Perturbateurs endocriniens
Question de :
Mme Valérie Beauvais
Marne (1re circonscription) - Les Républicains
Mme Valérie Beauvais attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences néfastes des perturbateurs endocriniens sur le développement du système nerveux. Ces substances présentent dans une grande diversité d'objets ou de produits du quotidien et dans la chaîne alimentaire ont en commun d'interférer avec le système hormonal des humains et des animaux. Dès lors que la présence de perturbateurs endocriniens dans l'alimentation et les cosmétiques ne fait pas l'objet d'une information obligatoire du consommateur, chacune et chacun est exposé à ces produits de façon invisible limitant ainsi la capacité de toutes et tous de ne pas en consommer. En conséquence, elle lui demande d'une part les mesures que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour protéger les consommateurs de toute consommation de tels produits et d'autre part si le Gouvernement entend marquer d'un pictogramme « déconseillé aux femmes enceintes » tous les produits contenant des substances à caractère perturbateur endocrinien.
Réponse en séance, et publiée le 23 février 2018
PICTOGRAMME MENTIONNANT LA PRÉSENCE DE PERTURBATEURS ENDOCRINIENS
M. le président. La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour exposer sa question, n° 168, relative au pictogramme mentionnant la présence de perturbateurs endocriniens.
Mme Valérie Beauvais. Madame la secrétaire d’État, ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé, mais je vous remercie par avance des précisions que vous pourrez me donner. Elle porte sur les conséquences néfastes des perturbateurs endocriniens sur le développement du système nerveux, démontrées par plusieurs recherches réalisées sur des animaux.
Dans une étude rendue publique le 29 septembre dernier, une équipe de chercheurs de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale – INSERM – a analysé les conséquences des perturbateurs endocriniens pour les enfants de femmes exposées durant leur grossesse à ces substances chimiques, dont la présence est avérée dans la composition de nombreux produits de consommation courante, comme les plastiques ou la cosmétique.
Les travaux de cette étude épidémiologique, menée par l’INSERM dans les centres hospitaliers universitaires – CHU – de Nancy et Poitiers sur un panel de 500 garçons nés entre 2003 et 2006, montrent que l’exposition à certains phénols et phtalates pendant la grossesse est associée à des troubles du comportement des garçons entre trois et cinq ans. Les composés les plus préoccupants à cet égard sont le bisphénol A, déjà interdit depuis 2015 dans tous les contenants alimentaires, et le triclosan.
Les résultats de cette étude ont ainsi démontré une association entre l'exposition au triclosan et une augmentation des troubles émotionnels à trois et cinq ans, ainsi qu'une interaction avec l'axe thyroïdien qui, pendant la grossesse, est impliqué dans le développement du cerveau du fœtus. Il s'agit de la première étude évaluant les effets de ce composé sur le comportement, alors que l'équipe d'épidémiologie environnementale de Grenoble avait déjà mis en évidence, dans cette même population, une diminution du périmètre crânien à la naissance.
Dans la mesure où la présence de perturbateurs endocriniens dans l'alimentation et les cosmétiques ne fait pas l'objet d'une information obligatoire du consommateur, chacun se trouve de fait exposé à ces produits de façon invisible, et notre capacité de ne pas en consommer est limitée.
Ma question sera donc simple : êtes-vous favorable, d'une part, à l'inscription dans le code de la santé publique de dispositions visant à protéger les consommateurs contre les substances à caractère perturbateur endocrinien avéré et, d'autre part, à marquer, comme le recommande l'inspection générale des affaires sociales, tous les produits contenant lesdites substances d'un pictogramme « déconseillé aux femmes enceintes » ? Nous ne pouvons plus dissimuler la réalité. Il est urgent d'agir pour éviter un véritable scandale sanitaire.
M. Jean-Paul Dufrègne. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la députée, je vous réponds à la place d'Agnès Buzyn qui, comme vous le savez, au dernier moment, n'a pas pu se rendre disponible, ce qu'elle regrette. Le ministère des solidarités et de la santé est mobilisé sur la question des perturbateurs endocriniens, notamment auprès des femmes enceintes et des jeunes enfants.
Nous avons annoncé, en 2017, de nouvelles actions sur les perturbateurs endocriniens, complétant celles déjà menées dans le cadre de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens. Nous sommes beaucoup plus stricts, au niveau européen, sur les bisphénols A et S et nous renforçons l'information des consommateurs ainsi que la formation des professionnels de santé.
Il s'agit par ailleurs de mettre en place une plateforme public-privé pour accélérer le déploiement de méthodes d'identification des substances à caractère perturbateur endocrinien. Afin d'améliorer l'information des consommateurs, il est prévu en particulier de développer un étiquetage des produits contenant des perturbateurs endocriniens, tels que les produits cosmétiques, les jouets et les matériaux au contact de denrées alimentaires.
Dans ce cadre, une réflexion est en cours sur la mise en place d'un pictogramme signalant ce danger à destination des publics sensibles, dont les femmes enceintes, qu'il conviendra de négocier au niveau européen, puis au niveau international, dans le cadre du système général harmonisé de classification et d'étiquetage des produits chimiques. Il est également prévu de créer un site internet d'information sur les produits chimiques afin de sensibiliser la population et de tendre vers une diminution générale de l'exposition.
Une révision de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens sera également élaborée cette année. Celle-ci sera structurée selon cinq axes portant sur le développement de la recherche, la surveillance sanitaire et environnementale, la caractérisation des dangers, la gestion des risques, la formation, l'information de la population et des professionnels.
Comme vous pouvez le constater, madame la députée, Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, est très engagée sur cette question et son intention est de toujours mieux informer et mieux protéger les usagers.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Beauvais.
Mme Valérie Beauvais. Je vous remercie pour ces précisions. Il s'agit véritablement d'un objectif de santé publique, auquel même votre secrétariat d'État peut être sensible car il est transversal. Ce sujet, qui concerne l'avenir de nos jeunes enfants, intéresse tous les Français. Nous veillerons donc à ce que ces éléments se concrétisent.
Auteur : Mme Valérie Beauvais
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 février 2018