DIFFICULTÉS ADMINISTRATIVES LIÉES AUX DEMANDES DE PERMIS DE CONSTRUIRE
M. le président. La parole est à M. Christophe Naegelen, pour exposer sa question, n° 1710, relative aux difficultés administratives liées aux demandes de permis de construire.
M. Christophe Naegelen. L'obtention des permis de construire reste malheureusement un dispositif bureaucratique déconnecté des réalités du terrain. Dans ma circonscription des Vosges, nombreuses sont les personnes, qu'il s'agisse d'élus ou de riverains, à être confrontées à des difficultés en matière d'urbanisme, quel que soit le régime juridique qui s'applique. Si la commune relève du régime du règlement national d'urbanisme (RNU) – c'est le cas de Thiéfosse ou du Syndicat, par exemple –, les constructions ne sont autorisées que dans les parties actuellement urbanisées (PAU). De ce fait, dès que l'on envisage de construire ailleurs qu'au centre de la commune, la situation se complique et nos élus se trouvent très souvent confrontés à des services de l'État ayant une conception très restrictive de la notion de continuité. Ces services émettent fréquemment un avis négatif, alors même que les projets auront un impact positif, comme c'est le cas de ceux de ma circonscription : je pense à la construction d'une maison adaptée aux besoins d'une personne âgée, ou d'une entreprise qui dynamiserait une petite commune rurale.
Si la commune relève d'un document d'urbanisme tel qu'un plan local d'urbanisme (PLU) ou un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) comme c'est le cas dans la commune du Thillot, les élus ruraux rencontrent les mêmes difficultés, mais les explications données sont différentes. Ce sont alors les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) qui peuvent avoir un raisonnement plus bureaucratique qu'adapté à la réalité du terrain, et appliqué sans réelle concertation avec les élus locaux.
Madame la secrétaire d'État, alors que la demande de permis de construire s'accroît de 19 % depuis un an, nos élus ont vu la superficie des espaces constructibles dans leurs communes fortement restreinte au fil des années, souvent au profit des communes démographiquement plus importantes. Quelles mesures comptez-vous prendre pour introduire plus de souplesse et de réalisme dans l'application des textes au niveau local, plus particulièrement pour les petites communes rurales ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Monsieur le député, vous nous faites part des difficultés administratives qui seraient liées à l'obtention du permis de construire, résultant soit de l'application du règlement national d'urbanisme dans les communes sans document d'urbanisme, soit de la consultation de la CDPENAF.
Pour ce qui est du RNU, je veux d'abord rappeler qu'il permet de construire uniquement dans les parties urbanisées, ce qui constitue la traduction de l'un des principes de base de l'urbanisme ayant pour objectif de limiter l'urbanisation diffuse – le mitage – et de préserver les espaces naturels et agricoles. Nous sommes tous d'accord sur l'importance de cet enjeu évident en matière d'urbanisation et de préservation de ces espaces, qui passe par l'encouragement des communes à se doter d'un document d'urbanisme pour organiser l'usage de leurs sols.
Les parties urbanisées sont dotées d'une certaine densité et des réseaux nécessaires, dont l'extension et l'entretien sont coûteux pour la collectivité. Cette règle d'urbanisation est ancienne et appliquée de manière homogène et constante sur le territoire national. Elle est connue tant des communes que des services de l'État, qui, chaque fois qu'ils rendent un avis négatif, sont tenus de le justifier. De plus, cette règle comporte plusieurs exceptions, notamment pour la modification des constructions existantes ou la construction de nouveaux bâtiments agricoles.
Pour répondre à des besoins spécifiques, la commune peut même recourir au mécanisme dit de la délibération motivée, qui permet d'autoriser un projet par délibération du conseil municipal lorsque son intérêt le justifie, en particulier pour éviter une diminution de la population communale. Enfin, en se dotant d'une carte communale, un document simple et peu coûteux à établir, la commune peut reprendre la main sur la délivrance des autorisations d'urbanisme.
Vous soulignez également le rôle de la CDPENAF. Son avis peut effectivement être sollicité pour des projets comme pour des documents d'urbanisme. L'examen d'un projet en CDPENAF permet de retravailler et d'améliorer le projet, donc d'éviter des refus brutaux ou des contentieux ultérieurs. L'objectif est toujours l'obtention d'une autorisation juridiquement robuste et respectueuse des zones agricoles et naturelles. Je précise que, d'après les études réalisées par le ministère de l'agriculture, les trois quarts des avis des CDPENAF sont favorables.
Comme vous le voyez, le Gouvernement est très attentif au développement des territoires ruraux qui, comme celui des espaces urbains, doit se faire de façon organisée, dans le respect des stratégies territoriales mises en place par les élus dans leurs documents d'urbanisme. C'est précisément ce qu'encourage le droit existant, tout en ménageant des dérogations quand elles sont nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Christophe Naegelen.
M. Christophe Naegelen. Je vous remercie pour votre réponse, madame la secrétaire d'État, mais le problème réside en fait dans l'interprétation qui est faite du principe de l'urbanisation en continuité. Il est évident que, dans nos communes rurales, les constructions sont beaucoup plus espacées les unes des autres que dans les grandes villes. J'ai en tête l'exemple d'une demande de permis de construire pour une maison entourée de tous côtés par d'autres maisons : le permis a été refusé au motif qu'il y a un espace trop important entre la construction envisagée et celles qui l'encadrent. Manifestement, une personne à la préfecture a fait une interprétation très stricte du principe de continuité d'urbanisme.
Une telle situation n'est pas rare et je le déplore, car cela a des conséquences très néfastes pour les territoires ruraux. Des personnes qui aimeraient construire dans les petites communes pour avoir des enfants, pour faire marcher les écoles et les services publics, sont en effet obligées de renoncer à leur projet pour aller le réaliser dans une grande ville. C'est ainsi qu'on réduit la population des territoires ruraux et qu'on contribue à leur paupérisation.