protection de l'enfance
Question de :
Mme Élodie Jacquier-Laforge
Isère (9e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 17 janvier 2019
PROTECTION DE L'ENFANCE
M. le président. La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge.
Mme Élodie Jacquier-Laforge. Madame la ministre des solidarités et de la santé, ce soir sera diffusé sur France 3 le reportage « Enfants placés : les sacrifiés de la République ». Les résultats de cette enquête sont désastreux : ils montrent que des enfants déjà extrêmement fragilisés subissent de nouvelles violences, entre eux et parfois même de la part des personnes censées les protéger. Il ne s'agit pas de stigmatiser les professionnels en charge de ces enfants qui effectuent, dans leur grande majorité, un travail formidable dans des conditions plus que difficiles.
Aujourd'hui, plus de 300 000 enfants sont pris en charge par l'aide sociale à l'enfance et 160 000 sont retirés à leur famille ; 70 % de ces enfants n'ont aucun diplôme ni aucune formation. Par ailleurs, 40 % des sans domicile fixe de moins de 25 ans sont d'anciens enfants placés.
En matière de protection de l'enfance, les chiffres sont également accablants. Deux enfants meurent chaque semaine sous les coups et les tortures. De plus, 73 000 cas de violences sur mineur sont identifiés chaque année, soit 200 par jour ; 7 000 viols sur mineur sont recensés chaque année, soit presque 20 par jour – cela représente 44 % des viols. La moitié des victimes de viol et d'agression sexuelle ont moins de 12 ans et seuls 2 % des cas donnent lieu à une condamnation. Ces chiffres illustrent l'échec global de notre politique de protection de l'enfance.
C'est en ce sens que j'avais proposé, dans le cadre de l'examen du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, un amendement visant à mettre en place une évaluation régulière des dispositifs de protection des enfants. Je regrette qu'il n'ait pas été adopté.
Le Gouvernement a lancé des travaux en vue de l'élaboration d'une stratégie nationale de protection de l'enfance, rendue publique le 20 novembre dernier à l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant. Il s'est engagé dans une campagne de prévention et de réformes, que je salue avec l'ensemble des membres du groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
Le vote à l'Assemblée nationale de la proposition de loi de ma collègue Maud Petit visant à interdire les violences éducatives ordinaires constitue également un premier pas. En outre, un haut-commissaire chargé de la protection de l'enfance a été nommé.
Madame la ministre, où en sont les travaux à ce jour et quelles actions vont être entreprises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LaREM, UDI-Agir et SOC. – Mme Bérengère Poletti applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Comme vous le savez, la protection de l'enfance est un sujet exceptionnellement sensible. Nous sommes totalement mobilisés en la matière, puisqu'une campagne de communication à destination du grand public a été lancée le 20 novembre dernier afin d'inciter les personnes témoins de violences faites à des enfants à téléphoner au 119, le numéro d'appel qui permet de signaler les enfants en danger. J'ai également diligenté une mission d'appui au groupement d'intérêt public Enfance en danger – l'organisme responsable, entre autres, du numéro d'urgence 119 – pour qu'il puisse mieux organiser le suivi des signalements et nous fournir des statistiques permettant d'évaluer la politique publique de prise en charge des enfants en danger.
Cette politique publique est historiquement partagée entre l'État et les départements. Si l'État prendra toute sa part dans les réformes à venir, les départements sont évidemment responsables du traitement des signalements, via les cellules de recueil des informations préoccupantes, et de la prise en charge des enfants ayant besoin de protection et ne pouvant pas rester dans leur famille.
La nouvelle stratégie que je porte avec Mme la garde des sceaux, Nicole Belloubet, devra faire l'objet d'une concertation avec l'Assemblée des départements de France et avec les départements. Nous devrons par exemple travailler ensemble sur la question sensible du délai d'exécution des décisions de justice.
Le 28 janvier prochain, je présenterai devant le Conseil national de la protection de l'enfance la feuille de route du Gouvernement en matière de protection de l'enfance. Dans ce cadre, comme vous nous invitez à le faire, nous devrons réfléchir avec les départements aux moyens d'assurer un meilleur pilotage des actions à conduire afin de garantir effectivement les droits de l'enfant. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Auteur : Mme Élodie Jacquier-Laforge
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 janvier 2019