Résidence en jouisssance à temps partagé
Question de :
M. Paul Christophe
Nord (14e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
M. Paul Christophe alerte M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur la situation des propriétaires de résidence en jouissance à temps partagé. Poussés par des systèmes de défiscalisation successifs, de nombreux Français ont investi ces dernières années dans des résidences en jouissance à temps partagé. Cette multipropriété se base sur un contrat spécifique d'acquisition donnant droit à la jouissance d'un logement dans une résidence de vacances. L'investisseur privé peut ainsi occuper le bien en question pendant quelques semaines dans l'année, le reste du temps étant partagé entre les autres associés. Le fonctionnement des sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé est régi par la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986, à laquelle les lois n° 2009-888 de développement et de modernisation des services touristiques du 22 juillet 2009 et n° 2014-366 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, ont apporté des modifications pour améliorer la situation des associés. Vendues comme des placements simples et sans risque permettant aux bénéficiaires de s'offrir un patrimoine à moindre coût, ces résidences se révèlent toutefois être de véritables arnaques, enfermant les associés dans ce système malhonnête. Les gestionnaires de ces résidences profitent en effet de ce marché juteux, sans honorer les engagements pris auprès des investisseurs et ce, en toute impunité. Ils peuvent ainsi décider arbitrairement de baisser les loyers, engendrant par là même des difficultés pour les ménages les moins aisés qui se sont endettés pour acquérir le bien immobilier en question. Les gestionnaires peuvent également décider de vendre des biens immobiliers par destination, comme des radiateurs ou des éviers, et qui appartiennent pourtant aux propriétaires. De nombreux contentieux devant les tribunaux sont ainsi apparus ces dernières années, révélant à l'opinion publique ces arnaques. En conséquence, il souhaiterait connaître les mesures existantes pour protéger les propriétaires, victimes de ces manœuvres frauduleuses et injustes. Il souhaiterait également savoir si le Gouvernement entend mener une réforme de la loi n° 86-18 pour que les propriétaires puissent continuer à investir dans ce dispositif.
Réponse publiée le 2 juillet 2019
Les sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé, propriétaires de lots en résidence de tourisme, donnent à leurs associés en contrepartie de leur prise de participation, un droit de jouissance sur une période et une durée déterminée, d'un logement au sein de la résidence. Aucun droit de propriété ou autre droit réel n'est accordé aux associés de ces sociétés en contrepartie de leurs apports. Ce dispositif permet à des personnes ne disposant pas d'importantes ressources d'en avoir la jouissance afin de profiter de certains lieux touristiques prisés dans lesquels l'accession à la pleine propriété est très difficile. Procédé répandu en particulier dans les stations de sports d'hiver ou dans les stations balnéaires, il participe, en renforçant le taux d'occupation desdits logements, au dynamisme de ces zones où l'économie repose sur le tourisme. Dès lors qu'elles proposent des services et prestations aux occupants, ces logements sont des résidences de tourisme. Ils constituent des fonds de commerce bénéficiant d'un droit au renouvellement du bail commercial. Corrélativement, en cas de refus de renouvellement du bail, le gestionnaire a droit à une indemnité d'éviction. Afin d'éviter que les propriétaires de résidence de tourisme se retrouvent sans gestionnaire, ce qui leur ferait perdre le bénéfice des avantages fiscaux liés à leur investissement, et de les protéger contre « le risque de désengagement » du gestionnaire exploitant « en cours de bail », les baux commerciaux signés entre ces sociétés et les exploitants de résidences de tourisme sont d'une durée de neuf ans minimum, sans possibilité de résiliation à l'expiration d'une période triennale. En cours de contrat, les modalités d'évolution du loyer dû par le gestionnaire sont strictement réglementées. Lors du renouvellement du bail commercial, ces résidences de tourisme sont généralement considérées comme constituant des locaux, construits en vue d'une seule utilisation, ce qui permet une évaluation fixée à la valeur locative selon les usages observés dans le secteur hôtelier, tenant compte notamment du caractère spécifique desdites résidences. Après mises en demeure infructueuses, les gestionnaires de ces résidences peuvent être condamnés en référé au paiement de loyers échus et non réglés, à titre provisionnel. Un tel dispositif a été conçu pour préserver également les droits des associés ayant investi dans ce type de résidences de tourisme, en les prémunissant contre les risques de non-paiement ou de baisse injustifiée de loyers imposés unilatéralement par un gestionnaire qui ne respecterait pas ses engagements contractuels. Il convient de préciser que le Gouvernement est particulièrement attentif à la protection des investisseurs dans ce type de résidences de tourisme. En vue de protéger les acquéreurs de lots de résidence de tourisme, le code du tourisme a été modifié pour prévoir l'obligation pour les professionnels de faire figurer dans les documents de commercialisation certaines mentions, telles que les caractéristiques du bien en vente, le nom du gestionnaire de la résidence de tourisme, le versement d'une indemnité d'éviction au bénéfice de l'exploitant en cas de refus de renouvellement du bail, ainsi que les modalités générales de son calcul. Les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) effectuent des contrôles sur les pratiques commerciales des professionnels chargés de la vente de lots de résidence de tourisme et n'hésitent pas à prendre les suites appropriées. A titre d'illustration, dans le cadre de l'enquête menée en 2017, la DGCCRF a réalisé 26 visites dans 17 établissements. Au total, 7 établissements présentaient des anomalies, soit un taux d'anomalie de 41%, donnant lieu à 6 avertissements et 1 procès-verbal pénal. Ces contrôles seront poursuivis en 2019. Le code de la consommation impose par ailleurs aux professionnels qui vendent des contrats d'utilisation de biens à temps partagé des obligations d'information précontractuelle du consommateur. Les biens à temps partagé ne peuvent notamment être présentés ni être vendus comme des investissements. La DGCCRF est également habilitée à contrôler le respect par les professionnels de ces obligations et peut effectuer des enquêtes, en fonction des difficultés rencontrées par les consommateurs.
Auteur : M. Paul Christophe
Type de question : Question écrite
Rubrique : Propriété
Ministère interrogé : Ville et logement
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 22 janvier 2019
Réponse publiée le 2 juillet 2019