15ème législature

Question N° 1707
de Mme Laurence Dumont (Socialistes et apparentés - Calvados )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Titre > Moyens du tribunal judiciaire de Caen

Question publiée au JO le : 15/02/2022
Réponse publiée au JO le : 23/02/2022

Texte de la question

Mme Laurence Dumont appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les moyens du tribunal judiciaire de Caen. Il y a quelques semaines, Mme la députée relayait à M. le ministre les inquiétudes des personnels soignants quant aux moyens prévus pour la prise en charge psychiatrique dans le cadre de la reconstruction de la maison d'arrêt de Caen. Malheureusement, en matière judiciaire, il semble que l'adéquation des moyens aux nouveaux effectifs de l'établissement n'aient pas non plus été prévus. Aussi, les juges du tribunal judiciaire nourrissent une grande inquiétude sur l'organisation de leur service. En effet, la nouvelle maison d'arrêt et la future structure d'accompagnement vers la sortie (SAS) vont entraîner un quasi-doublement des effectifs dont le suivi, en prenant en compte le centre de détention, ne pourra être assuré par les cinq juges d'application des peines en poste et les cinq greffiers. On aura des établissements permettant un accueil et des conditions de travail dignes, ce qui est une bonne chose et un impératif que Mme la députée défend depuis de nombreuses années. Mais cela ne peut se faire sans une mise en adéquation du personnel judiciaire en charge du suivi des personnes détenues. Aussi, Mme la députée demande à M. le ministre s'il peut lui indiquer la prise en compte de l'évolution de ces effectifs pour l'attribution de moyens supplémentaires au tribunal judiciaire. Leur inquiétude est d'autant plus forte que les moyens manquent, par ailleurs, dans d'autres domaines et que cinq juges pour enfants ont 600 dossiers à gérer actuellement. Un sixième serait absolument nécessaire. Elle lui demande ses intentions à ce sujet.

Texte de la réponse

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CAEN


M. le président. La parole est à Mme Laurence Dumont, pour exposer sa question, n°  1707, relative au tribunal judiciaire de Caen.

Mme Laurence Dumont. Récemment, je relayais auprès du ministre de la justice les inquiétudes des personnels soignants quant aux moyens prévus pour la prise en charge psychiatrique dans la future maison d'arrêt de Caen. Il semble en effet que, malheureusement, l'adéquation entre les moyens et le nombre de personnes détenues n'ait pas été anticipée. Or la nouvelle maison d'arrêt et la future structure d'accompagnement vers la sortie vont entraîner un quasi-doublement des effectifs, dont le suivi, si l'on prend en compte les centres pénitentiaires de Caen, d'Argentan et de Condé-sur-Sarthe, ne pourra pas être assuré par les cinq magistrats et les cinq greffiers en poste : il faudrait au minimum deux juges d'application des peines et trois à quatre greffiers supplémentaires.

Le ministère a certes pris la mesure des nouveaux besoins en prévoyant un doublement des agents pénitentiaires – et c'est bien –, mais s'impose aussi une mise en adéquation du personnel judiciaire en charge du suivi avec le nombre de personnes détenues.

Pourtant, aucune arrivée supplémentaire n'est prévue à ma connaissance, alors qu'il est mathématiquement impossible d'assurer le service public de la justice avec les effectifs existants. En effet, le nombre de personnes détenues supplémentaire sera de 367 alors que l'on compte déjà 1 176 personnes à suivre en milieu fermé et 4 100 en milieu ouvert, le tout pour 5 juges et 5 greffiers, sans compter le suivi des personnes lourdement condamnées, détenues à Caen, à Argentan ou à Condé-sur-Sarthe

Aussi, j'aimerais savoir quels sont les moyens supplémentaires que le Gouvernement entend attribuer au tribunal judiciaire de Caen au regard de l'évolution importante des effectifs qu'il aura à accompagner. L'inquiétude à cet égard est d'autant plus forte que les moyens manquent déjà dans d'autres domaines : un cinquième juge pour enfants, par exemple, serait absolument nécessaire pour la gestion des 600 dossiers en cours.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Le garde des sceaux, M. Dupond-Moretti, retenu par d'autres obligations, m'a chargée de répondre en son nom à votre question concernant le nombre de magistrats au tribunal judiciaire de Caen.

Au préalable, je pense qu'il est important de rappeler que, depuis le début de ce quinquennat, 698 magistrats supplémentaires sont arrivés en juridiction, que le seuil historique de 9 000 magistrats a été atteint en 2020 et que 870 greffiers supplémentaires ont également renforcé les effectifs. Si vous y ajoutez le recrutement de 2 000 contractuels opéré dans le cadre de la mise en œuvre de la justice de proximité, vous devez en arriver rapidement à la conclusion suivante : il n'y a jamais eu autant de personnels dans les juridictions, et le Gouvernement a fait énormément en la matière depuis 2017 ; c'est mathématique.

Pour autant, je n'ignore pas qu'il reste encore beaucoup à faire. C'est la raison pour laquelle la prochaine promotion d'élèves magistrats sera la plus grosse promotion de l'histoire, avec près de 460 élèves magistrats. Par ailleurs, le garde des sceaux a souhaité pérenniser 1 414 emplois de contractuels, recrutés au titre de la justice de proximité.

Concernant le tribunal judiciaire de Caen et les effectifs de magistrats du siège, je tiens à vous préciser que ce sont désormais trente-six magistrats du siège qui exercent au sein de la juridiction. Il n'y en avait que trente-trois en 2017. C'est donc une augmentation considérable des effectifs de magistrats du siège de la juridiction.

Les effectifs du siège comme du parquet sont actuellement au complet et seront maintenus au complet au 1er septembre 2022, à l'issue du prochain mouvement annuel de magistrats.

A également été demandée la création d'un poste supplémentaire de juge d'application des peines, en raison de la prochaine livraison, fin 2022, du centre pénitentiaire de Caen.

Les données d'activité ne semblent pas, à ce stade, justifier la création de postes de nouveaux juges, notamment d'application des peines. Nous resterons toutefois très attentifs aux conséquences induites par la livraison du nouveau centre pénitentiaire sur le service de l'application des peines.

Je vous dirai également, pour conclure, que le garde des sceaux porte une attention particulière à la situation globale de la cour d'appel de Caen. Il rappelle que les effectifs de magistrats mis à la disposition de M. le premier président de la cour d'appel de Caen et de M. le procureur général près ladite cour, qui disposent actuellement de huit magistrats placés au siège et de trois magistrats placés au parquet, leur permettent de soutenir le cas échéant le tribunal judiciaire de Caen.