l'exigence de défendre la base industrielle française. Cela tombe bien, puisque le précédent exécutif avait pris la précaution de prévoir la possibilité de racheter les 20 % d'actions actuellement détenues par Martin Bouygues dans Alstom Transport, en prévision de partenariats industriels futurs conçus non seulement comme nécessaires, mais aussi comme devant bénéficier à la base industrielle française.

Monsieur le Premier ministre, nous demandons au Gouvernement de lever l'option et d'acquérir sans attendre ces actions pour constituer un pacte d'actionnaires durable et un projet équilibré. Vous devez avant tout le faire pour défendre les emplois et les sites industriels en France, car derrière le mot pudique de « synergies » se cachent des fermetures de sites et des suppressions d'emplois. À ce sujet, je vous demande d'ailleurs de dire sans fard à la représentation nationale le nombre d'emplois et de sites en doublons en Europe et en France. Les emplois se comptent en milliers. Je ne doute pas que vous disposez, à Bercy, d'un comptage extrêmement précis que je vous saurais gré de communiquer à la représentation nationale.

Si vous ne levez pas l'option pour défendre les intérêts de notre industrie, faites-le au moins dans l'intérêt des finances publiques, comme Gilles Carrez a eu l'occasion de le dire au ministre de l'économie et des finances.

M. Thibault Bazin et M. Fabien Di Filippo . Bravo, monsieur Carrez !

M. Boris Vallaud. Monsieur le Premier ministre, notre suggestion est simple : en levant cette option, donnez-vous les moyens de réussir la construction d'un géant industriel sans sacrifier la base industrielle française. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, j'ai bien entendu vos propos. Comme vous, nous croyons à la construction européenne. Nous croyons à la réussite française dans la construction européenne et, au-delà même de la construction européenne, dans la mondialisation.

Nous connaissons tous la réalité économique du secteur ferroviaire, avec la montée en puissance d'un grand groupe chinois dont vous avez parlé, qui représente aujourd'hui la totalité des capacités productives mondiales et qui a commencé à se mobiliser sur le marché américain, où il a remporté la quasi-totalité des commandes publiques et privées. Nous savions qu'il viendrait demain sur le marché européen. C'est pourquoi il était nécessaire d'organiser un rapprochement fort entre Siemens et Alstom. Ce rapprochement est absolument indispensable dans le contexte actuel de concurrence internationale. Notre objectif est que la nouvelle entreprise se positionne à la deuxième place mondiale en matière de matériel roulant et à la première place mondiale dans le domaine de la signalisation.

Cependant, cet échange avec le groupe Siemens était soumis à certaines conditions, notamment celle que la France ne lève pas l'option que vous avez évoquée. Nous aurions pu imaginer que le gouvernement français joue un rôle de spéculateur – en levant l'option, il aurait même pu générer un bénéfice de 8 euros par action –,…

M. Boris Vallaud. Combien d'emplois aurait-il sauvés ?

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . …mais alors, il n'aurait pas pu y avoir de partenariat ou de rapprochement, tout simplement parce que les Allemands ne l'auraient pas souhaité. Par ailleurs, dans un souci d'équilibre, il aurait été nécessaire de faire entrer le gouvernement allemand au capital de ce nouveau groupe, ce qu'il n'aurait pas accepté non plus.

M. Éric Coquerel. Vous avez donc capitulé !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . Plutôt que de négocier ou de spéculer sur une valorisation capitalistique, le Gouvernement a préféré négocier des engagements précis…

M. Boris Vallaud. Pas du tout !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . …en termes de maintien d'emplois, de maintien de sites,…

M. Boris Vallaud. Qu'en sera-t-il dans quatre ans ?

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . …effectivement sur une durée limitée à quatre ans, mais vous savez mieux que moi, monsieur Vallaud, qu'il n'est pas économiquement réaliste d'espérer qu'une entreprise puisse s'engager sur dix ou vingt ans.

M. Boris Vallaud. Combien d'emplois menacés ?

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . Beaucoup de gens que vous connaissez ont pensé qu'il suffisait de promettre,…

M. le président. Merci, monsieur le secrétaire d'État.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État . …de déclarer quelque chose pour changer la réalité. L'économie, monsieur Vallaud, ne marche pas ainsi. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)