avenir des établissements et services d'aide par le travail
Question de :
Mme Caroline Fiat
Meurthe-et-Moselle (6e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 30 janvier 2019
AVENIR DES ÉTABLISSEMENTS ET SERVICES D'AIDE PAR LE TRAVAIL
M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.
Mme Caroline Fiat. Madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, lors de votre dernière audition par la commission des affaires sociales, nous vous avons interrogée sur la situation des ESAT, les établissements et services d'aide par le travail, à la suite de l'annonce d'un décret de la ministre Pénicaud. Ce décret prévoit la fin de la prise en compte des commandes passées aux ESAT pour le calcul de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Mettre fin à ce principe, c'est la mort annoncée de ces établissements.
Lors de votre audition, madame la secrétaire d'État, vous nous avez rappelé qu'il n'avait « jamais été question pour les ESAT de faire fi de ce travail qui représente aujourd'hui 135 000 personnes. Le Gouvernement se bat pour sortir les travailleurs des ESAT vers le milieu ordinaire. Il n'y en a que 7 % actuellement, on voit donc que ce n'est pas une passerelle, c'est une façon d'accompagner les personnes handicapées ».
Vous espérez donc, en supprimant ce mode de calcul, faire sortir plus de travailleurs handicapés des ESAT, en privilégiant une sortie vers le milieu ordinaire.
M. Thibault Bazin. Tous n'en sont pas capables !
Mme Caroline Fiat. Même si cette décision doublait le nombre de sorties, ce qui nous semble improbable, que ferez-vous des 85 % de travailleurs handicapés restants que vous priverez d'emploi en prenant cette décision de faire mourir ces établissements ?
M. Thibault Bazin. Le décret n'est pas encore signé.
Mme Caroline Fiat. Si nombre de personnes handicapées peuvent travailler dans une entreprise ordinaire, beaucoup ont besoin de structures, d'un accompagnement particulier,…
M. Pierre-Henri Dumont. C'est tout à fait juste !
Mme Caroline Fiat. …avec les aides médico-psychologiques, les éducateurs spécialisés, les formateurs et tellement d'autres acteurs indispensables à leur intégration et à leur réussite professionnelle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur de nombreux bancs des groupes GDR, SOC et LR.) Ne détruisez pas ces métiers indispensables pour nombre de personnes en situation de handicap.
Allez-vous tout faire pour que la ministre du travail revienne sur ce décret aux conséquences dévastatrices ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI, sur de nombreux bancs des groupes GDR et LR et sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel prévoit cinq dispositions majeures, dans sa partie relative au handicap, que nous avons conçues de concert avec Sophie Cluzel. Vous avez raison, madame la députée : il nous faut toute une palette de réponses, qu'il s'agisse de l'ESAT, de l'entreprise adaptée, de l'incitation à l'embauche dans le milieu ordinaire, car tout le monde n'est pas dans le même cas et les situations évoluent dans le temps. De plus, il faut que tous ces dispositifs fonctionnent très bien ensemble.
Nous avons donc prévu qu'un référent handicap mobilise tout le secteur de l'apprentissage sur la question. Ce matin, je me trouvais au centre de formation d'apprentis – CFA – de Meaux et, avec Sophie Cluzel, nous avons pu mesurer l'effet extraordinaire produit par la mise en place de ce référent handicap : déjà soixante-dix jeunes vont être accueillis ! Nous avons en outre ouvert 100 000 places supplémentaires dans les entreprises grâce à une nouvelle définition des postes ouverts. Nous avons également renforcé les droits des personnes handicapées, y compris de celles qui travaillent en ESAT : elles bénéficieront, sur leur compte personnel de formation, de 800 euros et non pas de 500 euros par an. Ensuite, au mois de juillet dernier, j'ai signé, avec les représentants de l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l'UNAPEI, et avec ceux d'APF France handicap, une convention pour passer de 40 000 à 80 000 places dans les entreprises adaptées, cela pour donner plus de chances aux travailleurs handicapés proches du milieu ordinaire– tant il est vrai que nombre d'entre eux attendent des places.
Enfin, en ce qui concerne les ESAT, je pense qu'il y a un malentendu. Il n'est évidemment pas question de diminuer l'offre en la matière : nous avons besoin de ces établissements dans la palette de réponses que j'ai évoquée à l'instant. Le décret sur le point d'être signé revient, pour les ESAT et pour les entreprises adaptées, à une opération neutre sur le plan financier. Seul le mode de calcul change : ne sera plus pris en compte le nombre de personnes mais la masse salariale. La contribution des entreprises à travers les contrats qu'elles passent aux ESAT sera toujours prise en considération.
M. Gilles Lurton. Pas de la même façon !
Mme Muriel Pénicaud, ministre . L'opération, je le répète, sera donc neutre pour le secteur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. - « Ce n'est pas vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.)
Auteur : Mme Caroline Fiat
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Travail
Ministère répondant : Travail
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 janvier 2019