15ème législature

Question N° 163
de M. Guillaume Vuilletet (La République en Marche - Val-d'Oise )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > logement

Titre > politique du logement

Question publiée au JO le : 12/10/2017
Réponse publiée au JO le : 12/10/2017 page : 2998

Texte de la question

Texte de la réponse

POLITIQUE DU LOGEMENT


M. le président. La parole est à M. Guillaume Vuilletet, pour le groupe La République en marche.

M. Alexis Corbière. Monsieur le président, il faudrait quand même qu'on réponde à nos questions !

M. Guillaume Vuilletet. Monsieur le ministre de la cohésion des territoires, la France dépense chaque année près de 40 milliards d'euros pour la politique du logement. Ce sont 18 milliards qui vont aux aides personnalisées au logement – APL –, dont la moitié dans le secteur social. Il est paradoxal que les collectivités et l'État investissent puissamment pour soutenir la production de logements à bas loyer et que, dans le même temps, parce que ces loyers restent trop élevés pour les ménages qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts, l'État doive financer les APL de ces mêmes ménages. Ce système ne fonctionne pas !

M. Laurent Furst. C'est incroyable !

M. Guillaume Vuilletet. Le Gouvernement prévoit d'ailleurs, dans le projet de loi logement, une réforme de grande ampleur…

M. Fabien Di Filippo. Vous allez tuer les bailleurs sociaux !

M. Guillaume Vuilletet. …qui doit mettre fin à ce système croquignolesque, comme l'a qualifié le Président de la République récemment. Cette réforme consiste à faire baisser les loyers du parc social et, en même temps, à baisser les APL du même montant. Les allocataires, pris individuellement, ne perdront donc pas un euro.

M. Stéphane Peu. Et dans le privé ?

M. Guillaume Vuilletet. Vous avez eu le courage de souhaiter remettre à plat un système qui ne marchait pas et qu'il fallait corriger.

L'État prévoit d'aider les bailleurs sociaux à supporter financièrement cette baisse de loyer.

M. Fabien Di Filippo. Avec le pistolet sur la tempe !

M. Guillaume Vuilletet. Globalement, la situation des bailleurs sociaux est saine : ils ne sont pas dénués de ressources. Ils disposent de réserves de trésorerie et de capacités d'endettement à exploiter.

M. Pierre Cordier et M. Fabien Di Filippo . Pas tous !

M. Guillaume Vuilletet. Il y a néanmoins une grande disparité entre les bailleurs sociaux. C'est pour cette raison, et j'ai pu le constater lors du congrès HLM, qu'une inquiétude forte s'exprime dans ce secteur. Certains craignent que les capacités d'investissement, les moyens de construire et de rénover ne soient obérés, voire que des bailleurs soient eux-mêmes menacés.

Ma question est simple, monsieur le ministre. Vous avez voulu nouer un dialogue, qui semble aujourd'hui s'être un peu enrayé.

M. Pierre Cordier. Un peu beaucoup !

M. Guillaume Vuilletet. Comment allez-vous faire pour le relancer ? Comment comptez-vous rassurer les bailleurs sociaux et préserver leur capacité à investir et à rénover ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Fabien Di Filippo. Ce n'est pas gagné !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, la politique du logement de ce gouvernement est effectivement ambitieuse. Elle s'articule autour de trois axes principaux.

Le premier, c'est ce qu'il est convenu d'appeler le choc d'offre. J'entends par là un certain nombre de mesures qui doivent permettre de construire plus, plus vite et moins cher dans les zones où c'est particulièrement nécessaire. Cela passe par des dispositions fiscales de mise à disposition du foncier pour tous les porteurs de projets, mais également par un travail sur les normes, car nous savons que le coût de la construction en France est supérieur à ce qu'il devrait être, ce qui ralentit, voire interdit, certains projets.

Le deuxième axe consiste à trouver des solutions pour ceux qui sont dans la plus grande précarité. C'est ce que nous avons appelé la politique du « logement d'abord ». Présentée par le Président de la République à l'occasion d'un déplacement à Toulouse, elle a été bien accueillie et a suscité de l'intérêt. Elle doit apporter des solutions à ceux de nos citoyens les plus précaires.

Le troisième volet consiste à sortir de cette spirale d'un accroissement continu de la dépense budgétaire, et notamment des APL. Notre objectif est de ne pas modifier la situation des bénéficiaires des APL. Nous voulons à la fois diminuer le montant global des APL, sans diminuer les prestations, et éviter un système qui, pour répondre au défi du logement social, passerait par la taxation des bailleurs sociaux. La Cour des comptes a indiqué, vous le savez, que cette solution était envisageable, mais ce n'est pas le choix que nous faisons.

Nous préférerions éviter de recourir à cette taxation. C'est la raison pour laquelle nous avons indiqué, à l'article 52 du projet de loi de finances, que nous voulions diminuer les APL pour les seuls bailleurs sociaux, pour cette raison simple que, dans le logement social, les APL sont versées au bailleur, et non au bénéficiaire final. Nous voulons que cette diminution des APL soit associée, pour les bailleurs sociaux, à un certain nombre de contreparties, qui leur permettront de financer l'effort de construction et d'entretien.

M. Stéphane Peu. Ce ne sera pas équivalent !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Nous avons indiqué, dans un courrier au président de l'Union sociale pour l'habitat, M. Jean-Louis Dumont, la nature de ces contreparties. Elles sont, mesdames et messieurs les députés, considérables et variées. Elles consistent en une stabilisation du taux du livret A, qui permet de dégager pour l'avenir des recettes importantes et des marges de manœuvre tout aussi importantes pour le logement social. Elles consistent en des prêts à taux fixe avec remboursement, in fine, à hauteur de 4 milliards d'euros…

M. Laurent Furst. C'est la culture de la dette !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …et à des prêts de haut de bilan qui viendront recapitaliser un certain nombre d'organismes, dont certains ne se portent effectivement pas très bien – mais tous ceux qui s'intéressent à ce sujet savent qu'il ne faut pas faire de généralisation.

Nous allons augmenter l'offre de prêt appelée éco-PLS, qui permettra, à hauteur de 600 millions d'euros, de financer des travaux de rénovation énergétique, qui se traduiront, évidemment, par une diminution ultérieure des charges. Vous le voyez, nous avons documenté les contreparties que nous mettons sur la table pour permettre le développement du logement social.

M. Laurent Furst. Mais non !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . La porte de mon bureau et celle du ministre de la cohésion des territoires sont toujours ouvertes. La politique actuelle du logement n'est pas une réussite – tous ceux qui s'y sont intéressés le savent. Près de 40 milliards d'euros de dépenses publiques pour les résultats que nous obtenons, ce n'est pas satisfaisant !

Je n'accuse personne en disant cela, je fais seulement un constat, qui est de notoriété publique. Il faut modifier les instruments de la politique du logement et accepter l'idée d'un changement de logique. C'est ce que nous proposons à un certain nombre d'acteurs. Nous devons désormais discuter : j'y suis prêt et je suis convaincu que c'est dans l'intérêt de tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Laurent Furst. On ne discute pas, on nous impose tout !