15ème législature

Question N° 171
de Mme Marianne Dubois (Les Républicains - Loiret )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Éducation nationale
Ministère attributaire > Éducation nationale

Rubrique > personnes handicapées

Titre > Élèves handicapés et seuils de capacité des classes

Question publiée au JO le : 13/02/2018
Réponse publiée au JO le : 23/02/2018 page : 1469

Texte de la question

Mme Marianne Dubois alerte M. le ministre de l'éducation nationale sur l'insertion des élèves en situation de handicap (dispositifs ULISS et SEGPA) dans des classes touchées par l'augmentation des seuils d'effectif à la rentrée 2018-2019. Le calcul des besoins des établissements en matière de places dans les classes ne prend pas en compte la présence d'élèves handicapés. Cela pose une réelle difficulté en matière de conditions d'apprentissage, et de capacité d'accueil de ces derniers. En effet, à partir d'une trentaine d'élèves, la taille physique de la classe ne permet plus d'accueil de l'élève handicapé, qui est souvent accompagné d'un accompagnateur personnes handicapées (APH). Elle lui demande quelles réponses il compte apporter aux inquiétudes de nombreux parents d'élèves, dont notamment ceux du collège Léon Delagrange à Neuville-aux-Bois, qui ne comprennent pas cette absence de prise en compte des élèves handicapés dans les calculs des académies, dont les conséquences sont de moins en moins tenables sur le plan humain et matériel dans les territoires.

Texte de la réponse

INSERTION DES ÉLÈVES HANDICAPÉS


Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour exposer sa question, n°  171, relative à l'insertion des élèves handicapés.

Mme Marianne Dubois. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, alors que le Président de la République et le Gouvernement multiplient les communications à propos de l'effort qui serait consacré à l'éducation nationale, force est de constater que les paroles ne se traduisent pas par des actes, en particulier dans les territoires ruraux. Ainsi, dans la région Centre-Val de Loire, nous totalisons 76 ouvertures de classes pour 157 fermetures, soit un solde négatif de 81 fermetures.

Vous allez me répondre que l'on constate une baisse des effectifs dans le premier degré, et qu'en parallèle le nombre d'enseignants augmente. Mais ces constats et ces déclarations d'intentions sont balayés par les signalements journaliers de nos petites communes rurales qui voient leurs classes fermer et les effectifs des classes restantes exploser. L'examen des nouvelles affectations et des dédoublements de classes dans mon département montre d'ailleurs clairement que nos écoles rurales font les frais des dispositifs des réseaux d'éducation prioritaire – REP – et des réseaux d'éducation prioritaire renforcés – REP +.

La situation dans nos collèges n'est guère plus enviable. Ainsi, le collège de Neuville-aux-Bois, malgré un effectif quasi stable, perdra à la rentrée prochaine deux classes, en sixième et en troisième. Ces fermetures sont rendues possibles par un relèvement des seuils d'effectif par division, méthode purement administrative qui permet d'économiser des enseignants au prix de graves conséquences sur la qualité de l'enseignement. Elle compliquera encore davantage les conditions d'apprentissage des élèves dans des classes déjà très hétérogènes et surchargées.

En outre, elle ne tient pas compte des conditions particulières d'accueil des élèves en situation de handicap dont les accompagnants, les auxiliaires de vie scolaire, auront du mal à être accueillis au sein des classes. Elle ne prend pas davantage en considération l'inclusion des élèves du dispositif ULIS – unité localisée pour l'inclusion scolaire – ou de SEGPA – section d'enseignement général et professionnel adapté –, qu'elle rend parfois impossible en raison des capacités d'accueil des salles de cours. Pourquoi, en particulier, les élèves d'ULIS ne sont-ils pas comptabilisés dans les effectifs, alors que leur intégration dans une classe est obligatoire ?

Monsieur le ministre, au-delà de cette dernière question, c'est l'effectivité de l'égalité d'accès à l'éducation qui est en question, en particulier en zone rurale.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Votre question, madame la députée, en comporte plusieurs puisqu'elle concerne à la fois la ruralité et le handicap.

Je tiens tout d'abord à vous dire que, dans le premier domaine comme dans le second, les moyens augmentent à la rentrée prochaine. Il ne m'a pas échappé qu'une campagne politique est en cours qui vise à affirmer le contraire. Je le regrette, car je suis très sincèrement engagé dans la lutte pour la ruralité et pour la vitalité des territoires ruraux. Alors même que nous allons agir, que nous sommes en train d'agir, on cherche à faire croire à l'opinion publique que les moyens destinés à l'école rurale seraient sacrifiés, ce qui est faux. À chaque député, à chaque sénateur qui me pose la même question, depuis plusieurs semaines, je montre à propos du département concerné soit qu'il y a des créations de postes alors que le nombre d'élèves diminue, soit que les réductions du nombre de postes ne sont pas proportionnelles, loin s'en faut, à la diminution du nombre d'élèves. C'est une réalité que tout un chacun peut vérifier par des moyens rationnels.

Bien entendu, il y a des fermetures de classe ; je ne le conteste pas. Il y en a toujours eu, depuis des décennies, sous différents gouvernements – certains que vous avez soutenus, d'autres que vous avez combattus –, et je peux vous prédire qu'il en ira de même au cours des décennies à venir parce que, tout simplement, c'est la vie. Des classes sont fermées, d'autres sont ouvertes, en fonction du nombre d'élèves et de familles qui passent d'un endroit à un autre.

Cela n'interdit pas d'être particulièrement sensible à ce sujet et de veiller de près à ce que les fermetures d'écoles soient le moins nombreuses possible et, quand elles surviennent, se fondent sur un consensus local à partir des réalités constatées. Voilà pourquoi je privilégie actuellement la méthode des contrats départementaux ruraux, qui doivent permettre, dans soixante-cinq départements, une planification pluriannuelle et une prévision qualitative visant à rendre plus attractives les écoles rurales pour que celles-ci contribuent au renouveau de la ruralité.

Mais les chiffres sont là : plus de 3 800 créations de postes dans les écoles primaires à la rentrée prochaine, alors même qu'il y a plus de 32 000 élèves en moins. Le taux d'encadrement à la rentrée prochaine sera donc meilleur que jamais. C'est encore plus vrai dans les départements ruraux : en Lozère, le ratio dit P/E – le nombre de postes d'enseignants, en équivalents temps plein, pour cent élèves – sera de 9 l'année prochaine et, dans chaque département rural, le taux d'encadrement va augmenter.

Je trouve inutile et même contre-productif de laisser croire le contraire, car cela ajoute à la désespérance rurale au moment même où nous travaillons à modifier la situation.

S'agissant du handicap, j'ai rappelé l'augmentation des moyens que nous lui consacrons, passés de 800 millions à 1,2 milliard d'euros : il n'y a pas non plus d'économies dans ce domaine, clairement défini comme une priorité.

Vous évoquez la difficulté à accueillir des élèves en situation de handicap, mais il faut d'abord souligner la différence entre les SEGPA et les ULIS.

La SEGPA n'est pas réservée aux élèves en situation de handicap, mais accueille des élèves présentant des difficultés scolaires graves et persistantes dont l'origine n'est pas nécessairement une situation de handicap. Chaque division de SEGPA accueille seize élèves au maximum.

Un élève est reconnu en situation de handicap s'il dispose d'une notification de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, la CDAPH, instance décisionnelle de la maison départementale des personnes handicapées, la MDPH. Elle peut notamment proposer à la famille une orientation en ULIS.

Les ULIS collège accueillent dix élèves par classe. Dans ce cadre, les élèves bénéficient de temps de regroupement dans l'espace classe ULIS et de temps d'inclusion en sixième, cinquième, quatrième ou troisième, en fonction de leur âge et de leurs compétences. Inscrits dans leur collège, ces élèves font partie des effectifs de l'établissement scolaire : ils ne viennent pas s'y ajouter.

Le nombre global d'élèves que le chef d'établissement pense pouvoir accueillir est estimé compte tenu de la diversité des formations proposées, du cadre pédagogique et des normes de sécurité. Chaque année, le recteur instaure un dialogue de pilotage avec le chef de chaque établissement afin d'ajuster les moyens qu'il lui alloue. La présence de dispositifs ULIS et de SEGPA dans l'établissement scolaire ainsi que les élèves à besoins éducatifs particuliers sont pris en considération.

L'inclusion scolaire est une priorité de ce gouvernement. Il y aura davantage de dispositifs ULIS à la rentrée prochaine ; quant aux SEGPA, je suis moi-même très favorable à ce qu'elles existent, en fonction des réalités de chaque établissement, et je veillerai très attentivement à ce qu'aucune ne disparaisse sans que cela soit justifié par l'évolution du public d'élèves.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Dubois.

Mme Marianne Dubois. Merci, monsieur le ministre, de votre réponse. Je suis un peu chagrinée qu'à vos yeux ma question ne soit que politique. Il y a des chiffres, il existe certainement des regroupements, mais la ruralité souffre malgré tout.

Concernant les ULIS, il est un peu compliqué pour leurs élèves d'être intégrés à des classes « normales » quand les seuils d'effectif sont relevés.