Question écrite n°17079 : Vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) : mauvaises pratiques des promoteurs

15ème Législature
Question signalée le 1er juillet 2019

Question de : M. Stéphane Peu (Ile-de-France - Gauche démocrate et républicaine)

M. Stéphane Peu attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur les mesures à mettre en place pour lutter contre les mauvaises pratiques des promoteurs en matière de vente en l'état futur d'achèvement. En 2018, les litiges liés à ce type de vente ont augmenté de 84 % et d'après une étude de l'UFC-Que Choisir, sur 2017, près d'1 logement sur 3 est livré en retard et l'analyse des causes invoquées révèle l'importance des causes exonératoires de responsabilité, notamment celles liées aux intempéries. Par ailleurs, seul 1 logement sur 5 est livré sans réserve et 1/10e de ces logements est livré alors qu'il est inhabitable (pas de chauffage, pas d'eau). Enfin, l'absence de compensation financière lorsque la superficie du logement livré est plus petite (jusqu'à 5 %) de la superficie vendue cause un préjudice d'autant plus important lorsque le marché est tendu et le prix du m² élevé. Les besoins sont clairs. Les acquéreurs ont besoin d'une protection en améliorant le cadre juridique des causes de report de livraison, en rendant obligatoire des pénalités de retard, en interdisant la livraison dès lors que la caractère habitable d'un logement n'est pas garanti, en prévoyant une consignation obligatoire et systématique d'une partie du prix jusqu'à la levée complète des réserves, en assurant une contrepartie financière en cas de diminution de la surface. C'est dans ce contexte qu'il souhaite connaître les mesures qui seront prises afin d'apporter plus de protections aux acquéreurs dans le cadre des ventes en l'état futur d'achèvement.

Réponse publiée le 9 juillet 2019

Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) permet l'acquisition d'un immeuble qui n'existe pas ou qui est en cours de construction lors de la conclusion du contrat de vente. Le vendeur s'engage à livrer dans un délai déterminé un immeuble qu'il doit édifier et l'acquéreur à s'acquitter du paiement du prix à mesure de l'avancement des travaux de construction. Dans ce cadre, l'acquéreur, qui acquiert un bien qui n'existe pas encore et paie une partie de son prix avant l'achèvement de la construction, fait face à des risques, tels que le défaut d'achèvement par le vendeur, la livraison d'un bien non conforme aux prévisions contractuelles ou comportant des vices de construction, ou encore le retard dans la livraison de l'immeuble. Lorsqu'ils se réalisent, ces risques ont des conséquences lourdes pour l'acquéreur, pouvant générer notamment des frais supplémentaires ou la nécessité de trouver un logement alternatif. C'est la raison pour laquelle la réglementation applicable encadre strictement l'obligation du vendeur d'un immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, d'achever l'immeuble. Ainsi, d'une part, l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que l'immeuble vendu en l'état futur d'achèvement est réputé achevé lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement indispensables à son utilisation, conformément à sa destination. À cet égard, l'absence de chauffage ou d'eau dans un immeuble à usage d'habitation est de nature à rendre l'immeuble impropre à son habitabilité et à une utilisation conforme à sa destination, ce qui fait donc obstacle à ce que l'immeuble puisse être considéré comme achevé. D'autre part, afin également de protéger l'acquéreur, le vendeur est tenu de souscrire, avant la conclusion du contrat de vente, soit une garantie financière de remboursement ayant pour objet le remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement, soit une garantie financière d'achèvement de l'immeuble, par laquelle un tiers s'engage, en cas de défaillance financière du promoteur, à faire l'avance des sommes nécessaires à l'achèvement des travaux. Les modalités de mise en œuvre de cette garantie financière d'achèvement ont été améliorées par l'article 75 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), qui permet désormais au garant financier, en cas de défaillance financière du vendeur, d'obtenir du juge la désignation d'un administrateur ad hoc dont la mission est d'achever l'immeuble. En revanche, il est vrai qu'en l'état actuel de la législation, le vendeur n'est sanctionné par aucune pénalité légale pour son retard dans la livraison de l'immeuble, alors que la loi prévoit une pénalité à l'encontre de l'acquéreur en cas de retard dans le paiement du prix. De la même façon, la pratique consistant à subordonner la remise des clefs au paiement intégral du prix, faisant ainsi obstacle à la consignation du solde (5 % du prix) et à l'émission de réserves par l'acquéreur, n'est pas sanctionnée. Toutefois, toute difficulté rencontrée postérieurement qui rendrait le lien impropre à sa destination permet au particulier de se retourner contre le vendeur maître d'ouvrage au titre de l'assurance dommage ouvrage et de la responsabilité decennale des constructions permettant d'obtenir réparation. S'agissant de la surface du bien acquis, le principe d'une tolérance de 5 % résulte, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, de l'article 1619 du code civil, qui ne permet la diminution du prix pour moindre mesure qu'autant que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d'un vingtième en plus ou en moins, sauf stipulation contraire. Cette tolérance s'applique aussi bien à la vente d'immeubles à construire qu'à la vente d'immeubles anciens et figure également à l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, en cas de vente d'un lot de copropriété. Dès lors que les contrats usuellement conclus au titre de la VEFA ne prévoient pas de limitation de cette tolérance, seule une disposition législative peut en restreindre la portée. Le Gouvernement est ouvert à réfléchir, avec l'ensemble de la profession, à l'évolution de cette règle générale. En effet, elle se justifie par le caractère relativement peu industrialisé de l'activité de construire qui légitime une tolérance entre le produit annoncé et livré due aux incertitudes résultant de l'exécution de l'ouvrage. La modernisation en cours des techniques constructives, notamment la préfabrication et les modélisations numériques, permettrait d'envisager à terme une diminution de cette tolérance.

Données clés

Auteur : M. Stéphane Peu (Ile-de-France - Gauche démocrate et républicaine)

Type de question : Question écrite

Rubrique : Logement

Ministère interrogé : Ville et logement

Ministère répondant : Ville et logement

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 1er juillet 2019

Dates :
Question publiée le 19 février 2019
Réponse publiée le 9 juillet 2019

partager