15ème législature

Question N° 1715
de M. Emmanuel Blairy (Non inscrit - Pas-de-Calais )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Industrie
Ministère attributaire > Industrie

Rubrique > industrie

Titre > Stratégie pour pérenniser et développer le tissu industriel français

Question publiée au JO le : 15/02/2022
Réponse publiée au JO le : 23/02/2022

Texte de la question

M. Emmanuel Blairy interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie, sur la stratégie du Gouvernement pour pérenniser et développer le tissu industriel français. Les première et seconde révolutions industrielles ont fait de la France une grande puissance. Malheureusement, le déclin amorcé depuis la récession charbonnière, puis textile et métallurgique, n'a jamais été stoppé ! Les régions Hauts-de-France et Grand Est ont été les plus affectées. En 1975, les entreprises industrielles employaient plus du tiers des 25-54 ans de ces régions (39,0 % dans les Hauts-de-France et 37,4 % dans la région Grand Est). Quarante ans plus tard, en 2014, le poids de l'industrie dans l'emploi régional n'était plus que de 14,9 % dans les Hauts-de-France et de 17,1 % dans la région Grand Est. Et la chute continue depuis 2014 ! On est d'ailleurs en droit de s'interroger : les gouvernements qui se sont succédés ont-ils été réellement inquiets sur le sort de l'industrie française ? Qu'il soit permis à M. le député d'en douter, d'autant que le démantèlement se poursuit ! Ainsi, Alstom, pour ne citer qu'elle, a été bradée par Emmanuel Macron à General Electric. Un cadeau offert aux Américains et un morceau du savoir-faire français gâché et sacrifié ! L'une des traductions concrète de la poursuite de ce dépeçage en règle est la question de l'indépendance énergétique, qui a été mise à mal par les volontés funestes de Bruxelles et la pression des lobbies. La France a sacrifié un fleuron de son savoir-faire industriel, fleuron qui faisait sa renommée au niveau international : le nucléaire. Les présidents Sarkozy, Hollande et bien entendu Macron n'ont eu de cesse que de démanteler l'outil de production énergétique, répondant aux désirs d'actionnaires, avides de profit, au détriment des travailleurs français et de leur pouvoir d'achat car, aujourd'hui, on assiste impuissants à la flambée du prix de l'énergie. C'est ainsi que la centrale de Fessenheim a été liquidée sans crier gare ! De plus, la mise en service de l'EPR de Flamanville accuse un nouveau retard ! On parle désormais de 2023. En attendant, ce sont les Français qui paient la note ! Il faut rappeler que le nucléaire français est pourtant l'un des plus sûrs au monde et génère en définitive moins de déchets ! On lui préfère aujourd'hui des champs éoliens qui défigurent les campagnes, déciment la faune des terroirs et qui seront assurément la catastrophe écologique de demain. Sur des logiques mercantiles qui échappent à tout contrôle étatique, le Gouvernement n'hésite pas à brader des pans entiers de ce qui fait l'excellence française ! Finalement, pouvait-on attendre autre chose d'un banquier d'affaires ? Pendant que les Français souffrent, le Gouvernement se gargarise des 7 % de croissance enregistrés en 2021. Un trompe-l'œil ! Il faut relativiser cette donnée car il ne s'agit en définitive que d'un rattrapage du black-out covid et il convient de remettre ce chiffre en perspective avec les données antérieures à la crise. En gros, un coup de com de plus et, pendant ce temps, les entreprises et les salariés tirent le diable par la queue. Encore faut-il se donner la peine d'écouter ces acteurs essentiels du territoire. Ce sont eux qui créent les richesses du beau pays qu'est la France ! En ces temps tourmentés, il convient pourtant d'être plus que jamais aux côtés des industries et qui dit industrie, dit évidemment recherche et formation professionnelle. Car au travers de ce démantèlement orchestré de manière chirurgicale et jamais endigué, il s'agit de toute une filière qui est fragilisée et en passe de disparaître. Malgré ces orientations tragiques prises par ses dirigeants, la France compte en son sein un maillage de petites et moyennes entreprises qui innovent et développent des savoir-faire de niche et à la pointe de la technologie. C'est ça aussi le génie français qu'il faut à tout prix défendre! M. le député citera l'exemple de la plasturgie dans la région Hauts-de-France, qui aujourd'hui sait être compétitive sur des domaines comme le thermoformage. Ces compétences, enviées par tous les pays du monde, leur permettent de travailler avec des donneurs d'ordre de toute l'Europe mais aussi des cinq continents. Ce qui est vrai en matière de plasturgie l'est aussi dans d'autres domaines. Un dénominateur est commun à toutes ces entreprises : leur modèle économique repose sur le train d'avance car, pour exister et survivre dans cette compétition féroce qu'est l'industrie, elles se doivent d'anticiper les évolutions technologiques. Or qu'est-il fait pour protéger aujourd'hui ces pépites de l'industrie française ? La réponse tient en un mot : rien ! Formation, aide au recrutement, ingénierie d'accompagnement : l'État est aux abonnés absents ! Incontestablement, en matière d'industrie, le Gouvernement navigue à vue, tributaire de Bruxelles et des desiderata des grands consortiums ! La France, oui, laisse son avenir industriel entre les mains des autres ! Dans ce contexte accablant, il lui demande si le Gouvernement peut l'éclairer sur sa stratégie pour pérenniser et développer le tissu industriel français.

Texte de la réponse

TISSU INDUSTRIEL FRANÇAIS


M. le président. La parole est à M. Emmanuel Blairy, pour exposer sa question, n°  1715, relative au tissu industriel français.

M. Emmanuel Blairy. Les première et deuxième révolutions industrielles ont fait de la France une grande puissance. Malheureusement, le déclin amorcé depuis la récession charbonnière, puis textile et métallurgique, n’a jamais été stoppé ! Les régions Hauts-de-France et Grand Est ont été les plus affectées. En 1975, les entreprises industrielles employaient plus du tiers des 25-54 ans dans ces territoires – 39 % dans les Hauts-de-France et 37,4 % dans la région Grand Est. Quarante ans plus tard, en 2014, le poids de l’industrie dans l’emploi régional n’était plus que de 14,9 % dans les Hauts-de-France et de 17,1 % dans la région Grand Est. Et la chute se poursuit depuis 2014.

On est en droit de s’interroger : les gouvernements successifs se sont-ils réellement inquiétés du sort de l’industrie française ? Qu’il me soit permis d’en douter, d’autant que le démantèlement se poursuit. Ainsi, Alstom, pour ne citer qu’elle, a été bradée par Emmanuel Macron à General Electric : un cadeau offert aux Américains et un morceau du savoir-faire français gâché et sacrifié !

Parmi les répercussions concrètes de la poursuite de ce dépeçage en règle, on compte la remise en question de notre indépendance énergétique, mise à mal par les volontés funestes de Bruxelles et la pression des lobbies. La France a sacrifié un fleuron de son savoir-faire industriel, fleuron qui faisait sa renommée au niveau international : le nucléaire. Les présidents Sarkozy, Hollande et, bien entendu, Macron n’ont eu de cesse de démanteler l’outil de production énergétique, répondant aux désirs d’actionnaires avides de profit, au détriment des travailleurs français. C'est ainsi que la centrale de Fessenheim a été liquidée sans crier gare ! De plus, la mise en service de l’EPR – réacteur pressurisé européen – de Flamanville accuse un nouveau retard : on parle désormais de 2023.

En ces temps tourmentés, il convient pourtant d’être plus que jamais aux côtés des industries, et qui dit industries dit évidemment recherche et formation professionnelle. Le démantèlement orchestré de manière chirurgicale auquel nous assistons fragilise toute une filière en passe de disparaître. Malgré ces orientations tragiques prises par nos dirigeants, la France compte en son sein un maillage de petites et moyennes entreprises qui innovent et développent des savoir-faire de niche à la pointe de la technologie. C’est cela aussi le génie français, madame la ministre, et il faut à tout prix le défendre.

Je citerai l’exemple de la plasturgie, dans la région Hauts-de-France, qui sait être compétitive dans des domaines comme le thermoformage. Ses compétences, enviées par tous les pays du monde, lui permettent de travailler avec des donneurs d’ordre de toute l’Europe et des cinq continents.

Ce qui est vrai en matière de plasturgie l’est aussi dans d’autres domaines. Un dénominateur est commun à toutes ces entreprises : leur modèle économique repose sur le fait d'avoir un train d’avance car, pour exister et survivre dans cette compétition féroce qu’est l’industrie, elles se doivent d’anticiper les évolutions technologiques.

Qu’est-il fait pour protéger aujourd’hui ces pépites de l’industrie française ? La réponse tient en un mot : rien ! Formation, aide au recrutement, ingénierie d’accompagnement : l’État est aux abonnés absents ! Compte tenu de ce contexte accablant, le Gouvernement peut-il nous éclairer sur la stratégie qu'il déploie pour pérenniser et développer le tissu industriel français ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'industrie.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'industrie. Depuis 2017, avec le Président de la République et Bruno Le Maire, nous menons une politique de reconquête industrielle, qui a mis fin à trente années de capitulation. Les faits sont têtus : c'est ce gouvernement qui a arrêté l'hémorragie industrielle contre laquelle nos prédécesseurs n'ont rien fait.

Cette politique repose sur trois axes des réformes courageuses, qui ont permis de redonner de la compétitivité au site France : baisse des impôts pour les entreprises, réforme du code du travail, de l'apprentissage, de la formation professionnelle, lois sur la simplification administrative, notamment pour l'installation de sites industriels en France – lois que vous n'avez pas votées, soulignons-le au passage. Cela a permis de créer 1 million d'emplois sur l'ensemble du territoire français et de recréer de l'emploi industriel en 2017, en 2018 et en 2019. Prenons l'exemple de Lens, que vous connaissez bien : le taux de chômage est passé de 15 % en 2016 à 11 % fin 2021, cela même après la crise la plus importante de ce siècle. Jamais on n'avait vu une telle diminution depuis 2000.

Dans le cadre du plan de relance, nous avons accompagné plus d'une entreprise industrielle sur trois. Cela se traduit concrètement par 782 relocalisations, des relocalisations décidées, en cours de déploiement. Pour les Hauts-de-France, 820 projets de décarbonation, de modernisation, d'innovation et de relocalisation font l'objet d'un accompagnement. L'année dernière, il y a eu deux fois plus de sites ouverts que de sites fermés, chose qui n'était pas arrivée depuis des années. Ces usines, vous les voyez sortir de terre sur votre territoire. Je citerai la GigaFactory de batteries électriques de Douvrin ou les projets de Ruitz.

Vous m'interrogez sur la politique nucléaire. Le cap du Gouvernement est très clair : nous réactivons la production nucléaire. Tout d'abord, nous accompagnons la filière grâce aux 470 millions du plan de relance, qui ont notamment permis de soutenir 42 projets liés à la sous-traitance. Ensuite, toujours dans le cadre du plan de relance, nous travaillons sur le nucléaire de demain, autour des petits réacteurs modulaires (SMR – Small Modular Reactors –), qui marquent une rupture avec le passé. Enfin, nous déployons un plan visant à fournir une énergie bas-carbone compétitive, fondé sur l'efficacité énergétique du nucléaire et les énergies renouvelables, sans lesquelles nous ne pourrons maîtriser nos objectifs de décarbonation. La plateforme de Dunkerque, qui n'est pas si loin de nos territoires respectifs, l'illustre bien, avec le projet de deux EPR à Gravelines, l'usine Verkor pour la production de batteries électriques et les travaux sur la décarbonation menés chez ArcelorMittal.

Ce sont autant d'aspects d'une politique industrielle, concrète, maîtrisée qui crée de l'emploi.