15ème législature

Question N° 17594
de M. Bastien Lachaud (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > administration

Titre > Accaparation et commercialisation des services administratifs

Question publiée au JO le : 12/03/2019 page : 2289
Réponse publiée au JO le : 04/05/2021 page : 3918
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Bastien Lachaud alerte M. le ministre de l'intérieur sur la commercialisation indue des services administratifs par des intermédiaires. En effet, cette forme d'escroquerie a pris des proportions alarmantes ces dernières années et touche encore plus gravement les personnes qui ont un besoin urgent d'un rendez-vous administratif. Des malfrats se sont fait une spécialité de vendre à prix d'argent des services fournis normalement gratuitement, ou du moins sans intermédiaire, par les services de l'État : l'accès à un rendez-vous avec l'administration, qui souvent se fait sur internet. Le problème est si grave que les sites internet parasites apparaissent dans les moteurs de recherche avant même ceux des services officiels concernés. C'est par exemple le cas pour l'obtention d'une carte grise. Le même genre de fraude existe lorsqu'il s'agit d'obtenir des rendez-vous en préfecture pour obtenir ou renouveler des papiers d'identité, titres de séjour, demande de naturalisation par exemple. Des intermédiaires sans scrupule monopolisent les horaires disponibles pour ensuite les revendre. Le département de la Seine-Saint-Denis dont il est député est d'ailleurs particulièrement touché par ce fléau. Ce business digne d'un État failli se fait bien sûr au détriment des personnes qui sont les plus fragiles. Il est d'ailleurs largement dû à la sous-dotation chronique des services de l'État et à la situation de pénurie qu'elle provoque. Les personnes ne peuvent accéder à l'administration sans payer, ou ne peuvent y accéder tout court. S'ensuivent des situations personnelles particulièrement problématiques, engendrant une grande détresse, du fait de l'impossibilité de mener à bien une démarche administrative. Dans ces conditions, l'apparition de profiteurs n'est guère surprenante. Elle menace pourtant très sérieusement la cohésion sociale et doit faire l'objet d'une répression exemplaire. C'est pourquoi il souhaite savoir quels moyens il compte employer afin de préserver les services publics de ce genre de parasitisme.

Texte de la réponse

Le Gouvernement a engagé une démarche de modernisation de l'action publique pour permettre aux Français de disposer de services publics accessibles par internet, dans une optique de simplification des démarches. Le plan préfectures nouvelle génération (PPNG) a débouché, en 2017, sur la dématérialisation, totale ou partielle, de la délivrance des cartes nationales d'identité (CNI), des passeports, des certificats d'immatriculation (CIV) et des permis de conduire. Dès l'origine, ce plan a prévu des dispositifs d'accompagnement renforcé des usagers, en direction des publics éloignés du numérique d'une part, de l'ensemble des utilisateurs des téléprocédures d'autre part. Il a aussi érigé la sécurisation des téléprocédures dans la délivrance des titres au rang de priorité. Alors que les services chargés de l'accueil des étrangers dans les préfectures sont soumis à une forte pression, l'extension des délais de rendez-vous, outre les difficultés qu'elle entraine pour les usagers, peut s'accompagner du développement de pratiques irrégulières telles que le trafic de rendez-vous. Dès le mois de mai 2019, le module national de prise de rendez-vous a été mis à jour pour intégrer un contrôle anti-robot (technologie « Re-captcha ») afin de limiter la captation des rendez-vous mis à disposition par les services. De plus, le nombre de réservation en cours peut être limité : cela signifie qu'avec une même adresse mail, un usager ne pourra prendre qu'un nombre de rendez-vous défini au préalable. En matière de renouvellement de titre, le module intègre désormais une option rendant obligatoire pour l'usager la saisie du numéro de dossier dans la base AGDREF, ce qui déclenche une interrogation de la base de données pour vérifier si le numéro existe et, le cas échéant, empêcher la prise de rendez-vous indue. Les actions intrusives constatées par les préfets font systématiquement l'objet de plaintes auprès de l'autorité judiciaire. Toutes les informations sur d'éventuels trafics sont exploitées et donnent lieu à investigation et saisine du parquet chaque fois que cela est possible. La réduction des délais reste indispensable pour prévenir ces phénomènes. Les actions mises en place dès 2014 pour fluidifier l'accès aux guichets ont ainsi permis de limiter les temps d'attente : développement de l'accueil sur rendez-vous, dépôt par voie postale et mise en place de solutions permettant d'aller au-devant du public comme la multiplication des guichets délocalisés dans les universités pour l'accueil du public étudiant. Le renforcement des services des étrangers en emplois pérennes et vacataires a également contribué à absorber l'augmentation des flux constatés. Enfin, la création en 2016 du titre pluriannuel en lieu et place des titres renouvelables annuellement a entrainé mécaniquement la réduction du nombre de déplacements nécessaires en préfecture. De trois à quatre en moyenne, le nombre de passages pour la délivrance d'un titre devrait être ramené d'ici fin 2022 à un seul rendez-vous pour la majorité des dossiers dans le cadre du déploiement du programme de dématérialisation des procédures « Administration numérique des étrangers en France (ANEF) ». Ce projet autorise, depuis le 17 septembre 2020 pour les premières demandes et renouvellement de titres étudiant, le dépôt en ligne du dossier et son traitement par la préfecture compétente. En tout état de cause, si les usagers souhaitent solliciter des sites marchands qui proposent des prestations de services pour réaliser certaines démarches administratives moyennant une contrepartie financière, ces sites ne peuvent exercer leur activité que si leur objet est licite et si leur fondement est conforme aux règles du droit de la consommation et de la répression des fraudes. L'usager qui découvre un site dont l'activité est illicite peut signaler l'abus par internet, d'une part sur la Plateforme d'Harmonisation, d'Analyse, de Recoupement et d'Orientation des Signalements (PHAROS) du ministère de l'Intérieur en utilisant l'URL www.internet-signalement.gouv.fr et d'autre part sur la plateforme qui héberge le contenu illicite en application de l'article 6 de la loi sur la confiance en l'économie numérique du 21 juin 2004 modifiée (LCEN). D'autres plateformes numériques d'aide aux signalements ont été créées tel que le site CYBERMALVAILLENCE.GOUV.FR depuis 2018, qui relève du Groupement d'Intérêt Public Action contre la Cybermalveillance (GIP ACYMA). La brigade numérique de la gendarmerie nationale appelée BNum, en ligne 24 h/24 et 7 j/7, est également à même de renseigner et conseiller notamment sur la protection des données personnelles. L'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) propose, par ailleurs, différents outils d'accompagnement (guides, formation …) pour un usage sécurisé du numérique.