Élections européennes 2019 - Risque d'ingérence étrangère
Question de :
Mme Marine Le Pen
Pas-de-Calais (11e circonscription) - Non inscrit
Mme Marine Le Pen interroge Mme la ministre, auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes, sur les ingérences étrangères qui pourraient peser sur la campagne des élections européennes. Dans un entretien paru dans le journal Le Monde le 18 février 2019, Mme la ministre évoque des « tentatives de manipulation, de désinformations et d'immixtions dans les processus électoraux portées par des gouvernements ou des initiatives privées en dehors de l'Union ». Ces propos sont d'une extrême gravité et inquiètent à juste titre les Français et les mouvements politiques engagés dans cette campagne. Malheureusement, ils ne sont pas étayés par des faits connus, ni par le grand public ni par la représentation nationale. Elle souhaite donc qu'elle informe au plus vite la représentation nationale sur les faits précis qui l'ont amené à évoquer le risque d'ingérence étrangère pendant les élections européennes ; elle souhaite également avoir des information précises sur le « système d'alerte rapide » sur les fake news mis en place par l'Union européenne.
Réponse publiée le 11 août 2020
Les risques d'ingérences étrangères qui pèsent sur les prochaines élections européennes sont réels et élevés. Il s'agit d'une préoccupation forte et partagée par la totalité des Etats-membres. Cette préoccupation trouve son origine dans un contexte international qui a vu la multiplication de campagnes de manipulation de l'information et de l'opinion, menée par des puissances étrangères, dans le but de délibérément interférer avec les processus électoraux. Cela a été le cas lors dernière élection présidentielle américaine, pour laquelle le Président Obama a souligné publiquement en décembre 2016 que le piratage des mails du Comité National Démocrate par des hackers russes avait contribué à influencer durablement l'atmosphère de la campagne, semant le doute et les fausses informations sur une candidate en particulier, et à son détriment. De même, en novembre 2017, la Première Ministre britannique, Theresa May, a également publiquement accusé une puissance étrangère, en l'occurrence la Russie, d'interférer avec les élections en utilisant les fausses informations comme une arme dans le but de jeter la discorde au sein des démocraties occidentales. Ces déclarations précèdent un rapport publié par le Parlement britannique qui, s'appuyant sur des sources scientifiques, détaille la création massive de comptes automatiques et le financement de publicités par des acteurs russes. Ces techniques ont été délibérément utilisées afin d'influencer le résultat du référendum sur le Brexit. Les mêmes méthodes ont été observées et analysées pour la consultation organisée en dehors du cadre légal en Catalogne, mais aussi au sein des pays Baltes et en particulier la Lettonie et l'Estonie. Ces Etats ont d'ailleurs récemment annoncé conjointement la mise en place de plusieurs initiatives, en lien avec la société civile, pour mieux lutter contre l'impact dangereux de la désinformation. Comme l'a également souligné le Parlement européen en novembre 2016, ces campagnes de manipulation de l'information font partie de stratégies hostiles de puissance où « l'information est utilisée comme une arme pour diviser et affaiblir » et où la menace prend « la forme de soutien aux extrémistes et à des campagnes de désinformation de grande ampleur ». Ces campagnes ont bien pour but de s'attaquer directement au droit des citoyens à exercer leur jugement et leur consentement libres et éclairés et donc de nuire à l'essence même de nos démocraties. C'est pourquoi il est nécessaire, comme le rappelait le commissaire européen chargé de l'Union de la sécurité, Sir Julian King, de « joindre nos forces pour protéger nos démocraties contre la désinformation ». C'est dans ce contexte que s'inscrit la mise en place du plan d'action européen de lutte contre la désinformation en décembre 2018. Le système d'alerte rapide européen est l'une des quatre mesures de ce plan qui inclut également trois autres volets d'action : mise en place de politiques de sensibilisation auprès des citoyens, amélioration des moyens de la détection de la menace et mise en œuvre par les plateformes en ligne des mesures qu'elles se sont engagées à prendre en signant le code de bonne pratique. Le système d'alerte rapide permettra de faciliter la coordination européenne face à la menace : il est composé d'un réseau de points de contact nationaux qui se réunira pour la première fois le 18 mars prochain. Il s'agit, à travers lui, de permettre à chacun des pays de donner l'alerte en cas de campagne de manipulation de l'information avérée, ainsi qu'à échanger sur les bonnes pratiques, les analyses et les informations recueillies en matière de lutte contre la désinformation durant l'ensemble de la période électorale. C'est également dans ce contexte que le président de la République a proposé dans sa tribune du 5 mars que soit créée une Agence européenne de la protection des démocraties avec l'objectif de répondre au risque d'ingérence dans les élections nationales. La future Agence s'appuiera sur une réserve d'experts nationaux mobilisable en cas de crise pour aider chaque Etat membre à protéger son système électoral contre les cyberattaques et les manipulations de l'information.
Auteur : Mme Marine Le Pen
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 11 août 2020
Réponse publiée le 11 août 2020