15ème législature

Question N° 17378
de M. Luc Carvounas (Socialistes et apparentés - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > politique extérieure

Titre > Contrecarrer l'extra-territorialité du droit américain - Stratégie de la France

Question publiée au JO le : 26/02/2019 page : 1808
Réponse publiée au JO le : 15/10/2019 page : 8840

Texte de la question

M. Luc Carvounas alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la stratégie de la France pour contrecarrer l'extra-territorialité du droit américain. En effet, après l'Iran, de nombreux députés ont alerté le Président de la République et celui de la Commission européenne sur les risques de sanctions américaines contre les entreprises françaises opérant à Cuba, à la suite d'une récente décision du Département d'État des États-Unis, annoncée le 17 janvier 2019 par le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo. Le secrétaire d'État américain a suspendu, pour 45 jours, seulement le titre trois de loi Helms-Burton qui avait renforcé l'embargo en 1996, au lieu de six mois comme l'avaient fait tous les présidents américains jusqu'à aujourd'hui, laissant planer la menace de sanctions contre les entreprises européennes présentes à Cuba. Si ce texte était appliqué, il constituerait, à n'en pas douter, un chantage puisque les entreprises européennes qui détiendraient des investissements à Cuba devraient les céder s'ils veulent poursuivre leurs activités aux États-Unis. Il lui demande donc quelle stratégie la France compte mettre en œuvre pour contrecarrer l'extra-territorialité du droit américain qui pénaliserait les entreprises françaises.

Texte de la réponse

Le recours croissant, par les États-Unis, à des dispositions extraterritoriales en matière de sanctions financières internationales et de lutte contre la corruption, est injustifié, injustifiable et contraire au droit international. La direction prise par l'administration américaine de dénoncer unilatéralement l'accord de Vienne et réintroduire les sanctions extraterritoriales à l'encontre de l'Iran, en est l'une des illustrations les plus regrettables. La remise en question de la suspension d'application (waiver) du titre III de la loi Helms-Burton avec Cuba est une nouvelle manifestation du recours croissant à ces mesures extraterritorialité. Le ministre de l'économie et des finances s'est engagé à mobiliser nos partenaires européens pour renforcer la souveraineté économique de l'Union européenne. La Commission européenne, avec le soutien de la France et de ses partenaires européens, a d'ores et déjà étendu le champ d'application du règlement européen 2271/96 dit « règlement de blocage », qui permet désormais de protéger les entreprises européennes exerçant des activités licites en Iran contre l'extraterritorialité des sanctions américaines, signe de notre mobilisation collective sur le sujet. Enfin, depuis l'annonce du rétablissement des sanctions américaines à l'encontre de l'Iran, en mai 2018, la France – aux côtés d'autres Etats-membres affinitaires - travaille activement à la constitution d'un canal financier autonome pour ses opérateurs, afin de pallier les défaillances de marché relevées sur les canaux bancaires. Le Gouvernement continuera à se mobiliser pleinement, avec nos partenaires, pour renforcer tous les outils nationaux et européens afin de faire entendre la voix des Européens et de refuser les effets extraterritoriaux des sanctions américaines. L'Union européenne doit pouvoir être libre de commercer légitimement avec les entités et avec les pays qu'elle souhaite, sans que des dispositions extraterritoriales ne viennent entraver ses opérateurs économiques. C'est une question de souveraineté européenne. Au plan national, afin de faire face aux procédures donnant effet à des législations de portée extraterritoriale, la France dispose d'un outil de contrôle des informations transmises à des autorités étrangères : la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968, dite « de blocage ». Cette dernière sera renforcée pour encadrer encore davantage la transmission d'informations à des autorités étrangères, en particulier pour protéger les intérêts stratégiques de nos opérateurs économiques. Le Gouvernement a d'ailleurs confié à M. Raphaël Gauvain, Député de Saône-et-Loire, une mission sur les mesures nécessaires pour accroitre la protection des entreprises françaises confrontées à ces procédures administratives et judiciaires.