Fermetures d'écoles et de classes du premier degré pour la rentrée scolaire
Question de :
M. Damien Abad
Ain (5e circonscription) - Les Républicains
M. Damien Abad alerte M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur les fermetures d'écoles et de classes du premier degré envisagées pour la rentrée scolaire 2022-2023. En effet, le conseil départemental de l'éducation nationale du 31 janvier 2022 a validé la carte scolaire du département de l'Ain pour la prochaine rentrée, laquelle prévoit la fermeture de deux écoles, à Outriaz et Corcelles sur le plateau d'Hauteville et d'un total de 35 classes, contre l'ouverture de seulement 21 classes. Ainsi, une fermeture de classe est notamment envisagée à l'école primaire de Tenay, classée en REP, alors même que cette école accueille parallèlement une classe d'unité d'enseignement en élémentaire autisme (UEEA) pour des enfants porteurs de TSA avec des troubles sévères. Or si cette fermeture était maintenue en l'état, l'augmentation du nombre d'élèves par classe impacterait nécessairement les conditions d'apprentissages de ces enfants. Enfin, seuls 6 postes de remplaçants sont actés, alors que 68 classes en ont actuellement besoin dans le département. Ainsi, cette nouvelle carte scolaire confirme la politique de suppression de classes menée par l'État dans les territoires, puisque 23 classes avaient été fermées l'an dernier dans l'Ain, non compensées par les 18 ouvertures corrélatives de classes. Pourtant ,le Président de la République avait annoncé, dès le 18 juillet 2017 dans un discours au Sénat : « Ce qui est sûr c'est que les territoires en particulier les plus ruraux ne peuvent plus être la variable d'ajustement d'économie. C'est pourquoi d'ici là en particulier il n'y aura plus de fermeture de classes dans les écoles primaires », puis promis qu'il n'y aurait plus de « fermeture d'écoles ou d'hôpitaux sans accord du maire de la commune d'ici la fin du quinquennat » le 25 avril 2019 en conclusion du « Grand débat ». Enfin M. le ministre a confirmé qu'il n'y aurait « pas de fermeture de classe en milieu rural sans accord du maire » le 27 mars 2020. Ainsi, ni les promesses du Président de la République ni celles du ministre de l'éducation nationale n'ont été tenues, qu'elles soient relatives aux fermetures d'écoles ou aux fermetures de classes, ce qui jette un profond discrédit sur la parole publique. Ces fermetures, principalement concentrées dans les zones rurales, menacent d'aggraver les fractures territoriales, de surcharger davantage les classes, de dégrader les conditions de travail des enseignants et de porter atteinte au niveau scolaire des jeunes ruraux, alors même que la maîtrise des savoirs fondamentaux est déjà bien souvent en péril. Aussi, il souhaiterait qu'il réétudie la carte scolaire pour la rentrée 2022-2023 dans l'Ain et que soient maintenues les écoles et les classes dans les territoires ruraux, au bénéfice du personnel enseignant et de la qualité d'apprentissage des enfants et ce conformément aux engagements du Président de la République.
Réponse en séance, et publiée le 23 février 2022
FERMETURES D'ÉCOLES
M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour exposer sa question, n° 1697, relative aux fermetures d'écoles.
M. Damien Abad. Une fois encore, la carte scolaire pour la rentrée 2022-2023 le démontre : votre politique de suppression des salles de classe sacrifie les départements ruraux, comme le département de l'Ain, sur l'autel d'une vision comptable de l'école.
L'an dernier, j'avais dénoncé vingt-trois fermetures de classes dans notre département de l'Ain ; cette année, le nombre augmente encore, puisque ce sont désormais trente-cinq suppressions de classes supplémentaires dans des petites communes, à Izenave, à Corcelles, sur le plateau d'Hauteville ainsi qu'à Tenay. Malheureusement, cette politique est un manquement à la parole publique, à celle du Président de la République et du ministre de l'éducation nationale qui s'étaient engagés à ne fermer aucune classe dans aucune école en cette période de crise sanitaire. Cette politique est aussi un manquement à l'égalité territoriale parce que les territoires ruraux sont en proie à des difficultés et à un sentiment d'abandon et font déjà face à des classes surchargées. Vous le savez, la fracture éducative est malheureusement une réalité de nos territoires ruraux.
Cette politique est aussi un manquement à l'égalité des chances, parce que l'assignation à résidence rurale est une réalité toujours plus criante pour ces jeunes, une entaille toujours plus profonde à la promesse républicaine de l'ascension sociale. Cette politique est encore un manquement à l'inclusion scolaire parce qu'elle touche, notamment dans ma circonscription, une école primaire classée en réseau d'éducation prioritaire (REP), à Tenay, qui accueille une classe d'unité d'enseignement en élémentaire autisme pour des enfants tout simplement porteurs de troubles autistiques sévères. Nous le voyons, avec cette politique éducative c'est la qualité de l'apprentissage de nos enfants qui est dégradée, ce sont aussi les conditions de travail des enseignants qui sont détériorées, à l'heure où le niveau scolaire recule et où la maîtrise des savoirs fondamentaux est en péril. Il ne s'agit pas simplement d'un coût, ce doit être une chance, une chance tout simplement pour la société. Il vous faut donc corriger cette fracture éducative et faire en sorte tout simplement de donner à chacun de nos enfants cette chance, quel que soit le lieu où il vit, quel que soit le territoire, rural ou non, où il se trouve.
Madame la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, je compte sur le Gouvernement pour au moins corriger cette carte scolaire, notamment pour l'école de Tenay, classée en REP et qui comporte une unité d'enseignement en élémentaire autisme.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Vous le savez, l’école primaire est une priorité. Nous avons largement mis en avant cette priorité entre les rentrées 2017 et 2021, puisque 14 380 postes ont été créés dans un contexte pourtant de forte baisse démographique avec 259 000 élèves en moins dans le premier degré public. Cet effort est donc tout de même très significatif. À la rentrée 2021, avec 2 489 postes supplémentaires dans le premier degré, en dépit d'une baisse démographique de 78 000 élèves, les conditions d'enseignement et de remplacement continuent de s'améliorer. Ces créations de postes ont vocation à permettre la poursuite du dédoublement des classes de grande section de maternelle en éducation prioritaire, le plafonnement des effectifs des classes à vingt-quatre élèves en grande section, CP et CE1 hors éducation prioritaire et à améliorer les conditions d'exercice des directeurs d'école.
Pour la rentrée 2022, plus de 2 000 moyens d'enseignement seront créés en dépit à nouveau d'une baisse démographique prévisionnelle de 67 000 élèves. Nous nous sommes engagés, et nous tenons cet engagement, à ce qu'aucune fermeture d'école en milieu rural n'ait lieu sans l'accord du maire, ce qui donne lieu à un examen très fin des situations locales. De manière exceptionnelle, à la rentrée 2020 nous n'avons fermé aucune classe en milieu rural, et à partir de 2021 évidemment nous avons repris ces discussions avec un examen très fin de chaque situation spécifique locale. Ce travail de préparation de la carte scolaire donne lieu à de nombreux échanges avec les élus. La situation de chaque école est observée eu égard aux spécificités locales.
Je suis moi-même haut-marnaise et nous sommes très attachés, dans ce cadre, aux mesures prévues par l'agenda rural pour assurer une véritable vigilance quant aux conditions spécifiques au milieu rural. Pour le département de l'Ain, le nombre d'élèves par classe est de 23,6 à la rentrée 2021, ce qui représente une amélioration par rapport à la rentrée 2019, où il était de 23,8. De même, le nombre de professeurs pour 100 élèves a lui aussi connu une amélioration progressive, passant de 5,16 à la rentrée 2016 à 5,35 à la rentrée 2021.
On ne peut, évidemment, se satisfaire de chiffres et il faut toujours faire preuve de vigilance s'agissant du quotidien réellement vécu, a fortiori par de jeunes élèves. Pour la rentrée 2002, le taux d'encadrement dans le département de l'Ain devra encore progresser, pour atteindre 5,44 postes pour 100 élèves, avec la création de 39 postes, alors que 246 élèves de moins sont attendus dans les écoles du département. Quant aux besoins de remplacement, une autorisation de recrutement à hauteur de 3 300 ETP – équivalents temps plein – a été annoncée dès le mois de janvier pour permettre de faire face aux besoins accrus de remplacements dans l'enseignement primaire.
Nous n'ignorons pas les difficultés que rencontrent certaines de ces écoles dans l'hyper-ruralité, tout en étant conscients de la nécessité d'équilibrer les effectifs. Je tiens cependant à signaler aussi que nous observons de très belles expérimentations dans l'hyper-ruralité, en lien avec des aires protégées. Nous avons ainsi pu déployer dans certains départements une expérimentation portant sur des projets liés à l'école de la nature, que je serais heureuse de vous exposer.
M. le président. La parole est à M. Damien Abad.
Auteur : M. Damien Abad
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 février 2022