15ème législature

Question N° 1708
de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés - Sarthe )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère attributaire > Éducation nationale, jeunesse et sports

Rubrique > enseignement

Titre > École inclusive

Question publiée au JO le : 15/02/2022
Réponse publiée au JO le : 23/02/2022

Texte de la question

Mme Marietta Karamanli appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, sur la situation des enfants handicapés et des enfants souffrant d'un trouble du langage dans les écoles, collèges et lycées du Mans et de la Sarthe. Des enfants ne peuvent accéder à une scolarité en classe ordinaire du fait de l'absence d'une prise en charge adaptée et accompagnée. À chaque rentrée, des enfants handicapés ne peuvent être scolarisés à temps complet, du fait d'un manque d'AESH, d'insuffisance de classe ULIS, de non-formation des enseignants, de non-accès aux temps périscolaires, notamment de restauration, de non-continuité éducative. À chaque rentrée, des enfants souffrant de troubles du langage dits « dysphasiques » ou « dyslexiques » ne font pas l'objet d'une prise en charge adaptée, du fait de l'absence de détection précoce des troubles, de non-formation des enseignants, de non-application partielle des projets d'accueil individualisés (PAI), de l'absence de temps complémentaire non pour évaluer mais pour apprendre, de l'insuffisance de coordination au sein des institutions. Une estimation faite il y a quelques années donnait 5 % du nombre d'élèves présentant ces troubles. Il y a une grande souffrance et une culpabilisation des parents à ne pouvoir faire suivre, à leurs enfants, une scolarité adaptée, une grande perplexité des enseignants et surtout un immense gâchis des compétences et capacités du côté des enfants, qui ne peuvent donner le meilleur d'eux-mêmes. Parallèlement, des inquiétudes se font jour à propos d'un texte réglementaire qui évoquerait des enfants impossibles à scolariser, sans que l'on ne comprenne la raison et la portée de cette définition. Plusieurs problèmes sont posés. D'une part, les personnels accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont peu reconnus et ne sont pas payés à la juste valeur de leur activité. La constitution de pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) dans lesquels ils interviennent, réalisant une mutualisation de moyens, semble avoir un effet d'alourdissement de leurs activités. D'autre part, les dispositifs comme les projets d'accueil individualisés (PAI) précisant les adaptations à apporter à la vie de l'enfant ou de l'adolescent en collectivité ne sont pas systématiquement pris en compte et se réduisent durant la scolarité à des tiers-temps d'évaluation supplémentaires sans soutien partagé dans les apprentissages. Saisie par des familles désemparées et alors même que se prépare la rentrée 2022-2023, Mme la députée souhaite connaître, d'une part, le nombre d'enfants handicapés qui n'ont pu être accueillis dans des écoles, collèges et lycées au Mans et dans la Sarthe faute d'une prise en charge adaptée et, d'autre part, le nombre d'enfants faisant l'objet d'un PAI et d'un tutorat ou d'une pédagogie différenciée. Elle suggère que, dans chaque département, un bilan complet de l'école inclusive des enfants concernés soit fait et qu'une conférence réunissant l'ensemble des acteurs puisse définir des objectifs, estimer les moyens utiles et fixer une trajectoire réaliste. Cet exercice pourrait nourrir le dialogue entre le niveau local et régional et la politique nationale. Elle souhaite connaître ses intentions et les moyens dédiés de façon précise.

Texte de la réponse

ÉCOLE INCLUSIVE


M. le président. La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, n°  1708, relative à l'école inclusive.

Mme Marietta Karamanli. Ma question s'adresse à monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et concerne la situation des enfants handicapés et des enfants souffrant d'un trouble du langage dans les écoles, les collèges et les lycées du Mans et de la Sarthe.

Certains enfants – et leur famille – ne peuvent accéder à une scolarité en classe ordinaire, du fait de l'absence d'une prise en charge et d'un accompagnement adaptés. À chaque rentrée, certains enfants handicapés ne peuvent être scolarisés à temps complet ; ce peut être le fait d'un manque d'AESH – accompagnant d’élèves en situation de handicap – ou d'ULIS – unité localisée pour l’inclusion scolaire –, de l'absence de formation des enseignants, ou encore de l'impossibilité pour ces enfants d'accéder aux temps périscolaires, y compris de restauration, et à une véritable continuité éducative.

Par ailleurs, à chaque rentrée, des enfants souffrant de troubles du langage, dits dysphasiques ou dyslexiques, ne font pas l'objet d'une prise en charge adaptée. Selon une estimation établie il y a quelques années, 5 % des élèves présentaient de tels troubles ; leur non-prise en compte était souvent liée au manque de détection précoce et de formation des enseignants, à l'application seulement partielle des projets d'accueil individualisés (PAI), à l'absence de temps complémentaire dédié à l'apprentissage plutôt qu'à l'évaluation et à l'insuffisance de coordination au sein des institutions.

Quel que soit le handicap ou la déficience dont souffre l'enfant, ses parents culpabilisent et souffrent beaucoup, et ses enseignants ressentent une grande perplexité ; surtout, tout cela conduit à un immense gâchis de ses capacités. Parallèlement, des inquiétudes se font jour à propos d'un texte réglementaire qui évoquerait des enfants « impossibles à scolariser ».

Plusieurs problèmes se posent. D'une part, les personnels accompagnants d'élèves en situation de handicap sont peu reconnus et ne sont pas payés à la juste valeur de leur activité. D'autre part, les dispositifs tels que les projets d'accueil individualisés, qui précisent les adaptations à apporter à la vie de l'enfant ou de l'adolescent en collectivité, ne sont pas systématiquement pris en compte et se réduisent durant la scolarité à des tiers temps d'évaluation supplémentaires, sans soutien partagé aux apprentissages.

Sollicitée par des familles désemparées et alors que se prépare la rentrée 2022-2023, je souhaite connaître, d'une part, le nombre d'enfants handicapés qui n'ont pu être accueillis dans des écoles, des collèges et des lycées du Mans et de la Sarthe, faute d'une prise en charge adaptée, et, d'autre part, le nombre d'enfants faisant l'objet d'un PAI et d'un tutorat ou d'une pédagogie différenciée.

Un bilan complet des dispositifs d'école inclusive dont bénéficient les enfants concernés devrait être fait dans chaque département : pour ce faire, une conférence réunissant l'ensemble des acteurs pourrait définir des objectifs et estimer les moyens nécessaires. Un tel exercice pourrait nourrir le dialogue entre les échelons local et régional et la politique nationale. Je souhaite connaître, madame la ministre déléguée, ce qu'a fait l'État et ce qu'il doit encore faire en la matière, ainsi les moyens qui y seront dédiés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des sports.

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée chargée des sports. Le Président de la République et le Gouvernement ont fait du handicap une priorité du quinquennat. C'est Emmanuel Macron lui-même qui, le 11 février 2020, lors de la Conférence nationale du handicap, a annoncé la création de 11 500 emplois d’AESH d’ici la fin de l'année 2022, ainsi que l’augmentation de leur temps de travail, afin d'éviter que ces personnes subissent des contrats à temps incomplet.

Les AESH garantissent un accompagnement de qualité à tous les élèves en situation de handicap, et nous devons désormais travailler à rendre leur métier plus attractif. Nous le faisons en leur garantissant un vrai statut pérenne et reconnu, au moyen de CDD et de CDI, là où ils ne disposaient que de contrats aidés avant 2017, ou encore en leur permettant d'accéder aux formations inscrites dans les plans départementaux et académiques de formation. Depuis le 1er septembre 2021, nous avons instauré un dispositif statutaire comprenant une grille indiciaire et un avancement en fonction de l’ancienneté ; il permet une revalorisation régulière et automatique de la rémunération des AESH, et une amélioration continue de leurs conditions d'emploi.

Le partenariat avec les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, est également renforcé ; l'objectif est notamment d’analyser les demandes de notification d'aide humaine en prenant en compte le bénéfice apporté par les PIAL – pôles inclusifs d’accompagnement localisé –, et aussi de déterminer un calendrier de notification permettant d'anticiper les recrutements d’AESH. Les PIAL offrent une plus grande souplesse d'organisation et permettent une meilleure adaptation aux problématiques locales ; ils doivent en outre conduire à une professionnalisation des accompagnants et à une amélioration de leurs conditions de travail. Ils favorisent aussi la possibilité, pour les AESH, de voir leur temps de travail augmenter : nous réfléchissons, par exemple, en ce moment à l'inclusion des activités de loisir, culturelles et sportives des personnes en situation de handicap dans leur champ d'intervention.

Expérimentés depuis 2019, les PIAL ont été généralisés à la rentrée scolaire 2021, et ce sont plus de 4 040 PIAL qui se répartissent aujourd'hui sur l’ensemble du territoire – cela renvoie aux conférences départementales que vous venez d'évoquer. Ainsi, l’accompagnement des élèves s'organise au plus près de leurs besoins.

À la rentrée 2021, ce dispositif a permis de répondre rapidement aux besoins qui avaient été déterminés pour le département de la Sarthe. Cependant, compte tenu de l’évolution continue des notifications, au gré des besoins nouveaux qui sont identifiés, cette situation peut évoluer dans l'attente de recrutements ou d'une réorganisation de l'accompagnement humain auprès de nouveaux élèves notifiés.

Par ailleurs, depuis la rentrée scolaire 2019, un nouveau référentiel de formation intitulé « Former l'enseignant du XXIe siècle » fait de l'inclusion des élèves un axe de formation à part entière pour les enseignants. En outre, la circulaire du 10 février 2021 relative au projet d’accueil individualisé, le PAI, va faciliter le parcours de vie en structure collective des jeunes atteints de troubles de la santé évoluant sur une longue période et nécessitant des aménagements.

Enfin, un livret de parcours inclusif (LPI) se met en place progressivement dans l'ensemble des départements : il permettra à terme de recenser tous les PAI, les PAP – plans d’accompagnement personnalisé – ou les PPS – projets personnalisés de scolarisation – rédigés pour suivre et pour accompagner le parcours des élèves à besoins éducatifs particuliers, et bien entendu pour rendre compte – c'est ce sur quoi vous m'avez interrogée – du nombre d'enfants accueillis au niveau national dans nos établissements scolaires et dont la situation de handicap rend nécessaire cet accompagnement particulier.